Les traînées de condensation prennent beaucoup de place dans le quotidien de François Garnier, professeur au département de génie mécanique de l’École de technologie supérieure (ETS). Titulaire de la Chaire de recherche industrielle Safran sur le développement de systèmes d’aéropropulsion durables, il tente d’améliorer les technologies pour diminuer le plus possible la formation de ces traces blanches dans le ciel qui ont un impact sur le réchauffement climatique et sur la qualité de l’air autour des aéroports.

« On parle beaucoup du CO2 [dioxyde de carbone] lorsqu’il est question de réchauffement climatique, mais des travaux de synthèse réalisés en 2021 disent que le non-CO2, comme le méthane, les oxydes d’azote et les particules, réchaufferait deux fois plus le climat que le CO2 dans le domaine de l’aviation », indique-t-il.

Les traînées de condensation entrent dans cette catégorie. Mais que sont-elles, au juste ? « Elles sont le résultat d’un phénomène physique qui se produit seulement lorsque l’atmosphère est humide et relativement froide, explique François Garnier. C’est le mélange de la vapeur d’eau et des particules de suie formées majoritairement de carbone qui sont émises par le moteur et la combustion dans une masse d’air sursaturée. Le tout se transforme en glace dans la haute atmosphère où il fait - 56 °C. »

Cette « glace sale » finit par former des nuages de type cirrus, ces filaments blancs qu’on peut observer très haut dans le ciel.

PHOTO SARKA VANCUROVA, LA PRESSE

François Garnier, titulaire de la Chaire de recherche industrielle Safran sur le développement de systèmes d’aéropropulsion durables

D’ailleurs, on voit clairement dans les images satellites des couloirs aériens achalandés, comme celui qui relie l’Europe et l’Amérique du Nord, qu’il y a une concentration importante de cirrus.

François Garnier, titulaire de la Chaire de recherche industrielle Safran sur le développement de systèmes d’aéropropulsion durables

Ces nuages presque transparents absorbent une partie de la radiation de la Terre et la renvoient vers le sol, en plus de laisser passer les rayons du Soleil. Ils participent donc à l’augmentation des gaz à effet de serre et du réchauffement climatique.

L’industrie en mode préparation

La Chaire de recherche industrielle Safran sur le développement de systèmes d’aéropropulsion durables a commencé ses recherches l’an dernier. Elle travaille, comme son nom l’indique, avec les moteurs de Safran, un équipementier de l’industrie aéronautique. L’objectif est de tenter de faire progresser les connaissances liées aux processus physico-chimiques impliqués dans la formation des polluants produits par les moteurs d’avion et permettre à Safran de mieux comprendre la relation entre les composants internes du moteur et les émissions de particules.

« On veut voir comment éviter le plus possible d’émettre de la suie et aussi, que de la glace se forme autour de ces particules, explique François Garnier. C’est important pour l’industrie. Pour faire certifier les moteurs par l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) pour qu’ils puissent voler, il faut respecter des règles sur les émissions de polluants. Pour l’instant, de premières mesures ont été mises en place pour limiter l’émission des particules de suie. Il n’y a rien encore sur les aérosols et les traînées de concentration, mais cela pourrait arriver dans les prochaines années, alors il faut se préparer. »

La Chaire travaillera à relever ce défi dans les cinq prochaines années.