L’arrivée
Mardi matin, sous un léger crachin à Philadelphie. Ça n’empêche pas une vingtaine de membres de l’orchestre de partir de l’hôtel à pied vers 10 h, direction les célèbres « marches de Rocky », devant le Museum of Art de Philadelphie. Certains y vont à la course, la plupart en marchant, mais tous vont les gravir deux par deux jusqu’en haut. Pour rendre hommage au film, bien sûr, mais il y a aussi une symbolique de victoire derrière ce geste.
L’Orchestre Métropolitain (OM) est sur la route depuis samedi matin déjà. Trois bus ont quitté Montréal en direction de Worcester, près de Boston, où les musiciens ont joué en après-midi dimanche. En tout, un peu plus de 73 instrumentistes ont fait le voyage, plus quelques membres de l’administration et de l’équipe technique. Et un immense camion-remorque, qui transporte leurs précieux instruments.
Lundi était une journée libre, d’autant qu’ils sont arrivés tard en soirée dimanche, après leur concert d’après-midi au Mechanic Hall de Worcester. Ils en ont donc profité pour visiter la ville, mais les choses reprennent pour vrai ce mardi : il y aura une « acoustique » en fin d’après-midi, puis un concert le soir, au Verizon Hall.
L’orchestre fondé en 1981 en est à sa troisième tournée à vie : la première a eu lieu en 2017 en Europe, et la deuxième, en 2019, l’avait mené également à Philadelphie et à New York. « Être réinvité aux deux endroits, ça fait plaisir, et ça met encore plus en confiance, confie le chef Yannick Nézet-Séguin. C’est comme ça que je le sens cette fois. Le résultat, c’est qu’on joue encore mieux. »
L’hôtel
En marchant dans les couloirs de l’hôtel pendant la journée, on entend derrière les portes closes les sons des instruments qui s’échappent... Plusieurs musiciens profitent de leur temps libre pour s’exercer. Nous avons cogné pour discuter avec quelques-uns d’entre eux.
La répétition
À 17 h, c’est l’heure de l’acoustique au Verizon Hall. C’est moins une répétition que l’occasion pour l’orchestre d’apprivoiser cette immense salle moderne, qui a été conçue par les mêmes acousticiens que la Maison symphonique à Montréal. Le PDG de l’Orchestre de Philadelphie, Matías Tarnopolsky, les accueille. « Nous sommes vraiment heureux de vous avoir ici, nous gardons d’excellents souvenirs de votre passage en 2019. » Mais, comme tout le monde l’a mentionné pendant la journée, cette fois-ci est particulièrement émouvante puisque dans un mois environ, c’est l’Orchestre de Philadelphie qui viendra se produire à Montréal.
Yannick Nézet-Séguin, qui est allé diriger un opéra à New York entre ses deux concerts avec l’OM, est arrivé à Philadelphie en après-midi. On commence la répétition avec la Symphonie no 2 de Sibelius pour tester l’acoustique. Rapidement, il encourage l’orchestre à jouer de manière plus ouverte, un peu plus gros. À « jouer avec la salle ». « Je savais avant de commencer que ça ferait ça », leur dit-il. Les musiciens, bien entendu, répondent à ses commandes au quart de tour.
« C’est ça, la tournée, il faut s’adapter à une nouvelle salle chaque fois », nous confie le chef tout de suite après, en entrevue dans son bureau. Mais il a confiance, justement, en la capacité d’adaptation de son orchestre. « L’OM a dans son ADN de tourner dans l’île de Montréal, dans un sous-sol d’église, dans un auditorium, sans répétition avant. C’est ça que je leur avais dit avant la première tournée : vous êtes habitués. En fait, ils s’adaptent plus facilement que beaucoup d’autres orchestres que je dirige. »
Pendant toute la répétition, la collaboratrice artistique de l’OM Naomi Woo se promène un peu partout dans la salle et vient donner ses commentaires à Yannick Nézet-Séguin, qui est toujours à l’écoute. Tout se passe dans la concentration, l’ouverture et la bonne humeur – le chef est même prêt à s’attribuer la faute, parfois, pour une mauvaise indication... mais pas trop souvent !
Les deux solistes viennent ensuite chacun leur tour faire leurs tests. Une heure plus tard, tout est terminé. Les musiciens ont tout juste le temps de manger, puisque le concert commence à 19 h 30.
Le concert
L’après-concert
Tout de suite après le concert, une petite réception est organisée. On sent les musiciens de l’Orchestre Métropolitain fatigués, contents, mais avec des réserves, comme s’ils gardaient leur enthousiasme pour le lendemain à Carnegie Hall, une des salles les plus mythiques du monde.
En attendant, c’est soir de fête, puisqu’on souligne l’anniversaire de Yannick Nézet-Séguin, qui va célébrer, eh oui, ses 49 ans le lendemain. Un gâteau a été préparé par l’équipe de Philadelphie. D’ailleurs, plusieurs des musiciens de l’ensemble américain sont présents. On lui chante donc Happy Birthday et Mon cher Yannick, c’est à ton tour... et le fêté rayonne.
« Vous pouvez être fière de vos compatriotes », nous glisse en passant le PDG de l’Orchestre de Philadelphie, Matías Tarnopolsky, qui déclare à l’assistance que le concert a été « beau et remuant ». L’organisation a réservé une belle surprise aux membres de l’OM : des bobbleheads à l’effigie de Yannick Nézet-Séguin.
« Merci, Yannick, de réunir ces deux familles », ajoute la PDG de l’Orchestre Métropolitain, Fabienne Voisin. « Cette aventure, c’est un rêve depuis le début. »
Yannick Nézet-Séguin ne peut être plus heureux en voyant ses deux familles réunies. « Je suis tombé amoureux de l’OM il y a 25 ans, la même chose ici il y a 15 ans. C’est spécial de tous être là. Ça parle de la musique qui unifie les gens, et ça me rend heureux, fier et plein d’espoir dans l’avenir. À ma famille de l’OM, bravissimo. C’est incroyable, ce que vous transmettez. C’est le cœur de la musique. »
Peu de temps après, tout le monde se disperse pour aller se coucher. Demain matin, c’est le départ pour New York, avec le concert à Carnegie Hall en soirée. La journée est importante.