Après le premier épisode de la minisérie phénomène The Watcher de Netflix, on sent le piège se refermer avec force sur nous. Il reste encore six épisodes d’une heure à cette histoire d’épouvante qui aurait pu être un courriel et c’est 100 % certain que l’on va l’engloutir au complet, même si la qualité n’est pas top, top.

C’est comme ça. Il n’y a aucune explication rationnelle à fournir autre que : on veut savoir comment ça va finir. Tant pis s’il faut se taper sept heures d’une série moyenne pour découvrir qui terrorise cette pauvre famille habillée en couleurs beige, taupe et crème de type influenceuse chrétienne d’automne de la Nouvelle-Angleterre.

Voilà pourquoi The Watcher, offerte en français et en anglais, caracole en tête du palmarès de Netflix depuis une semaine. Le mystère qui l’entoure a un pouvoir d’attraction plus fort que Mercure qui rétrograde. Aussi, The Watcher, qui a été fabriquée par Ryan Murphy (Ratched, Dahmer), découle d’une histoire vraie qui a fait l’objet d’un long reportage dans le magazine New York en novembre 2018.

Donc, c’est arrivé près de chez quelqu’un, dans la banlieue cossue de Westfield, au New Jersey. À l’étroit dans leur mini-appartement de Manhattan, la céramiste Nora (Naomi Watts), son mari avocat Dean (Bobby Cannavale) et leurs deux ados dénichent le nid douillet de leurs rêves dans un quartier-dortoir huppé à la Pleasantville.

Leur gigantesque nouvelle maison centenaire, rénovée avec goût, repose sur un vaste terrain manucuré. Il y a un country club au coin de la rue où les membres jouent au tennis avec des chandails en tricot blanc (#modeWimbledon). Et les époux se taquinent à propos d’un comptoir en marbre de Carrare (on le remplace !) et d’une chaise Pierre Jeanneret (trop chère !), problèmes de premier ordre, on s’entend.

PHOTO ERIC LIEBOWITZ, FOURNIE PAR NETFLIX

Naomi Watts et Bobby Cannavale dans The Watcher

Bref, leur vie de bobos est une story Instagram bien filtrée jusqu’au jour où ils reçoivent une lettre anonyme. Uh-oh. Quelqu’un dans le voisinage les épie et les menace pour qu’ils déguerpissent. Les lettres se multiplient et ont toutes été rédigées à la machine à écrire, sans doute une vieille Underwood. Leur auteur ? The Watcher, le veilleur, qui surveille cette maison spéciale depuis plus de 20 ans. Son but : transformer en cauchemar l’existence dorée de ce clan d’intrus.

Vagues au départ, les missives se précisent de façon inquiétante. Le veilleur connaît le nom des enfants, les chambres qu’ils occupent dans la maison et il déterre des secrets bien enfouis.

Notre couple de yuppies adorés qui n’avait peur de rien, pas même de boire du vin rouge en portant du linge gris pâle, se met à paranoïer sur un moyen temps.

Mais qui leur en veut à ce point, qui écrit ces lettres menaçantes et pourquoi, bonté divine ? Le premier épisode, bien ficelé, fait défiler à peu près tous les suspects potentiels. Il y a la courtière immobilière (Jennifer Coolidge) qui rôde le soir et qui insiste auprès du couple pour qu’il revende illico la demeure. Il y a le couple de voisins bizarres, les retraités Maureen et Mitch, qui passent leurs journées à écornifler autour de la maison (hantée).

Il y a l’autre voisine étrange (Mia Farrow) ainsi que son frère muet qui ont l’air de jouer dans la famille Addams. Et il y a le détective de la police locale qui prend très à la légère ce dossier pourtant effrayant.

Plus on progresse dans The Watcher, plus les pistes se multiplient. Imaginez un meurtre et mystère dans une résidence gothico-chic à la Amityville, avec une touche d’Aller simple.

Maintenant, n’essayez pas trop de départager le vrai du faux dans The Watcher. Les lettres inquiétantes dactylographiées, le veilleur sans visage, la famille parfaite qui capote sa vie, tout ça est véridique. Pour le reste, il s’agit de fiction. Dans la vraie vie, personne ne s’abrillerait, comme Nora le fait, avec le couvre-lit d’un motel miteux, voyons. Cette scène m’a procuré plus de frissons de dégoût que l’assassinat, en pleine nuit, du furet familial.

L’aspect surnaturel de la série — la musique de Wagner qui joue dans l’interphone, le monte-plats de la mort, les soupçons de rite satanique — détonne parfois avec le côté « true crime » de l’œuvre. Et jusqu’au quatrième épisode, la série conserve son tonus et son rythme haletant. Ça se gâche par la suite, alors que l’intrigue tourne en rond, mais, bon.

Rendu à ce point-là, il ne reste que deux heures à enfiler, c’est certain qu’on va engloutir The Watcher au complet. On veut savoir comment ça finit, non ?

Indice : pas super bien.