Aussi drôle qu’attachante, Michelle Desrochers propose un premier spectacle solo, Pelote, où elle ne craint pas de jouer avec de l’autodérision, sans toutefois que tout tourne autour d’elle.

Les premiers spectacles d’humour, comme toutes les premières œuvres en fait, sont souvent l’occasion pour les artistes de se présenter, de parler de leur vie jusqu’à maintenant, de donner la chance au public de les rencontrer. On échappe rarement à la forte tendance biographique. Michelle Desrochers, elle, nous montre qui elle est, mais d’une autre façon. Elle nous dévoile surtout sa personnalité très attachante en parlant de tout et de rien. Elle se raconte, nous présente des anecdotes de sa vie, mais elle offre aussi des observations sur des faits du quotidien (avec une petite tendance à s’acharner sur le métier des autres) et c’est à travers sa vision du monde qu’on la découvre aussi.

Lors de la première montréalaise du spectacle, quand elle arrive sur la scène du Gesù – où elle sera de retour le 9 décembre –, après une solide performance de Jessica Chartrand en ouverture, Michelle Desrochers débute avec aplomb. Un long premier numéro est consacré à son « boutte », soit le bas de son ventre, dont elle parle avec des termes tendres, mais aussi très amusants.

L’acceptation corporelle fera partie du spectacle, dès le début, dans quelques commentaires tout au long, puis à la toute fin.

Mais l’humoriste ne cherche pas à être trop directe, à nous donner l’impression qu’elle fait un plaidoyer. C’est par le rire, parfois dans l’autodérision, qu’elle nous montrera ce qu’elle pense.

Après quelques minutes à l’écouter, nous sommes franchement captivés. Sa prestation est impeccable et nous happe. Si son monologue n’est pas une longue narration linéaire, elle excelle dans les transitions, si bien qu’on ne décroche jamais. Ses expressions faciales, sa gestuelle et même ses silences apportent également un effet comique.

Bref, la technique est bonne. Surtout, le contenu est plus que bon. Les moments cocasses de sa vie nous font tous nous esclaffer quand c’est elle qui les raconte. La fois où ses cuisses frottaient l’une contre l’autre au village d’antan, le divorce trop long de ses parents, les funérailles de son grand-père, ses escapades au gym, ses mésaventures (mimées) avec la divacup : l’humoriste parvient à provoquer des rires chaque fois, même avec ce qui, sur papier, ne semble pas nécessairement très amusant.

PHOTO ERIC MYRE, FOURNIE PAR LA PRODUCTION

Les expressions faciales, la gestuelle et même les silences de Michelle Desrochers apportent un effet comique.

La mise en scène, signée LeLouis Courchesne (qui est aussi auteur), est aussi simple qu’efficace. Sous un néon rose et bleu en forme de pelote de laine, Michelle Desrochers n’est accompagnée que d’un classique tabouret sur scène (dont elle se sert quelques fois pour ses gags). La conception d’éclairage de Lisandre Coulombe joue un énorme rôle dans l’impact du spectacle. Subtil, mais habilement réfléchi, le jeu de lumière permet de pertinents changements d’ambiance tout au long de la narration de l’humoriste.

Michelle Desrochers s’amuse à ses propres dépens, mais aussi aux dépens des autres. Elle divague en milieu de spectacle vers un très amusant scepticisme, qui s’attaque principalement d’abord au métier d’arpenteur-géomètre, une profession qui « n’existe pas », selon elle. Le numéro qui s’ensuit est excellent, l’un de meilleurs du spectacle. Et parce qu’elle est lancée sur les métiers, elle s’attaque ensuite aux optométristes et les imite, dans un autre moment marquant de son monologue. Ce sont finalement les courtiers immobiliers, qui lui font peur, qui y passent.

Comme nous le disions, c’est en parlant de tout et de rien, en ne s’accrochant pas à une thématique principale, que Michelle Desrochers parvient à nous garder toujours intéressés et, au minimum, le sourire aux lèvres.

Sans être irrévérencieuse, elle n’est pas non plus toute sage. Elle demande à ses spectateurs lesquels d’entre eux ont un emploi de 9 à 5 et remarque la « petite clap de suicide » lorsque les gens concernés répondent par applaudissement. Elle soulève le fait qu’elle a étudié en littérature, raison pour laquelle elle glisse un petit « cependant » entre « deux jokes de graines ». Elle se permet de noter qu’elle trouve étrange qu’on donne « les plus beaux chiens aux non-voyants ». « Il faudrait leur donner les laids », plaide-t-elle, frustrée de ne pas avoir le droit de caresser les chiens aidants.

Constante et agréable à écouter, très drôle et parfois même hilarante, Michelle Desrochers a tout bon avec ce premier spectacle.

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Pelote

Pelote

Michelle Desrochers

En tournée partout au Québec

7/10