C’est l’objectif de bien des directions d’entreprise : réaliser des projets innovants qui les propulseront au niveau supérieur. Quelles sont les clés pour y arriver et les erreurs à éviter ? Discussion avec Geneviève Bouthillier, vice-présidente, moyennes entreprises privées, à la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ), qui pousse au quotidien des directions d’entreprise à réfléchir à leurs innovations.

Q. Réaliser un projet d’innovation comprend une part de risque, mais ne pas en faire est aussi un choix risqué d’après vous ?

R. « C’est plus risqué de ne pas innover que de le faire. Parce qu’on ne peut plus gérer son entreprise comme on le faisait il y a 50 ans. De plus, alors qu’on est en pénurie de main-d’œuvre, l’innovation est une façon d’attirer et de retenir ses employés. Et lorsqu’on parle d’innovation, on ne parle pas que de grosses technologies dispendieuses. C’est certain que les entreprises des secteurs technologiques doivent toujours rester à la fine pointe. Mais on peut aussi innover par son modèle d’affaires. Puis, il y a des technologies très dispendieuses, mais qui créent beaucoup de valeur dans les entreprises. Je pense par exemple à l’achat d’un système de gestion intégré [ERP en anglais pour enterprise resource planning] qui permet notamment de faire l’inventaire en temps réel et de commander automatiquement des produits selon les besoins. Le risque d’aller vers une telle innovation n’est pas lié à la technologie, mais à son implantation. »

Q. Il faut tout de même parfois oser se lancer, comme entreprise, dans le développement de nouveaux produits plus révolutionnaires, plus risqués. Quel type d’erreurs voyez-vous souvent dans ce genre de projet ?

R. « Oui, on voit des entreprises se lancer dans de grands projets technologiques plus risqués. Une erreur que nous voyons souvent, c’est que l’entreprise ne va pas suffisamment tester son idée. Il ne faut pas attendre d’avoir investi des sommes astronomiques et que le produit soit considéré comme parfait avant d’aller le montrer aux clients et aux fournisseurs. Il faut privilégier la méthode agile, donc les petits pas. Ainsi, l’équipe qui développe le produit voit lorsqu’elle fait des erreurs, puis elle s’ajuste rapidement. Lorsqu’une entreprise est à l’écoute comme ça de son marché, elle réduit le risque. »

Q. Quels sont les autres éléments incontournables auxquels il faut penser pour réussir un projet d’innovation ?

R. « La gestion du changement est souvent difficile et nous challengeons beaucoup les entreprises sur cet élément. Il faut réfléchir aux façons les plus efficaces d’arriver à amener les employés et les clients à adopter les nouvelles façons de faire. Il y a aussi bien sûr l’aspect gestion des coûts. Il faut bien structurer le projet. Puis, il faut sécuriser des sources d’approvisionnement. Parce que c’est bien beau de créer un nouveau produit, mais il faut avoir la matière première pour le faire. »

Q. Comment fonctionnez-vous pour trouver les nouvelles entreprises dans lesquelles vous investissez ?

R. « Plusieurs petites entreprises arrivent chez nous justement par les fonds de capital de risque. Notre équipe de technologies est assise à leurs côtés, les regarde de près et peut investir dans certaines. Puis, mon équipe de moyennes entreprises suit leur évolution et les prend lorsqu’elles sont prêtes. Ensuite, elles peuvent aller vers le groupe de grandes entreprises. Il y a aussi toujours des entreprises qui viennent directement nous voir, ou encore, nous les approchons. »