Pauvre Kim Cattrall. Dans la nouvelle comédie queer Glamorous de Netflix, l’actrice de 66 ans dégage l’énergie d’une pile 9V d’un détecteur de fumée qui n’a pas été changée depuis au moins 14 ans.

Cachée derrière d’immenses lunettes œil de chat, Kim Cattrall incarne une ex-mannequin star qui dirige maintenant une entreprise de cosmétiques de luxe. Là vous pensez sûrement : girlboss féroce, attitude fabuleuse, snap, snap, snap, Miranda Priestly dans Le diable s’habille en Prada.

Pas du tout. Ce personnage fade, qui s’appelle Madolyn avec un O, eh oui, manque de tout. De oumpf, de paillettes, de répliques croustillantes, de poigne, de gaz et de vitalité, donnez-lui son boost d’Adrien Gagnon, c’est urgent.

Kim Cattrall ne se force même pas pour camoufler son ennui en débitant ses répliques plates sur un ton terne. On est à des années-lumière de la fougueuse Samantha Jones de Sex and the City, le rôle de femme libérée qu’elle a laissé tomber (ce ne fut pas si facile).

En fait, Glamorous souffre de la pauvreté générale de son scénario dilué et rempli de clichés. Et c’est vraiment dommage. Car cette série – à mi-chemin entre Ugly Betty et The Bold Type – braque ses projecteurs sur un arc-en-ciel de personnages issus de la communauté LGBTQ+ et toute forme de visibilité compte en cette période où l’apparition d’une simple drag queen à la télé déclenche une parade de coucous sur Twitter.

Mais bon, Glamorous, ce n’est pas très bon, il faut le dire, malgré un paquet de bonnes intentions derrière sa création. Outre notre Madolyn engourdie par le clonazépam, l’autre personnage pivot de la série s’appelle Marco, il a 22 ans et il est campé par l’actrice Miss Benny (Love, Victor), qui a amorcé sa transition pendant le tournage des 10 épisodes de Glamorous, offerts en anglais et en français.

PHOTO FOURNIE PAR NETFLIX

Marco (Miss Benny) et Madolyn (Kim Cattrall) dans une scène de Glamorous

Marco, qui rêve de devenir un influenceur beauté avec ses 327 abonnés, vend des rouges à lèvres et du fond de teint dans un grand magasin du New Jersey. Accrochez-vous bien ici pour ce revirement décoiffant. Dans un effort pour connecter avec sa clientèle, une sorte d’enquête de terrain, Madolyn visite le comptoir à cosmétiques du flamboyant Marco (quel hasard !) et, le temps de se demander si c’est peut-être Maybelline, paf, Madolyn embauche Marco comme deuxième assistant à son chic quartier général de Manhattan.

Voilà que s’amorce pour Marco le classique récit d’émancipation du jeune homme gai de banlieue qui atterrit dans la grande ville. Marco sait qui il est et ne s’en excuse pas, go Marco : il enfile des escarpins au quotidien et ne sort pas de la maison de sa mère (chef de famille monoparentale) sans son gloss.

Accro à son iPhone, incapable de lire autre chose que des commentaires sur l’internet (un livre, WTF ?) et centré sur son nombril exposé par sa collection de crop tops, Marco représente la tranche de la génération Z que les Y et les X adorent ridiculiser.

La superficialité et le manque de profondeur de Marco rendent ce personnage difficile à aimer, hélas. Dans certains épisodes, Marco devient carrément insupportable, même si nous comprenons tous les obstacles qu’il a dû surmonter en tant que personne queer qui porte fièrement des vêtements féminins.

Par exemple, quand une collègue lui demande où il se voit dans cinq ans, Marco roule des yeux : « Urgh, cinq ans, c’est comme dans, genre, deux cycles de Lady Gaga. » Ou quand Marco multiplie les gaffes à sa première semaine au bureau de Madolyn, il se lamente : « Je suis en train de me planter comme un simple de Katy Perry. »

Bref, Marco s’exprime en clips punchés comme s’il vivait en permanence sur TikTok, yas queen, bye bitch ! Il faut attendre la scène finale du dernier épisode de Glamorous – bonne chance si vous persévérez, comme moi, jusque là – pour éprouver de l’empathie envers Marco, qui montre enfin de la vulnérabilité.

Aussi, Glamorous a entièrement été tournée à Toronto, que l’on a maquillé en New York avec des produits bon marché, et ça paraît. On est loin, loin de l’opulence d’And Just Like That, mettons.

Et l’intrigue ? Contrairement à une routine de soins du visage, elle ne compte pas plusieurs couches. En résumé, le sort de l’entreprise de cosmétiques de Madolyn, qui plaît surtout aux clientes âgées, repose sur les épaules du deuxième assistant Marco qui, ne l’oublions pas, a de la difficulté à ramener les commandes de café sans les renverser en sortant de l’ascenseur.

Mais comment le jeune Marco a-t-il gagné aussi rapidement la confiance de l’ex-top-modèle Madolyn ? Ah ha ! Marco a osé dire à Madolyn que ses palettes de fards faisaient vieille madame. Tasse-toi, matante, car Marco, lui, il sait comment embellir l’extérieur et l’intérieur d’une personne avec ses pinceaux.

Plusieurs épisodes s’étendent ensuite sur l’idée « révolutionnaire » de Marco qui sauvera l’entreprise du naufrage et on jurerait que les scénaristes de Glamorous n’ont jamais vu les campagnes publicitaires du fabricant de cosmétiques MAC avant de pondre leur histoire.

Au premier regard (charbonneux), Glamorous séduit avec ses reflets chatoyants et scintillants. Wow, ça brille ! Mais dès que l’on souffle pour se débarrasser de l’excédent de poudre aux yeux, il ne reste presque rien sur la surface.