Pendant que les entreprises en arrachent pour trouver et fidéliser des employés, les universités, elles, tentent d’embrasser les aspirations de la génération montante tout en maintenant leur taux de diplomation. Aperçu de la situation.

Contrairement à ce qui se passe dans les écoles primaires et secondaires, la pénurie d’enseignants ne semble pas toucher les universités. « On a l’avantage d’être une université de recherche, c’est un atout dans le recrutement de professeurs, donc on n’a pas de difficulté de recrutement dans le moment », indique Sophie D’Amours, rectrice de l’Université Laval, à Québec.

Même son de cloche du côté de l’Université du Québec à Montréal (UQAM)… mais avec un petit bémol : « Le contexte de pénurie de main-d’œuvre ne semble pas avoir d’impact significatif sur le recrutement des professeurs. Nous observons néanmoins que les défis sont plus grands, dans certains domaines, en ce qui concerne le recrutement des personnes chargées de cours. Comme la grande majorité de ces enseignants proviennent du milieu pratique, nous devons procéder à l’occasion à plus d’affichages qu’auparavant », révèle Jenny Desrochers, porte-parole de cet établissement d’enseignement universitaire.

Si les universités semblent exemptées des difficultés liées au recrutement, la pénurie de main-d’œuvre entraîne néanmoins son lot de défis.

Flexibilité recherchée

Le profil des étudiants universitaires a beaucoup changé au cours des dernières années. En plus d’une baisse marquée du nombre d’étudiants à temps plein, il y a un appétit grandissant pour les programmes courts et une demande notable pour l’enseignement à distance ou en mode hybride.

Les étudiants, comme les employés en entreprise, sont à la recherche d’une plus grande flexibilité.

Sophie D’Amours, rectrice de l’Université Laval

Selon les données compilées par l’établissement d’enseignement, il y a eu, entre 2018 et 2020, une augmentation d’environ 30 % de la clientèle dans les programmes courts. « On est passés de 10 000 à 13 000 étudiants », précise Mme D’Amours. De plus, la proportion d’élèves qui étudient à temps partiel a augmenté de 10 % depuis 2015. « C’est très important. Dans notre université, c’est plus d’un étudiant sur trois qui étudie à temps partiel », souligne la rectrice. Plutôt que de s’inscrire à cinq cours par session, ces étudiants choisissent parfois d’en faire quatre, ce qui a un impact direct sur la durée de leurs études et leur arrivée à temps plein sur le marché du travail.

L’UQAM, qui se targue « d’être reconnue depuis sa création pour accueillir des personnes étudiantes qui poursuivent des études à temps partiel », enregistre pourtant cet automne une diminution de 4,6 % des inscriptions au baccalauréat et au certificat, selon les données préliminaires compilées par le Bureau de coopération interuniversitaire (BCI). Des données qui laissent croire que la pénurie de main-d’œuvre pousse certaines personnes à privilégier le travail plutôt que les études.

Revoir les façons de faire

Comment faire pour maintenir les étudiants sur les bancs d’école alors que les entreprises offrent salaire, flexibilité et autres avantages ? Pour Sophie D’Amours, la solution réside dans la rencontre entre le milieu des affaires et le milieu scolaire. « Je pense qu’il faut être tous sensibilisés — le secteur privé, le secteur public et les politiciens — à l’importance de terminer nos études et au fait que, dans la conjoncture actuelle, il faut être innovants et créatifs pour trouver des moyens d’enrichir les parcours des étudiants, ne pas les mettre devant une décision de choisir entre le travail et les études parce qu’on va tous perdre. Il faut trouver des nouvelles façons d’enrichir notre parcours d’études par des partenariats qui vont être contributifs à la fois aux études et au partenaire. »