À quoi devait-on s’attendre du one woman show comique de Marthe Laverdière ? À du Marthe Laverdière pur jus, bien sûr, la nouvelle idole n’ayant que faire d’essayer de « se réinventer » à 60 ans, bien mariée à son inséparable « minou » et adorée d’un public qui l’attend déjà à guichets fermés partout au Québec dans la prochaine année.

On anticipait donc franc-parler et blagues en bas de la ceinture dans la candeur propre à Marthe Laverdière : gags de « touffe », d’organe masculin et gloussements spontanés on a effectivement eus, le charmant sourire de la dame à la casquette rose ne quittant jamais ses lèvres.

D’emblée quelque peu humoriste dans ses capsules de jardinage et ses désormais innombrables apparitions télé (les réseaux se l’arrachent, de Bonsoir bonsoir à Sucré salé), la colorée horticultrice vedette ajoute officiellement le métier à son déjà interminable curriculum vitae avec un premier spectacle, Marthe Laverdière fait son show !, qu’elle déballait en première montréalaise au Gesù, mardi soir.

Un dépaquetage sans gants blancs, sans finesse ni dentelle, mais rempli de cœur et de sincérité. Et salué de beaucoup, beaucoup de rires, lesquels célèbrent l’irrésistible authenticité d’une Marthe Laverdière mal engueulée, mais tellement généreuse. L’humour grivois peut déranger, on dirait que, dans la bouche de Marthe Laverdière, il devient presque folklorique. L’attachement collectif à son endroit se chiffre d’ailleurs déjà à 40 000 billets vendus pour cette tournée d’humour à peine entamée.

Notre Marthe achève donc de cristalliser son personnage public dans cette mise en scène de Mario Jean, portée par un décor fleuri et ensoleillé de jolis dessins mouvants et se transformant au gré des tableaux.

Série d’anecdotes

La bonhomie de Marthe Laverdière installe systématiquement une ambiance intimiste avec son public, à grands coups de « M’as t’en conter une… » et « Faut j’te conte ça ! », dont elle parsème ses récits. Des histoires amenées dans la langue de Bellechasse, dans un français joyeusement massacré, qui témoigne à lui seul de sa vie très loin du Plateau Mont-Royal. Et judicieusement servies par son expressivité, ses mimiques grandiloquentes, son talent de comédienne et son verbe truculent.

De l’anecdote, Marthe Laverdière en a une pleine brouette à raconter. Les seules descriptions qu’elle trace des divers collègues, clients et autres passants rencontrés dans sa vie valent à elles seules l’écoute. C’est sur ses tranches de vie – toutes vraies, précise-t-on d’entrée de jeu – que se fonde Marthe Laverdière fait son show ! Tout du long, Marthe relate, imite ses interlocuteurs, incarne les situations, au grand plaisir de sa foule.

Entre autres perles, cet échantillon d’une ancienne job de « lichage d’enveloppes » dans une entreprise œuvrant dans « le souvenir ». « Souvenir », comme dans « on fait se souvenir aux gens qu’ils nous doivent de l’argent », façon courtoise et polie. Marthe en a été quitte pour une langue engourdie de colle. La « graine » de « minou » s’en souvient apparemment encore.

Ou cet autre épisode, remémoré avec tuque à cordons et manteau d’hiver au dos, où, les hémorroïdes accrochées aux amygdales (voyez l’image ?), dans un froid à faire « froster le liquide amniotique », Marthe a compris qu’elle devait devenir horticultrice, un métier aisé à pratiquer même en brassière aux broches jaillissantes.

De Ti-Gilles le client macho à la chevelure trois couleurs, teinte maison, qui se « remonte les schnolles » en parlant, à Raynald et son difficile passage sur la table de massothérapeute de Marthe, en passant par la première rencontre, à 15 ans, avec « minou » et son col roulé bleu poudre et ses pantalons « brun marde », vous aurez compris qu’on ne se torture pas la méandre humaine, avec Marthe Laverdière. On glousse gras et, surtout, sans complexes.

On déplorera néanmoins les brusques ruptures de ton qui insèrent et concluent le court segment sur sa petite-fille lourdement handicapée, Jeanne, trop bref pour être réellement touchant, coincé entre deux vignettes burlesques. On aurait pris davantage de ce moment de vive émotion, livré par une Marthe Laverdière au timbre tremblotant.

Dans son énervement – elle s’autodiagnostique après tout « hyperactive non médicamentée » –, Marthe Laverdière s’emballe aussi parfois à un point tel que ses intonations aiguës ou son débit trop rapide nous en font perdre des bouts. Des détails qu’il lui sera facile de tempérer au fil des représentations de Marthe Laverdière fait son show !

Sans trop toucher au reste, parce qu’il serait difficile de la rendre plus attachante et divertissante, cette Marthe Laverdière, qui démontre bien plus que de la « graine » d’humoriste…

Consultez le site de Marthe Laverdière