À moins d’être indépendant de fortune, un entrepreneur doit savoir s’entourer. Comment choisit-on ses investisseurs ou ses banquiers ? Et qu’est-ce qui contribue au succès d’un partenaire financier ? Trois experts présentent des astuces et des conseils pour franchir avec brio cette étape cruciale.

Du travail préliminaire s’impose avant de partir à la recherche d’un partenaire financier. « Il faut d’abord définir ses objectifs, explique Luis Cisneros, professeur titulaire au département d’entrepreneuriat et innovation à HEC Montréal. Par exemple, pourquoi a-t-on besoin d’argent ? Combien doit-on amasser ? »

Cet avis est partagé par Audrey Beauchemin, directrice des comptes majeurs à la Banque de développement du Canada (BDC), qui croit que la clé réside dans la préparation. « Il faut avoir une vision stratégique à long terme, un projet bien ficelé, des informations à jour, des projections réalistes. Il faut avoir cerné les risques, les délais et les commandes potentiels », dit-elle.

Une entreprise avec des visées aux États-Unis doit notamment connaître le marché, les ressources à sa disposition sur place et ses concurrents, et élaborer un plan pour percer au sud de la frontière.

En affaires comme en amour, une relation réussie repose sur la confiance. Marc Fortin, directeur principal, investissement manufacturier et diversifié, chez Investissement Québec, suggère donc de miser sur la transparence. « Il faut tout mettre sur la table, croit-il. De toute façon, éventuellement, les enjeux passés finissent par se savoir. »

Selon lui, la qualité de l’entourage s’avère primordiale. Quand on est un investisseur, on ne veut pas voir de one-man show. Il faut pouvoir compter sur une équipe chevronnée, un comité consultatif ou un conseil d’administration.

Plusieurs options

Les devoirs terminés, un entrepreneur doit déterminer vers qui se tourner. Les options ne manquent pas. « Si vous démarrez votre entreprise, il y a des subventions disponibles. Il y a des bourses, des concours, du sociofinancement... », énumère Luis Cisneros.

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Luis Cisneros, professeur titulaire au département d’entrepreneuriat et innovation à HEC Montréal

Celui qui dirige également l’Institut d’entrepreneuriat Banque Nationale-HEC Montréal rappelle qu’il existe des organismes comme Evol ou PME MTL qui offrent des conditions privilégiées à leur clientèle. « Ils peuvent cibler les femmes, les entrepreneurs issus de la diversité ou ceux d’une région », illustre le professeur, ajoutant qu’il ne faut pas hésiter à contacter les conseillers pour voir s’il y a des programmes adaptés à sa situation.

Il recommande aussi de consulter Projet A, une plateforme en ligne gratuite pour les entrepreneurs. « C’est un bon outil pour créer son modèle et son plan d’affaires », résume-t-il.

Après toutes ces démarches, on peut se tourner vers les programmes des banques, les anges investisseurs et les firmes de capital de risque.

Trouver chaussure à son pied

Le partenaire financier idéal offre un taux d’intérêt avantageux, bien sûr, mais d’autres éléments sont à considérer avant d’arrêter son choix, comme la flexibilité, les autres services offerts ou un possible congé de paiement de capital.

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Marc Fortin, directeur principal, investissement manufacturier et diversifié, chez Investissement Québec

Comme une panoplie de variables entrent en jeu, Marc Fortin conseille de poser des questions aux investisseurs potentiels.

Au-delà du prix, a-t-il des contacts pour favoriser le développement de la PME ? Quel rôle compte-t-il avoir dans l’entreprise ? En retour, un banquier doit être capable de poser les questions difficiles, d’être la voix de la raison à travers les hauts et les bas. Pour trouver un partenaire avec qui on a des atomes crochus, cette discussion est importante.

Marc Fortin, directeur principal, investissement manufacturier et diversifié, chez Investissement Québec

Partager les mêmes valeurs que son partenaire financier se chiffre difficilement. Pourtant, il s’agit d’un autre élément essentiel d’une relation à long terme. Un entrepreneur sensible à la cause environnementale s’entendra certainement mieux avec un banquier qui prône une approche durable.

Le succès d’un banquier tient aussi dans son réseau de contacts, estime Audrey Beauchemin. « Ce n’est pas évident pour un entrepreneur de connaître des avocats, des notaires, des courtiers, des évaluateurs, des spécialistes en environnement. C’est le rôle de l’investisseur. »

Elle ajoute que la BDC bénéficie d’une grande portée. « On peut aider les entrepreneurs à rencontrer d’autres clients. Il est déjà arrivé qu’un de nos clients achète un immeuble d’un autre. »

Éviter les erreurs

Sauter sur l’offre la plus alléchante sans examiner les autres aspects fait partie des erreurs courantes des PME en quête d’investisseurs, selon Marc Fortin. « Il faut aussi rencontrer plusieurs partenaires potentiels, pas juste un, pour comprendre ce qui les distingue. »

Un manque de préparation constitue un autre faux pas, selon Luis Cisneros. « Quelqu’un qui ne maîtrise pas les chiffres et les détails de son plan d’affaires rend les bailleurs de fonds très nerveux », souligne-t-il.

Les conseils du beau-frère ou de l’ami en affaires – même s’ils sont bien intentionnés – ne conviennent en outre pas nécessairement à son entreprise. Mieux vaut faire ses propres démarches pour trouver l’âme sœur professionnelle.