Des guerriers surgissent des sables, comme des samouraïs de Kurosawa, au milieu d’une tempête, dans un désert hostile. Nous sommes en 10 191, sur la planète Arrakis, aussi connue sous le nom de Dune.

Les premières minutes du nouveau long métrage de Denis Villeneuve, Dune : Part 1, en mettent plein la vue et les oreilles. Combats sanglants, ambiance sonore inquiétante, dans un majestueux décor futuriste, aride et menaçant.

Le personnage de Chani, interprété par Zendaya, parle des sévices et des exactions subis par son peuple, les Fremen. Tribu du désert, à la fois crainte et méprisée, qui s’est adaptée à son sort et aux conditions inhumaines. Elle est la narratrice, comme le capitaine Willard d’Apocalypse Now.

Bande-annonce de Dune dévoilée en septembre dernier

Le récit se déplace ensuite dans la Maison des Atréides, sur la planète Caladan, où l’on rencontre Paul (Timothée Chalamet) qui, prescient, rêve de Chani sans l’avoir rencontrée. Son père, le duc Leto Atréides (Oscar Isaac), sera bientôt chargé de prendre sous son protectorat Arrakis, planète de tous les dangers et d’une drogue que tous les mondes s’arrachent pour ses vertus surhumaines : l’Épice.

L’intrigue est mise en place. Les dix premières minutes de Dune sont saisissantes et spectaculaires, d’une beauté formelle exceptionnelle. Comme du reste une autre scène – l’une des préférées de Denis Villeneuve – présentée en primeur lundi à la presse. Dans un ornithoptère, vaisseau en forme de libellule, Leto et son équipage procèdent à une opération de sauvetage hasardeuse dans le désert ocreux d’Arrakis, afin de secourir les ouvriers d’une moissonneuse à Épice menacée par un ver de sable géant.

J’ai dû promettre à trois reprises, sur la tête de mes enfants, signé de mon sang, un rein en gage (j’exagère à peine), de ne rien divulguer des nouvelles images dévoilées de Dune avant le mercredi 21 juillet 2021 à 14 h, heure de l’Est. C’est-à-dire à la veille de la diffusion, dans des cinémas IMAX, de la plus récente bande-annonce de cette nouvelle adaptation très attendue – c’est un euphémisme – de la bible de la science-fiction de Frank Herbert, écrite en 1965. De sa première moitié, du moins, le « part 1 » du titre annonçant une deuxième partie.

D’énormes attentes accompagnent ce film, exacerbées par une année complète de sorties reportées par la pandémie et auxquelles contribue largement la campagne de promotion au compte-gouttes des studios Warner. On y traite l’œuvre de Denis Villeneuve, prévue en salle le 22 octobre en Amérique du Nord, comme un secret d’État. Alors que paradoxalement, la nouvelle bande-annonce en dévoile beaucoup sur l’intrigue…

Voici ce qui n’est plus un secret : les images de Dune sont à couper le souffle. Elles sont d’ailleurs à voir absolument en format IMAX, pour lequel ce film extrêmement ambitieux, doté d’un budget de 165 millions US, a été conçu. S’il y a une œuvre qu’il serait quasi criminel de voir sur son ordinateur, sa tablette ou son téléphone cellulaire, c’est bien celle-là !

L’esthétique du film de Villeneuve, élégante et splendide, est à mille lieues de celle – plus près de la télésérie Star Trek – du long métrage de 1984 de David Lynch (le seul de ses films qu’il ait désavoué). Lynch, en effet, avait donné des munitions à ceux qui estiment que ce récit complexe est inadaptable au cinéma. Avant lui, l’iconoclaste Alejandro Jodorowsky n’avait pas réussi à fixer sur pellicule l’univers fantasmagorique qu’il avait imaginé au début des années 1970 autour de l’œuvre culte de Frank Herbert (voir à ce sujet le fascinant documentaire Jodorowsky’s Dune).

On reconnaît dans ce nouveau Dune la signature visuelle du cinéaste québécois : des vaisseaux spatiaux qui rappellent Arrival, des prises de vues aériennes qui évoquent Sicario, des images futuristes de paysages grandioses à l’instar de ceux de Blade Runner 2049. La nature a toujours été très présente dans le cinéma de Denis Villeneuve. Du désert de sel d’Un 32 août sur terre au désert de sable d’Incendies, voire dans la vue du ciel des eaux glacées de Polytechnique.

« C’est un rêve qui se réalise », a dit Denis Villeneuve, admirateur depuis l’adolescence du roman de Herbert, dans une courte vidéo de présentation. « Un rêve que je chéris depuis très longtemps. » Et ses principaux acteurs d’y aller de leurs propres épithètes à propos du film : « profond », dixit Javier Bardem, « réfléchi », selon Oscar Isaac. « C’est une œuvre qu’il porte près du cœur », a dit à son tour Timothée Chalamet, « ravi et honoré » de présenter Villeneuve.

Comme Dune se déroule dans un avenir lointain, le célèbre compositeur Hans Zimmer, qui avait déjà collaboré avec le Québécois à Blade Runner 2049, a senti le besoin de créer des instruments de toutes pièces, en s’inspirant avant tout de la voix humaine. « Nous avons une esthétique semblable », a dit Zimmer de Villeneuve, qui lui parlait à partir de Montréal, par écrans interposés.

Denis Villeneuve a de nouveau fait appel à des collaborateurs de longue date pour ce projet auquel il a consacré trois ans de travail acharné : le monteur Joe Walker et le directeur artistique québécois Patrice Vermette. Le directeur photo Roger Deakins a quant à lui cédé la caméra à Greig Fraser. La conjointe de Villeneuve, l’ex-journaliste de Radio-Canada et documentariste Tanya Lapointe, est l’une des productrices du film.

Coscénarisé par Villeneuve, Eric Roth (Forrest Gump, Munich, The Insider) et Jon Spaihts (Prometheus, Doctor Strange), Dune sera présenté en première mondiale le 3 septembre à la Mostra de Venise, qui avait aussi accueilli Incendies et Arrival en primeur. Le film met en vedette une brochette impressionnante d’acteurs, dont Rebecca Ferguson, Stellan Skarsgard, Dave Bautista, Jason Momoa, Josh Brolin et Charlotte Rampling.

Comme on dit : ça promet.