El buen patrón arrive en nos terres auréolé de six prix Goya (l’équivalent des prix Iris en Espagne), dont ceux attribués au meilleur film, à la meilleure réalisation, au meilleur scénario et au meilleur acteur, Javier Bardem.

Cette comédie sociale fut également gratifiée d’un succès qui, au pays de Rafael Nadal, a pratiquement viré au phénomène. Il est vrai que, sans tomber dans la farce, et grâce aussi à une performance remarquable de celui qui personnifie Stilgar dans Dune, de Denis Villeneuve, Un bon patron se démarque avantageusement.

Retrouvant le réalisateur Fernando León de Aranoa pour la troisième fois, Javier Bardem, quasi méconnaissable, se glisse dans la peau du patron d’une entreprise familiale spécialisée dans la fabrication de balances de toutes natures. Il tient d’ailleurs à ce que celle ornant la grille à l’entrée de son usine soit toujours impeccablement équilibrée, même si, d’évidence, la notion de justice à l’intérieur de son entreprise est plutôt flexible.

Obsédé par l’image de l’entreprise et l’obtention de prix et de trophées, Blanco (Javier Bardem) s’adresse d’abord à ses employés pour donner les consignes avant la visite d’un comité qui pourrait – ou non – lui décerner un prestigieux prix d’entrepreneuriat. On comprend très vite que ce patron paternaliste, faussement bienveillant, transgresse allègrement les règles éthiques les plus élémentaires pour tout tirer à son profit. Sa femme ne manque d’ailleurs pas de lui faire remarquer que son seul mérite aura été de prendre rendez-vous chez le notaire pour toucher l’héritage que lui a légué son père.

Sans trop en avoir l’air

La situation se corse quand une série d’évènements s’enchaîne pour finalement orchestrer un contexte assez catastrophique. Il y a d’abord cet employé licencié (Óscar de la Fuente) qui décide de protester de façon tapageuse en installant un campement sur le terrain en face de l’usine, où il vocifère ses slogans peu flatteurs au mégaphone avec la complicité tacite du gardien. À la veille de la venue du comité pour l’attribution du fameux prix d’excellence, voilà qui n’est pas de bon augure.

Il y a Miralles (Manolo Solo), cet ami d’enfance dont le père a aussi travaillé à l’usine (à l’époque où celle-ci était dirigée par le père de Blanco), qui traverse une période dépressive – sa femme le trompe avec l’un des contremaîtres – au point de ne plus être apte à faire son travail correctement. Il y a ce fils d’un vieil employé fidèle, impliqué dans une bagarre où il y a eu mort d’homme. Et puis, il y a cette nouvelle stagiaire (Almudena Amor), avec qui Blanco n’a pu s’empêcher d’avoir une aventure, qui viendra aussi, peut-être, brouiller les pistes…

La grande qualité du scénario de Fernando León de Aranoa, cinéaste surtout connu dans le monde hispanophone (il compte une dizaine de longs métrages à son actif, dont quelques documentaires), est d’offrir sans trop en avoir l’air un portrait très grinçant de l’exercice du pouvoir. Pour ce faire, il ne pouvait trouver plus bel interprète que Javier Bardem.

Visiblement heureux de tourner chez lui, l’acteur s’en donne à cœur joie dans un personnage de salaud, aussi manipulateur que menteur, à travers lequel il parvient néanmoins à toujours trouver la note juste, au point de presque donner à son personnage le bénéfice du doute.

El buen patrón est à l’affiche en version originale espagnole avec sous-titres français (sous le titre Un bon patron) ou anglais (sous le titre The Good Boss).

Un bon patron

Comédie

Un bon patron

Fernando León de Aranoa

Avec Javier Bardem, Manolo Solo, Almudena Amor

1 h 56

7/10

En salle