La comédie Splendeur et influence, qui parodie les téléréalités peuplées de passagers Sunwing imbibés de boisson d’épicerie, regorge de répliques comiques et cinglantes.

Les épisodes, que l’Extra de Tou.tv égrène tous les jeudis (il n’y en a que deux en ligne), égratignent non seulement les concurrents décérébrés de ces populaires émissions, mais aussi leurs animateurs dénués d’empathie, leurs producteurs manipulateurs ainsi que tous leurs codes télévisuels bien connus comme les caméras ultra nerveuses, les flash-back en noir et blanc, les montages trompeurs, les moments de fausse émotion et les twists toujours organisées avec le gars ou la fille des vues.

C’est vraiment très drôle. Le premier épisode explose de gags hilarants démontrant le sens de l’observation aigu de l’auteur Marc Brunet (Like-moi !, Les bobos), qui se gâte dans le commentaire social.

Diversité forcée à l’écran, culture de l’annulation et ses excuses écrites par des firmes de relations publiques ou culte excessif de l’apparence physique, rien n’échappe au scénariste du Cœur a ses raisons.

À l’influenceuse Chloé (Naïla Louidort), une Lavalloise de 22 ans d’origine haïtienne, Marc Brunet fait dire : « Je peux jouer la blonde d’un gars noir, mais seulement dans une pub de la Banque de Montréal si on montre qu’on est amis avec un gai asiatique. »

Puis, quand l’animatrice Brigitte « Bree » Bussières (Anne Dorval, toujours juste) interviewe la fameuse Chloé à propos de sa peau noire, elle lui balance : « Je ne vois pas les couleurs chez l’être humain, alors je vais te croire sur parole. »

Réponse de Chloé, dont le nom se prononce Schloé : « C’est comme moi, je ne peux pas te dire si tu es inuite ou hawaïenne. » Bam !

Le deuxième épisode ralentit la cadence et se perd dans un faux scandale de racisme quand le bouchon de vin mousseux cheap du commanditaire défonce l’œil de la bonne Chloé/Schloé. OD a ses Bulles de nuit, Splendeur et influence a sa Pétilleuse nocturne, la margarine des champagnes ou le vin préféré des gens qui courent au dépanneur à la dernière minute.

L’emballage visuel et sonore de Splendeur et influence s’inspire beaucoup de la défunte Île de l’amour de TVA (quelle perte pour l’humanité, seigneur !) avec sa musique europop tonitruante et ses célibataires aux capacités intellectuelles inversement proportionnelles aux poids qu’ils soulèvent.

La mécanique de Splendeur et influence se rapproche davantage des premières saisons d’OD, où Éric Salvail déroulait un tapis rouge cheapo devant une McMaison du domaine Point Zéro sur le lac, à Blainville.

Il n’y a que six personnages principaux à suivre dans Splendeur et influence, soit l’animatrice et productrice Brigitte Bussières, son coanimateur Zac (Philippe-Audrey Larrue-St-Jacques), qui ressemble dangereusement à Fred Robichaud d’OD, de même que les quatre créateurs de contenu de cette fausse téléréalité.

En plus de Chloé/Schloé, on retrouve Drano (Yannick de  Martino), un cascadeur de Lachute de 28 ans et père de la petite Stacey en garde partagée une journée sur 30. On rencontre Vadge (Pascale de Blois, vue dans Big Brother Célébrités), 23 ans, de Trois-Rivières, qui fait du Pilates à côté d’une souffleuse. Et on fait connaissance avec Cyprien (Mathieu Dufour), de Montréal, un modeux de 26 ans qui dénonce les injustices sociales en portant de beaux chandails.

J’aurais aimé voir davantage les personnages secondaires de Marie-Tracteur, claveciniste et roteuse, l’obsédé du gym Osti-Ve (quel prénom superbe), ainsi que la pétillante Velveeta, dont le nom est toujours suivi de deux « snaps » de doigts, clac, clac, parce que ça exprime toute sa personnalité. Ils n’apparaissent qu’au début et c’est dommage. Ramenez-les, STAT.

L’animatrice Brigitte, dite Bree, attire toute la lumière à chacune de ses apparitions. Anne Dorval l’incarne avec quelques emprunts à Julie Snyder, notamment dans ses tenues chics et griffées.

Au troisième épisode, notre Brigitte chérie, ex-animatrice de l’émission Adieu bourrelets, allô l’amour, se soumet à l’exercice des 73 questions du magazine Vogue et c’est un délice. À propos des effets positifs du mouvement #moiaussi, Brigitte justifiera : « Maintenant, quand on voit un animateur de talk-show qui perd ses clés pis qui essaie de les retrouver entre les fesses d’un employé, ben on est choqués en silence et on approuve quand quelqu’un d’autre le dénonce. »

Le niveau de drôlerie oscille d’un épisode à l’autre. La cinquième demi-heure recrée habilement le scandale des touristatas de Sunwing, ce qui provoque l’exode des commanditaires de Splendeur et influence, dont les armoires de cuisine Michael Jarreau et le resto-bar Urban Douchy.

La nouvelle comédie de Marc Brunet se révèle au top quand elle grince et écorche, et non dans le burlesque et les effets de répétition. Au premier épisode, une concurrente demande que le mot « montgolfière » soit remplacé par l’expression « personne fière de souffrir d’un trouble du développement ». La production devra l’évacuer en ambulance tellement elle est offensée.

Plusieurs blagues de Splendeur et influence concernent la beauté et la célébrité, « le plus beau métier du monde », glissera Brigitte Bussières, enfilant une autre perle de sagesse sur le collier de son coanimateur Zac.

Pour Vadge, toute femme devrait avoir de beaux cils. Parce que « les yeux, c’est comme les totons du visage », expliquera-t-elle sans rigoler.

Aujourd’hui, la plogue sur Instagram ne se limite plus aux influenceurs traditionnels, dont c’est le « travail » de mousser les ventes de matelas en boîte, de rasoirs à pubis ou de suppléments Popeye’s. Plusieurs artistes trempent maintenant dans la promotion du vin d’épicerie et de sérums pour le visage dans une forme peut-être plus noble et subtile, mais qui demeure de la publicité déguisée.

C’est d’ailleurs très ironique – limite méta – de voir l’humoriste Mathieu Dufour se moquer des influenceurs dans Splendeur et influence et d’agir, dans la même semaine, comme porte-parole de la journée québécoise du hot-dog steamé, commanditée par Lafleur.

Honnêtement, Mathieu et ses roteux avaient l’air sortis d’un sketch de Splendeur et influence. Un petit code promo avec ça ?