Dans le Québec des années 1970, un jeune Montréalais repère, dans la cour d’un monastère, un séminariste qui lui ressemble étrangement et découvre progressivement, après avoir retrouvé sa mère qu’il croyait morte, son histoire familiale, plutôt tordue…

Reconnu pour son éclectisme, sa propension à mêler les styles, et pour faire de la pornographie un genre cinématographique comme un autre, Bruce LaBruce, l’un des chefs de file du cinéma queer, propose aujourd’hui un film s’inscrivant dans la frange plus « traditionnelle » de son œuvre, pour peu qu’on puisse dire que celle-ci en comporte une, bien sûr. Dans une entrevue qu’il nous a accordée l’an dernier, le cinéaste canadien disait toujours choisir des sujets qu’on ne devrait pas toucher en principe. Et y aller goulûment.

Tourné au Québec, à l’instar de Gerontophilia, Saint-Narcisse découle de la vision d’un créateur qui s’amuse à jouer de tous les tabous, avec, souvent, une forte propension à revisiter l’esthétisme du cinéma underground des années 1970. Le récit de son nouveau long métrage étant campé en 1972, LaBruce multiplie d’ailleurs les clins d’œil. Portant à l’écran un scénario écrit avec Martin Girard (Nitro Rush), le réalisateur de Hustler White et de L. A. Zombie propose une histoire au centre de laquelle se trouve Dominic (Félix-Antoine Duval, excellent dans un double rôle), un jeune homme obsédé par son image, qui part à la trace de son histoire familiale. Aimant bien se prendre en égoportrait avec son appareil Polaroid, Dominic découvrira des choses étonnantes en chemin, notamment la présence d’un jumeau, élevé sous le joug d’un prêtre agresseur (Andreas Apergis)…

Regroupant des éléments disparates (l’entrée en matière laisse entendre dans une radio au loin le manifeste du FLQ et est suivie d’une scène de sexe assez drôle), Bruce LaBruce propose ici un film inclassable, dont on remarque le soin apporté sur le plan de la direction artistique, tout autant que celui des images (une direction photo de Michel La Veaux, qui signe aussi celle de Maria Chapdelaine).

Même si l’aspect délicieusement subversif de l’ensemble est bien apprécié, il reste que les thèmes abordés dans cette variation sur le mythe de Narcisse sont si foisonnants qu’on se demande si LaBruce n’aurait pas dû aller encore plus loin dans l’outrance.

Présenté l’an dernier à la Mostra de Venise, au TIFF et au Festival du nouveau cinéma de Montréal, Saint-Narcisse prend l’affiche en salle en version originale avec sous-titres français.

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Saint-Narcisse

Comédie dramatique

Saint-Narcisse

Bruce LaBruce

Avec Félix-Antoine Duval, Tania Kontoyanni, Alexandra Petrachuk

1 h 41

6/10