Créée à Toronto en 2009, Attends-moi nous place littéralement dans une chambre d'hôpital, auprès d'une femme plongée dans un coma, au seuil de la mort. Le récit de Kristen Thomson, traduit par Olivier Choinière, s'intéresse à l'entourage de cette femme, qui s'anime autour d'elle, symbole fort de la vie qui se poursuit, malgré la solitude.

L'Éternel(le) pigiste Marie Charlebois travaille sur ce projet depuis plus d'un an. C'est le directeur artistique de La Licorne, Denis Bernard, qui après avoir vu la pièce, lui a proposé d'en faire la mise en scène.

Emballée par le texte, elle a participé à chacune des étapes de la production. «Il y a une musicalité dans la version originale anglaise, qu'on ne voulait pas perdre, confie-t-elle. J'ai trouvé fascinant le travail de suivi avec Olivier pour justement trouver le bon rythme.»

Ce drame, qui porte bien sûr sur la perte de la mère, explore un angle original. Blanche Walker, plongée dans le coma, ne se trouve pas sur scène, mais parmi les spectateurs. De sorte que les personnages, en s'adressant à elle, s'adressent directement à nous. Le fils, la fille, une infirmière et une patiente seront interprétés par Normand Daneau, Marie-France Lambert, Valérie Blais et Rachel Graton.

«C'est la vision de la mère qui est mise de l'avant, précise Marie Charlebois. Elle est dans un coma, mais elle entend tout ce qui se dit autour d'elle. C'est dans ce contexte que son fils Charles commence à lui parler, à se confier à elle. Comme spectateur, nous sommes confrontés à ce qu'elle entend, ce qu'elle ressent.»

«Charles est un garçon seul, complexé, poursuit-elle. On sent l'emprise que sa mère a eue sur lui. Ce n'est pas quelqu'un qui est habitué à prendre la parole. Là, il est obligé de parler de lui, et on voit le regard que sa mère lui renvoie. On le voit à ses réactions, à son drame. On passe par lui pour comprendre la mère.»

Vulnérabilité

Marie Charlebois ne voulait pas camper l'action dans une chambre d'hôpital réaliste. Avec la scénographe Danièle Lévesque, elle a créé un environnement imaginaire, qui fait ressortir la grande vulnérabilité des personnages. «Le texte me permettait de théâtraliser la chambre, de la magnifier. Dès la première scène, lorsque le fils parle à sa mère, on comprend tout de suite qu'elle est dans la salle. Ça crée une intimité. Le texte est très touchant, très humain.»

La structure de la pièce fait en sorte qu'on peut s'interroger sur ce qui se passe vraiment dans la réalité, et ce qu'imagine la mère dans son coma. Par exemple, la soeur de Charles est une construction de l'esprit de Blanche, qui a perdu cet enfant-là à la naissance, détaille-t-elle. «On assiste même à des scènes entre le frère et la soeur! La maman s'imagine aussi que son fils s'amourache de l'infirmière. Mais à mesure que progresse la pièce, le texte nous dit la vérité.»

Bref, c'est un peu le film de sa vie qui défile devant la maman, avant de rendre l'âme. «Le plus grand défi d'Attends-moi était la direction d'acteurs, dit Marie Charlebois. Parce que je veux qu'on y croit à ces personnages. J'avais un souci de vérité. Mais à la fin, on se retrouve seul face à la mort de l'autre. Le personnage de Charles est seul. Lorsque sa mère meurt, il n'y a plus personne autour de lui.»

Attends-moi, présentée par le Théâtre de la Manufacture à l'Espace GO, du 3 au 28 mai.