La vague de consolidation qui frappe les pharmaceutiques depuis cinq ans s'est traduite par de mégas fusions et acquisitions. La plus récente est celle qui a vu Pfizer et Wyeth-Ayerst se fondre en une seule entité.

Du coup, on est devenu un peu nerveux chez Pfizer Canada: après ces fusions le mot d'ordre devient consolidation, c'est-à-dire fermeture d'unités de recherche et de fabrication de médicaments.

Paul Lévesque, patron de Pfizer Canada, est résolu à préserver son usine de l'arrondissement de Saint-Laurent. «J'ai 1000 personnes qui travaillent là. Nous y fabriquons des produits aussi connus qu'Advil ou Centrum. Si je veux protéger ces emplois et même prendre de l'expansion, je dois prendre les devants au lieu d'attendre les problèmes.»

Il y aura donc une annonce prochaine concernant un investissement majeur dans l'arrondissement de Saint-Laurent, avance M. Lévesque, sans préciser la valeur totale du projet, ni le nombre d'emplois créés ou préservés.

Il ajoute toutefois que l'usine québécoise lancera «une unité de production si loin en avant dans les technologies de pointe que personne ne songera à la fermer».

Formation

Mais la technologie moderne n'est pas tout, explique le PDG de Pfizer Canada. «Il nous faut aussi la main-d'oeuvre la plus qualifiée possible, dit-il. Nous avons donc investi là où on la forme.» C'est-à-dire au cégep.

Pfizer a investi 600 000$ avec les collèges Gérald-Godin et John-Abbott pour pallier l'absence d'écoles formant spécifiquement les techniciens et techniciennes de laboratoires de production pharmaceutique. Les premiers diplômés sont sortis au printemps dernier.

La consolidation n'affecte pas que le secteur de la fabrication pharmaceutique. Elle touche aussi celui de la recherche, comme ce fut le cas avec l'unité de R&D de Merck à Montréal, fermée l'an dernier. «Bien mauvaise nouvelle, commente Paul Lévesque. Mais il y a un revers moins connu à cette médaille. La pharma qui ferme un labo a toujours un besoin urgent de connaissances scientifiques sur les pathologies qui nous sont encore obscures, comme le diabète ou l'obésité. C'est la bonne nouvelle.»

Occasion à saisir

Pour M. Lévesque il y a là une occasion à saisir pour Montréal et le Québec. C'est sans doute un peu beaucoup pour cela qu'il est président du conseil de Montréal InVivo, la grappe des sciences de la vie du Montréal métropolitain.

«Nous avons tenu des consultations en profondeur avec tout le monde des sciences de la vie, industries et centres de recherche, dit-il. Nous voulions identifier nos forces pour l'avenir, nos atouts pour attirer les dollars en R&D.»

Et c'est la médecine personnalisée qui a gagné. «Les 5 milliards que l'État québécois va investir dans les nouveaux centres hospitaliers universitaires (McGill, UdeM, Sainte-Justine, Hôpital juif), ça n'est pas que de la brique. C'est aussi de la recherche de pointe. Nous devions définir un axe d'excellence capable d'attirer la planète et c'est la médecine personnalisée.»

Agir ensemble

Paul Lévesque a l'oreille des deux ministres du Développement économique, celui de l'Ontario comme celui du Québec. Il est leur conseiller spécial en biopharmaceutique. «J'ai fait remarquer à chacun d'eux que nos délégations concurrentes, nos kiosques séparés dans les congrès internationaux, ça faisait dur!»

Le corridor Québec-Ontario en sciences de la vie a pu naître de cette remarque. Depuis cette année, au lieu d'agir en concurrents les deux provinces voisines agissent de concert en sciences de la vie.

«Nous devons nous pénétrer de cette évidence: la concurrence n'est pas à Toronto. Elle est en Chine!»