L’auteur de Mambo Italiano pose à nouveau son regard sur la réalité d’homosexuels italo-canadiens avec la création d’At the Beginning of Time. Cette fois, sous le signe de la vieillesse et de la maturité. Un pari à moitié relevé.

Le couple, la sexualité, le deuil, la maladie, l’homophobie, le coming-out, les réseaux sociaux, les wokes, le sida, le PrEP… Le moins que l’on puisse dire, c’est que Steve Galluccio n’était pas en panne de sujets en écrivant At the Beginning of Time. Résultat ? Sa nouvelle pièce en un acte, créée au Centaur vendredi dernier, emprunte trop de pistes sans en explorer une bonne.

Hospitalisé pour soigner un virus attrapé dans un tout-inclus dans le Sud, Michael reçoit dans sa chambre d’hôpital deux vieux amis qui tentent de lui remonter le moral. Le trio de sexagénaires s’est connu à l’école secondaire Saint Pius Tenth, à Ahuntsic, au tournant des années 70-80. Les trois amis d’origine italienne repensent à cette époque avec nostalgie. Depuis, ils ont accepté et vécu leur homosexualité chacun à leur manière. Malgré les préjugés. Ils discutent de la réalité de vieillir comme hommes gais, de leurs amours qui ont mal aux dents…

Un cœur brisé

Comment vivre le deuil de sa jeunesse dans un monde en constante évolution ? Telle est la question au cœur de la pièce de Galluccio. À la base, At the Beginning of Time puise dans un drame intime vécu par l’auteur de 62 ans : il a perdu son conjoint, mort de la maladie d’Alzheimer peu avant la pandémie. Et dans son désir de recoller son cœur brisé. Or sa pièce parle peu de cet amour-là, sauf à la fin. Et encore moins de deuil.

Le texte comico-dramatique se tisse autour de la conversation de ces trois « drama queens » qui s’éternise durant 95 minutes. Sans véritable arc dramatique. Le récit est centré sur les angoisses existentielles de Michael, l’alter ego du dramaturge et scénariste. Celui-ci est incarné avec justesse par Richard Jutras, alité pendant toute la durée de la représentation. Ses deux visiteurs interagissent avec lui en gardant toujours leur manteau, comme s’il devait partir d’une minute à l’autre, alors que l’infirmière apparaît brièvement dans la chambre. Et jamais avec le même uniforme sur le dos ! Est-ce parce qu’on change de jour ? Ce n’est pas clair dans la proposition de Peter Hinton-Davis et dans sa mise en scène sans audace ni rythme.

PHOTO ANDRÉE LANTHIER, FOURNIE PAR LE CENTAUR

Nadia Verrucci

La magnifique peinture scénique du décor de Michael Gianfrancesco, une représentation classique du paradis avec des anges au ciel, laissait pourtant présager que la production s’éloignerait du réalisme. La musique disco de Donna Summer succédant brusquement au Stabat Mater, durant la scène d’ouverture, nous promettait aussi un rendez-vous émouvant. Hélas, on reste sur son appétit.

At the Beginning of Time

At the Beginning of Time

Texte de Steve Galluccio. Mise en scène de Peter Hinton-Davis. Avec Richard Jutras, Stephen Lawson, Michael Miranda et Nadia Verrucci.

Au Théâtre Centaur, Jusqu’au 12 mars.

6/10

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