L'industrie minière demeure moins ébranlée par la pénurie de main-d'oeuvre que d'autres secteurs de l'économie québécoise, mais elle n'est pas épargnée. Il faut plus de temps pour pourvoir les postes vacants.

Lorsqu'une offre d'emploi est affichée à l'externe par Mines Agnico-Eagle, environ six semaines sont nécessaires pour recruter des mécaniciens, soudeurs ou électriciens. Cette démarche se réalisait auparavant à l'intérieur de trois semaines. « On met le double de temps et le double d'efforts pour pourvoir les postes de métiers », indique Nicolas Bolduc, surintendant général des ressources humaines pour cette entreprise qui compte environ 3000 employés en Abitibi-Témiscamingue.

Dans le secteur, la pénurie de main-d'oeuvre se fait surtout sentir dans ces emplois qui exigent un diplôme d'études professionnelles (DEP). « Des mécaniciens sont demandés partout. Donc on n'y échappe pas », observe Kathy Gauthier, directrice générale du Comité sectoriel de la main-d'oeuvre (CSMO) de l'industrie des mines. Dans les estimations des besoins de main-d'oeuvre sur un horizon allant jusqu'en 2021, publiées par cet organisme de concertation en 2017, on prévoyait déjà que 66 % des postes à pourvoir dans le secteur minier, soit plus de 4000 d'entre eux, seraient des emplois liés à des DEP.

PRÉVOIR LES COUPS

« Pour l'instant, on réussit à garder la tête hors de l'eau en raison de nos conditions de travail », juge Katie Deneault, directrice service-conseil en ressources humaines et développement de la main-d'oeuvre à l'Association minière du Québec (AMQ). Les opérations et la productivité des entreprises ne sont d'ailleurs pas ébranlées par le phénomène. « Quand on regarde l'ensemble des départs à la retraite et les nouveaux projets qui vont démarrer, ce serait se cacher la tête dans le sable de dire que ça va continuer comme ça », ajoute-t-elle. 

« Comme on a la chance de voir les coups venir, on se prépare. » - Katie Deneault, de l'Association minière du Québec

« Il va falloir être créatif, flexible et innover en matière de ressources humaines », croit Nicolas Bolduc. Il anticipe la mise en place de programmes pour accélérer le développement de la main-d'oeuvre et la création de nouveaux statuts d'employé pour conserver à temps partiel des travailleurs sur le point de partir à la retraite.

LA GRANDE SÉDUCTION

Si le taux de chômage se maintient autour de 5,5 % au Québec depuis les six derniers mois, il est descendu sous la barre de 3,5 % depuis septembre dernier dans la région minière de l'Abitibi-Témiscamingue. « On ne veut pas juste recruter des gens de la région, souligne Katie Deneault. On va beaucoup dans les centres de formation professionnelle des régions non minières pour rencontrer les étudiants. » Dans la dernière année, l'AMQ estime en avoir rejoint près de 1400.

Lors de la dernière Foire nationale de l'emploi de Montréal, en octobre dernier, les acteurs de l'industrie minière se sont regroupés pour la première fois. « Ensemble, les entreprises minières et les organismes du secteur, nous étions plus visibles », souligne Josée Méthot, présidente-directrice générale de l'AMQ.

L'association se prépare aussi à mener une mission de recrutement à l'étranger. Elle tente de cibler une région du monde où la fermeture de mines aurait laissé un important bassin de main-d'oeuvre disponible et prêt à émigrer.

« C'est important qu'on réalise une meilleure intégration des autochtones de la région », insiste Nicolas Bolduc, en revenant sur la population locale. Le programme L'Essentiel des mines, une initiative du Conseil des ressources humaines de l'industrie minière, établi en Ontario, et de l'Assemblée des Premières Nations, est déployé au Québec depuis 2016 par le CSMO Mines. Il propose à des personnes des communautés autochtones une formation de 12 semaines sur des compétences essentielles pour décrocher un emploi en les initiant aux métiers du secteur.