Avec 49 % de la population québécoise, Montréal est un poids lourd dans l'économie de la province. Elle a marqué des points dans les dernières années, mais doit encore rattraper ses retards dans différentes sphères économiques. Les entrepreneurs Chris Arsenault et Manon Lozeau-Simard témoignent de leur expérience.

MONTRÉAL

• Population active de Montréal : 1 082 800

• Taux de chômage de Montréal : 10,5 % (2015)

• Revenu disponible par habitant à Montréal : 26 481 $

• Population active du Québec : 4 434 200

• Taux de chômage du Québec : 7,6 % (2015)

• Revenu disponible par habitant du Québec : 26 046 $ (2014)

Source : Institut de la statistique du Québec

AMBITION

Chris Arsenault est arrivé de Québec à Montréal en 1999. « J'ai vu beaucoup de progrès dans les 10 dernières années que j'ai passées à Montréal. C'est notamment le cas sur le plan de l'esprit entrepreneurial qui est beaucoup plus développé qu'avant », affirme-t-il.

Mais les défis restent nombreux. « Il y a plus de chassés que de chasseurs à Montréal », regrette-t-il en faisant référence aux entreprises qui attirent l'attention internationale et se font racheter par des intérêts étrangers. « Il faudrait plus d'acquéreurs locaux, mais aussi plus d'entrepreneurs désireux de construire des entreprises de 300 à 500 millions de chiffres d'affaires », souligne Chris Arsenault. 

Pour cela, « Montréal manque de dirigeants qui ont l'expérience d'avoir fait grandir à ce niveau-là des entreprises. On a besoin d'attirer ces talents ici et d'amener nos talents à ce stade », avance l'associé directeur du fonds d'investissement.

Enfin, Chris Arsenault regrette que, si Montréal a le potentiel de devenir un centre d'innovation d'envergure mondiale, les universités ne soient pas encore suffisamment connectées à l'entreprise privée pour développer ce potentiel. 

Chris Arsenault

Selon Chris Arsenault, associé directeur du fonds d'investissement iNovia Capital, « Montréal a bâti un esprit plus ambitieux qu'avant ».

Âge: 44 ans 

Occupation : associé directeur de fonds d'investissement iNovia capital

À Montréal depuis: 17 ans

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE---Portrait de Chris Arsenault, associé directeur du fonds de capital de risque iNovia, qui sera publié dans le cadre de notre dossier sur l’économie créative au Québec.-30-Référence # 675 384

BANLIEUE

La vitalité de Montréal sur le plan culturel, touristique, de l'innovation est un atout majeur pour le secteur d'activité de Manon Lozeau-Simard, la photo et la vidéo.

Ses principaux défis dans la gestion de son commerce viennent plutôt du phénomène de migration des Montréalais vers la banlieue.

« La majorité de mon personnel habite hors de Montréal. Parfois, au moment de l'embauche, j'ai peur qu'ils se tannent de faire le transport tous les jours. De plus, on a du mal à recruter de la main-d'oeuvre expérimentée. Or, c'est quand ils vieillissent et fondent une famille que, souvent, les gens partent en banlieue et hésitent à venir travailler à Montréal à cause des embouteillages et des problèmes sur les ponts », regrette Manon Lozeau-Simard. 

Quant aux clients qui habitent en dehors de l'île de Montréal, ils reviennent rarement au centre de Montréal le week-end. « Ils préfèrent aller dans les grands centres commerciaux où il n'y a pas de problème pour garer son véhicule », constate la PDG. 

Son arme : « Rester à l'avant-garde. » Mais pour cela, il faut des projets d'envergure et là, « ce sont les difficultés administratives et les taxes qui nous entravent », déplore Manon Lozeau-Simard. 

Manon Lozeau-Simard 

« Montréal est une belle ville, multiculturelle et où il y a beaucoup d'activités. C'est un milieu propice pour développer notre activité », affirme Manon Lozeau-Simard, vice-présidente principale de Lozeau.

Âge: 42 ans 

Occupation : vice-présidente principale de Lozeau 

À Montréal depuis: 42 ans

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE-MONTREAL Portrait de Manon Lozeau, PDG du magasin de photo Lozeau.-11 FEVRIER 2016 #803492 AFFAIRES PORTFOLIO

FORCES

Montréal continue d'être « la locomotive du Québec », selon l'Institut du Québec, qui a réalisé un tableau de bord de la région métropolitaine en comparaison avec diverses villes comparables comme Boston, Vancouver ou Toronto*. L'une des principales forces de Montréal, selon Jean-Guy Côté, directeur associé de l'Institut, c'est sa qualité de vie. 

« La qualité de l'air, le réseau de transports en commun, la circulation routière qui est quand même moins problématique que dans d'autres villes comparables, un taux d'homicide inférieur à la moyenne canadienne, etc., ce sont autant d'atouts qui rendent le contexte favorable au développement économique et permettent d'attirer des talents extérieurs », explique Jean-Guy Côté. 

Ce à quoi il faut ajouter « des forces économiques (jeux vidéo, secteurs innovants, biopharmacie, etc.), un coût d'exploitation d'une entreprise inférieur à bien d'autres grandes villes et une relativement bonne compétitivité fiscale (4e sur un classement de 16 villes canadiennes et américaines) », complète M. Côté. 

Si la compétitivité est encore à la traîne (15e sur 19 villes), elle s'améliore (+0,5 % contre-0,3 % pour Toronto), ce qui est également un point positif pour l'activité économique de Montréal et son attractivité.

*Comparer Montréal - Tableau de bord de la région métropolitaine, Institut du Québec https://www.conferenceboard.ca/Libraries/PUBLIC_PDFS/7517_MontrealScorecard_IdQ_RPT-FR.sflb

DÉFIS

Mais « l'aspect le plus inquiétant, c'est que bien que les ingrédients (universités, capital de risque, etc.) soient là pour que Montréal devienne une plateforme de l'innovation, le gâteau ne lève pas. Le nombre de brevets par habitant est de 20 à Montréal contre 193 à San Francisco et 30 à Vancouver et Toronto », constate Jean-Guy Côté. 

« Le retard dans la diplomation » n'aide pas à améliorer la situation, selon l'Institut du Québec, dont les chiffres montrent que 29,6 % de la population montréalaise a un baccalauréat ou plus contre 36,8 % à Toronto ou 47 % à Boston. « Ça s'améliore dans la tranche d'âge des 25-34 ans (36,6 %) mais on est encore loin du rattrapage », poursuit M. Côté. 

Or, cela peut décourager certaines entreprises ou certains investisseurs étrangers à venir s'installer à Montréal surtout dans les domaines nécessitant des personnes qualifiées comme les hautes technologies par exemple, car « on sait qu'une population éduquée est plus facile à former », explique Jean-Guy Côté.

EN CHIFFRES

Top 5 grands employeurs 

• Bombardier : 17 000 (dont les installations de Mirabel et de Saint-Bruno)

• Bell : 11 000

• Air Canada : 5500

• CGI : 5000

• CAE : 2920 

Nombre de parcs industriels : 21 

Top 3 des grands secteurs d'activité 

• Transport et logistique : 122 000

• Finance : 110 000

• TIC : 91 000 

Top 3 des sièges sociaux 

• Power Corporation du Canada

• Air Canada

• Bombardier inc.