Les étudiants en génie ont quatre années d'étude, parfois cinq, avant de pouvoir parer leur auriculaire de l'anneau de fer martelé qui symbolise leur engagement envers la profession d'ingénieur. Mais pour une partie d'entre eux, le marché du travail attendra: ce sont vers les études supérieures qu'ils se tourneront.

À l'École Polytechnique de Montréal, ils sont de 20 à 25% à poursuivre leurs études après le baccalauréat, dans la majorité des cas en se dirigeant vers un programme de maîtrise.

Bon an mal an, on retrouve ainsi dans l'institution montréalaise près de 1200 étudiants inscrits à la maîtrise et plus de 700 au doctorat.

«Contrairement au baccalauréat qui permet d'obtenir un titre, les études supérieures permettent de se spécialiser, explique Guylaine Dubreuil, conseillère principale en gestion de carrière à l'École Polytechnique. C'est là qu'est la grande nuance.»

Ainsi, au sortir de leur formation, les maîtres et docteurs en ingénierie deviennent des spécialistes de leur domaine. Un atout qui leur permet de décrocher la plupart du temps un emploi central dans la grande entreprise, selon Guylaine Dubreuil.

«Ils vont souvent avoir le titre d'expert ou de gestionnaire de projets, explique-t-elle. Ils joueront un rôle-clé dans une équipe ou une organisation, ce qui fait souvent en sorte qu'ils occupent un poste unique.»

Cette description est vraie pour les titulaires d'un doctorat, mais aussi pour ceux qui ont décroché une maîtrise.

Environ 70% de ces derniers se retourneront ensuite vers l'industrie, selon Jean Dansereau, directeur adjoint des affaires académiques et internationales et directeur des études supérieures à Polytechnique Montréal.

Avec un doctorat en poche, la proportion diffère toutefois. «La moitié de nos diplômés au doctorat va se retrouver dans le milieu universitaire, explique Jean Dansereau. Environ 20% se tournent vers l'industrie, et les autres se dirigent entre autres vers le secteur parapublic ou deviennent tout simplement des consultants.»

Un intérêt variable pour les études supérieures

Attirer les étudiants aux cycles supérieurs représente un défi pour les institutions d'enseignement en génie, selon Georges Abdul-Nour, directeur de l'École d'ingénierie et professeur au département de génie industriel de l'Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR).

«Lorsque les étudiants qui terminent leur baccalauréat ont un emploi à 50 000 ou 55 000$ qui les attend, c'est difficile de les retenir à la maîtrise en les payant 7000 ou 8000$: ils savent calculer», raconte-t-il à la blague.

Mais lorsque les temps sont incertains, le resserrement de l'emploi dans certains secteurs du génie amène son lot d'étudiants soudainement intéressés par les études supérieures, particulièrement de 2e cycle. «On remarque souvent que lorsqu'il y a une récession économique, on va avoir une augmentation du nombre d'étudiants aux cycles supérieurs, et l'inverse est vrai aussi», décrit Jean Dansereau.

Pour d'autres étudiants, ce sera là l'occasion de suivre une formation complémentaire. «Certains vont terminer leur génie puis faire un MBA, observe Georges Abdul-Nour. Ce qu'on leur met dans la tête, c'est qu'ils vont travailler 5 ou 10 ans comme ingénieur, puis qu'ils deviendront administrateurs.»

Sans égard pour la situation économique, un constat demeure toutefois. Que ce soit à Trois-Rivières ou à Montréal, les études supérieures attirent d'abord les étudiants étrangers.

Qu'ils soient seulement de passage au pays, aient leur statut de résident permanent ou soient de nouveaux résidents canadiens, les étudiants étrangers sont majoritaires dans bien des écoles de génie, indique Georges Abdul-Nour. Pour l'École Polytechnique, Jean Dansereau ose même avancer un chiffre.

«Si on regarde tous les étudiants qui ne sont pas d'origine canadienne, ça peut atteindre 50% dans certains cas.»

Selon Guylaine Dubreuil, les étudiants étrangers voient dans les études supérieures un moyen de se distinguer par rapport aux autres diplômés.

«C'est une façon pour eux d'intégrer le marché du travail plus facilement, explique-t-elle. Ce n'est pas la seule raison, mais c'en est une importante.»