Un paysan autrichien qui refuse de se battre aux côtés des nazis est reconnu coupable de trahison et passible de la peine de mort. Imperturbable, il s’accroche à sa foi et son amour pour sa famille.

A Hidden Life, de Terrence Malick, est le retour à la grande forme pour l’énigmatique cinéaste de Days of Heaven et The Tree of Life  (Palme d’or à Cannes en 2011). Malick s’inspire de l’histoire d’un objecteur de conscience autrichien pendant la Seconde Guerre mondiale, Franz Jägerstätter, afin de réfléchir à la complicité dans le crime contre l’humanité. L’esthétique de A Hidden Life est purement celle, unique, de Malick — la caméra qui tournoie et virevolte élégamment au plus près des personnages —, mais le scénario est sans doute son plus concret et tangible depuis The New World, en 2005.

Le maître américain fait de nouveau appel aux voix hors champ pour raconter cette histoire déchirante, par l’entremise cette fois d’une correspondance entre Franz Jägerstätter et sa femme, Fani. Ils ont la mi-trentaine et vivent avec leurs trois fillettes comme paysans, au pied des montagnes de l’Autriche, lorsque Franz est conscrit par l’armée du IIIReich. Cet homme profondément religieux est déjà décidé à ne pas combattre pour Hitler et son régime raciste. Il a en horreur le discours xénophobe qui l’entoure (et qui trouve une résonance aujourd’hui avec la montée du nationalisme d’extrême droite un peu partout dans le monde). Il se demande ce qu’il doit faire, en son âme et conscience, pour demeurer du bon côté de l’Histoire.

« Il vaut mieux souffrir de l’injustice que la commettre », dit son beau-père. Franz est un résistant, qui veut trouver refuge dans la religion. Il découvre une Église complice des atrocités du pouvoir politique. Conspué, isolé et renié dans son propre village, considéré comme un traître à la nation, Franz prend dans le récit de Malick une dimension christique, quasi mystique.

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A Hidden Life

C’est un homme d’une foi inébranlable, qui veut se montrer à la hauteur de ses convictions. Il refuse de jurer fidélité au Führer, quitte à payer très cher sa désobéissance civile pacifique. La beauté des plans de Malick est à couper le souffle. Il ne réalise pas des films, mais bien des atmosphères. En près de trois heures, il se complaît toutefois dans ses plans contemplatifs jusqu’à l’excès.

A Hidden Life est une œuvre aussi poétique que philosophique (le cinéaste est, après tout, diplômé en philosophie de Harvard). Et, comme la plupart de ses films, Malick y multiplie les questions existentielles et flirte par moments avec le nouvel âge. À quoi bon sert tout cela ? lui demandent des officiers nazis. Pourquoi cet entêtement, ce délit d’orgueil ? « Personne n’entendra jamais cette voix et cette parole », lui répète-t-on. Plus de 75 ans plus tard, Terrence Malick veut s’assurer que cette voix résonne toujours.

★★★★

A Hidden Life (V.F. Une vie cachée), un drame de Terrence Malick. Avec August Diehl, Valerie Pachner, Michael Nyqvist. 2 h 53.

> Consultez l’horaire du film : https://ouvoir.ca/2019/a-hidden-life