Pièce poétique aux nombreux éclats d'humour, Le chant de la mer commence de manière plutôt dramatique: une mère et sa fille sont séparées, et la petite Laura s'époumone en appelant sa maman. Mais le ton de la pièce écrite et mise en scène par Jean-Philippe Joubert, de la troupe Nuages en pantalon, prend rapidement un tournant plus ludique pour ce voyage au pays des souvenirs que s'apprête à faire Laura en compagnie d'un capitaine qui, lui, cherche la mer disparue. Pour retrouver l'une, il faudra retrouver l'autre.

Laura sait dessiner ses souvenirs - immenses traits de lumière «lancés» sur un tableau noir, belle idée toute simple -, mais il manque une goutte d'eau salée pour leur donner vie. Pendant ce temps, sa mère (Valérie Laroche) chante une chanson mélancolique en appelant sa fille, mais n'arrive plus à pleurer. Elle tente par tous les moyens de verser une larme, en se pinçant ou en s'arrosant (elle chante alors avec un masque de plongée, le nez bouché!).

Décousu

Porté par la voix juste et ronde de Valérie Laroche, pleine d'espoir et de tristesse, Le chant de la mer ressemble malheureusement parfois à une succession de tableaux et manque un peu de liant. Laura (Laurie-Eve Gagnon) et le capitaine (Olivier Normand), après avoir commencé ensemble leur recherche, partent chacun de leur côté sans qu'on sache vraiment pourquoi. Et pendant que la petite fille se débat avec ses cauchemars, le capitaine rêve d'une femme-poisson, élément purement onirique de la pièce interprété par la danseuse Sonia Montminy.

Au coeur de l'histoire, cette rencontre entre ces deux personnages opposés - la femme-poisson, évanescente et poétique, et le capitaine, clownesque- est dynamique. Entièrement sans paroles, cette introduction de la danse dans le théâtre est intéressante. Dans cette séquence où les personnages s'aspergent d'eau et se mettent la tête ou les pieds dans des seaux, la salle croule de rire: rien ne réjouit plus les enfants qu'une chaudière d'eau balancée au visage de quelqu'un, et les deux interprètes s'en donnent à coeur joie.

Mais entre le pur slapstick et les retrouvailles émouvantes, il reste une impression de décousu. Cette succession de ruptures de ton finit par être difficile à suivre, et les enfants ne savent plus sur quel pied danser. Drôle, pas drôle? Surtout vers la fin, lorsque la mère réussit enfin à pleurer, ou lorsque Laura réapparaît enfin - pourquoi? -, et s'habille d'un imper comme pour aller à la guerre, armée d'un tuyau d'arrosage.

C'est vrai, les tout-petits n'ont pas besoin qu'on les prenne toujours par la main. Mais une direction plus assumée leur permettrait d'avoir une meilleure compréhension de ce spectacle rempli de belles idées et de moments très forts, et donnerait sûrement au Chant de la mer une plus grande portée.

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Le chant de la mer est présenté à la Maison Théâtre jusqu'au 27 mai. Pour les 5 à 8 ans.