L'opération était risquée. Oui, les studios Disney ont déjà fait passer avec succès Cinderella de l'animation à la prise de vues réelle. Même chose pour la «méchante» sorcière de la Belle au bois dormant avec Maleficent. Les deux films, visuellement magnifiques (le second péchait toutefois sur le plan narratif), avait toutefois contourné l'écueil que pouvaient constituer les chansons... en les amputant carrément.

Sauf que ces «dessins animés», comme on disait dans le temps, dataient des années 50. Les pièces musicales aussi. Beauty and the Beast, lui, est sorti en 1991. Ses fans de la première heure et leurs enfants connaissent par coeur les Be Our Guest, Kill the Beast et autres Gaston. Ç'aurait été une erreur de passer outre. La transposition a ainsi été confiée à Bill Condon, qui a fait ses preuves avec Chicago et Dreamgirls.

Le résultat est très convaincant. Sans réelles fausses notes... mais avec quelques bémols. Le principal se trouvant là où on ne l'attendait pas: Emma Watson.

Entourée de ces pros de la scène et du spectacle musical que sont Josh Gad (LeFou) et Luke Evans (Gaston), l'interprète de Belle, loin d'être mauvaise, ne paraît quand même pas à son meilleur. Son filet de voix et son manque d'aisance dans les chorégraphies, en particulier dans Belle (qui ouvre le long métrage), sautent aux oreilles et aux yeux.

Il a aussi été pas mal question, dans la promotion du film, de l'accent mis sur le passé et l'arc dramatique des personnages. La prise de vues réelle exigeait en effet de creuser, de nuancer.

Si ce qui a été fait avec Gaston est formidable (au point où, dans les premiers temps du film, on prend presque pour lui - la performance de Luke Evans n'est pas étrangère à ce parti pris!), les évènements qui ont poussé Belle et son père (Kevin Kline) à quitter Paris (ça marche) pour se cacher à Villeneuve (ça marche moins) auraient pu être plus solides.

Enlevant et beau

Quant aux raisons qui ont fait que le prince devienne la Bête, elles ne pèchent pas par leur originalité - et puisent dans cette tendance «disneyienne» voulant qu'un méchant ne peut pas seulement être méchant: il faut une raison pour «justifier» son comportement.

Mais honnêtement, ce sont des bémols. Pas des couacs. Le film est enlevant et de toute beauté.

Dan Stevens tire fort bien son épingle du jeu dans la peau (virtuelle) de la Bête: l'amalgame de la «double capture de mouvements» (une pour le corps et une pour le visage) et des images de synthèse, le tout «entourant» son regard, fonctionne très bien. Et son interprétation de la (nouvelle) chanson Evermore est émouvante à souhait.

Quant aux objets qui «peuplent» le château ensorcelé, ils sont somptueux et interprétés de façon magistrale par la distribution vocale (Ewan McGregor pour Lumière, Emma Thompson pour Mrs Potts, Ian McKellen pour Cogsworth, Gugu Mbatha-Raw pour Plumette, etc.). Difficile de ne pas avoir la tentation d'applaudir après leur numéro de production qu'est Be Our Guest de même qu'à la trouvaille scénaristique qui accompagne leur retour à l'apparence humaine.

Dans un registre plus terre-à-terre (puisque porté par les «humains»), impossible de ne pas rire à Gaston ou de ne pas frissonner pendant Kill the Beast, que la présence d'acteurs rend beaucoup plus sombre que dans le film d'animation. Et LeFou, «devenu» gai? C'est parfaitement intégré au récit et même très drôle dans sa pirouette finale.

Bref, une production belle et vraiment pas bête que ce Beauty and the Beast.

* * * 1/2

Beauty and the Beast (V.F.: La Belle et la Bête). Film d'animation de Bill Condon. Avec Emma Watson, Dan Stevens, Luke Evans, Josh Gad. 2h09.

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Image fournie par Disney

Beauty and the Beast