Un adolescent va voir son pédiatre pour sa visite annuelle. Il vient d'avoir 17 ans. Le médecin lui demande s'il suit des cours de conduite. Justement, le jeune patient vient de réussir son examen théorique. Le pédiatre lui explique que conduire le soir avec des amis est particulièrement risqué parce qu'à son âge, il est facile de se laisser emballer par l'excitation du groupe et de conduire plus vite que nécessaire.

«De quoi je me mêle?» pourrait-on penser (particulièrement quand on est adolescent). Donner des conseils sur la conduite automobile fait-il vraiment partie des devoirs d'un pédiatre?

 

Oui, répond l'Association des pédiatres américains (AAP). Depuis 2003, l'AAP recommande à ses membres de discuter de conduite automobile avec leurs patients adolescents et leurs parents. Entre autres, les parents devraient être invités à imposer des restrictions sur la conduite de leurs enfants, notamment la nuit et pour les sorties avec les amis.

 

«Nous discutons avec nos patients de troubles alimentaires, d'alcool et de drogue», explique en entrevue le président du comité de l'AAP sur les blessures, Jeffrey Weiss, de l'Hôpital pour enfants de Phoenix. «Alors pourquoi pas de conduite automobile? Après tout, il y a beaucoup plus d'adolescents qui meurent au volant que dans les bars.»

 

Les lignes directrices de l'AAP sur la conduite automobile ont été révisées en 2006 pour tenir compte des dernières découvertes sur la neurologie du cerveau adolescent. «On sait notamment que la zone du cerveau responsable de l'empathie est encore en formation jusqu'au milieu de la vingtaine, dit le Dr Weiss. Les adolescents ont de la difficulté à ne pas se laisser contaminer par les émotions de leurs pairs. Alors, dans une voiture, si tout le monde est excité, le conducteur adolescent devient lui aussi excité et prend plus de risques. La zone de l'empathie prend le dessus sur la zone responsable du bon jugement. Ça peut même amener les filles à se comporter comme un conducteur mâle, donc à prendre plus de risques.»

 

À la Société canadienne de pédiatrie, aucune recommandation de ce genre n'est en vigueur.

 

La politique de l'AAP a été mise en place après la publication d'enquêtes révélant que les pédiatres n'abordaient pas la question de la conduite automobile. «Il y a des améliorations, dit le Dr Weiss. Près de 90% des pédiatres parlent à leurs patients des dangers de la conduite en état d'ébriété. Mais seulement la moitié discutent des restrictions à la conduite des adolescents qui permettent de diminuer les risques. Et à peine un pédiatre sur 10 explique les contrats de conduite conclus entre les parents et les enfants, qui sont pourtant l'un des moyens les plus efficaces de responsabiliser les jeunes conducteurs.»

 

Les pédiatres et le volant

 

Selon l'Association américaine de pédiatrie, les pédiatres devraient:

 

> Expliquer à leurs patients adolescents les risques de la conduite automobile;

> Poser des questions sur le type de conduite du patient;

> Poser au patient des questions sur l'alcool et le cellulaire au volant, sur les médicaments qu'il prend, sur la conduite de nuit et sur le port de la ceinture;

> Encourager les parents à restreindre la conduite automobile de leurs enfants, par exemple en insistant pour qu'un adulte soit présent dans le véhicule;

> Demander aux parents de signer un contrat écrit avec leurs enfants qui stipule les règles à suivre pour la conduite automobile et les punitions si ces règles sont enfreintes;

> Rappeler au patient et à ses parents les lois s'appliquant aux jeunes conducteurs.

 

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Les pédiatres devraient-ils discuter de conduite automobile avec leurs patients adolescents et leurs parents ?