Problème: si la réponse est oui, vous n'êtes probablement plus en mesure de la donner.

C'est pourquoi il vaut mieux prendre les précautions nécessaires et rédiger un mandat en prévision d'inaptitude quand il en est encore temps.

Dans le cadre d'une démarche de planification successorale intégrée, par exemple.

Qu'est-ce que l'inaptitude?

L'inaptitude se définit par l'incapacité de prendre soin de soi-même ou d'administrer ses biens. Partielle ou totale, temporaire ou permanente, elle peut être le résultat d'un grave accident, d'une maladie dégénérative, d'une maladie mentale, d'un accident vasculaire cérébral...

Pas de mandat? Qu'est-ce qui arriverait si...?

«Dans l'hypothèse où il n'y a pas de mandat, c'est le Code civil qui va s'appliquer», explique Danielle Beausoleil, notaire, associée de l'étude Prud'homme Fontaine Dolan. «On va devoir convoquer une assemblée de parents. Ils vont devoir nommer un curateur et trois personnes qui auront pour fonction de surveiller le curateur dans la gestion des biens.»

Selon le degré de gravité et de permanence de l'inaptitude et l'importance des actifs à gérer, les proches pourront demander l'ouverture d'un régime de conseiller au majeur (difficultés avec certaines tâches ou décisions), de tutelle (inaptitude partielle ou temporaire) ou de curatelle (inaptitude totale et permanente). Si personne ne prend cette responsabilité, elle échouera au Curateur public du Québec.

À quoi sert le mandat en cas d'inaptitude?

Dans un mandat en cas d'inaptitude, vous désignez la ou les personnes de confiance qui prendraient soin de vous et administreraient vos biens si vous deveniez inapte.

Vous désignez un mandataire à la personne qui veillera à votre bien-être physique et moral, et un mandataire aux biens qui prendra en main la gestion de vos possessions. Il peut s'agir de la même personne.

Pour la gestion de vos biens, vous pouvez donner un mandat de simple administration - paiement des factures, de l'hypothèque, suivi des comptes bancaires - ou de pleine administration, dans lequel cas le mandataire peut également prendre des décisions d'investissement ou de vente d'actifs.

Un exemple

Veuve et sans enfant, Ella Tautou Blier souffre d'alzheimer. Du vivant de son mari, elle avait rédigé un mandat en cas d'inaptitude dans lequel elle le nommait mandataire. Il est mort depuis, mais elle avait sagement pris la précaution d'inscrire un neveu et une nièce comme mandataires de remplacement. Ce sont donc eux qui demanderont l'homologation du mandat et s'assureront que ses instructions et volontés sont respectées.

Qui peut le rédiger?

Un mandat en cas d'inaptitude peut être rédigé par un notaire ou un avocat. Il sera déposé au registre des mandats de leur ordre professionnel respectif. Le notaire profite le plus souvent de la rédaction d'un testament pour aborder la question du mandat en cas d'inaptitude.

Vous pouvez également rédiger vous-même votre mandat. Outre votre signature, il devra porter celles de deux témoins - non visés par le contenu du mandat -, qui attestent que vous êtes sain d'esprit. Un proche devra conserver le document original pour le produire si besoin est.

Un modèle

Le Curateur public du Québec propose un guide et un modèle de mandat sur son site: https://bit.ly/1ynawTp

«Ce qui manque à ce document, c'est le conseil juridique», souligne Danielle Beausoleil. Autre inconvénient: «Lorsque vient le moment de faire homologuer le mandat, si les témoins sont introuvables ou décédés, ou si l'original du document est introuvable, on se retrouve comme s'il n'y avait rien.»

Ce n'est pas le cas du mandat notarié, conservé par le notaire et inscrit au répertoire de la Chambre des notaires.

Comment l'inaptitude sera-t-elle constatée?

L'inaptitude doit d'abord être confirmée à la suite d'une évaluation médicale et d'une évaluation psychosociale (contactez le CSSS local).

Le mandataire demandera ensuite l'homologation du mandat par un greffier ou un juge de la Cour supérieure. Un notaire ou un avocat pourra se charger de cette démarche.

Quand faut-il rédiger un mandat?

«Dès qu'on a 18 ans, répond Danielle Beausoleil. J'ai vu l'exemple d'un client dont le fils de 23 ans avait fait une tentative de suicide. Quand le père est arrivé à l'hôpital, il n'avait aucune autorité pour parler aux psychiatres, médecins, etc. S'il y avait eu un mandat en cas d'incapacité qui lui permettait d'agir au niveau de la personne, il aurait pu avoir de l'information plus rapidement.»

Quand faut-il le réviser?

«Comme tout document juridique, on doit au moins relire son mandat tous les cinq ans», conseille Danielle Beausoleil. Il sera nécessaire de le réviser lors des changements importants: enfants qui atteignent leur majorité et qui pourraient dorénavant être mandataires, mort du conjoint, divorce...

Yves Aussant-Sauvé a subi un AVC qui l'a laissé en vie, mais partiellement inapte. Heureusement, il avait signé un mandat en prévision de l'inaptitude. Plus heureusement encore, il l'avait révisé après 2006.

«Le mandat doit également traiter de l'incapacité partielle, insiste Me Danielle Beausoleil. Vers 2006, un jugement important a permis, en cas d'incapacité partielle, qu'on puisse faire homologuer le mandat et avoir les pouvoirs nécessaires de représentation. Avant 2006, les mandats n'avaient pas cette section.»

Jusqu'alors, les mandats n'étaient homologués que pour les inaptitudes totales et permanentes.

Que serait-il arrivé à Yves Aussant-Sauvé si son mandat n'avait pas inclus cette clause?

«Si la personne est par exemple partiellement inapte à sa personne, mais totalement inapte à l'administration de ses biens, on serait obligé de faire une tutelle au majeur ou une curatelle privée», explique Danielle Beausoleil.

Un autre sujet réjouissant: comment voudriez-vous être soigné en fin de vie? Vous pouvez décrire vos choix dans un document appelé indifféremment testament biologique, directives de soins en fin de vie ou testament de fin de vie. Vous y décrirez les soins médicaux que vous souhaitez ou non recevoir dans vos derniers moments, dans l'éventualité où vous ne seriez plus en mesure de l'exprimer vous-même - des instructions relatives à la chimiothérapie, la réanimation ou à la survie artificielle, par exemple.

Second chapitre, vous pouvez également y inscrire vos volontés en regard du soulagement de la douleur.

Les directives de soins en fin de vie doivent être datées et signées, préférablement devant témoins, mais elles n'ont pas besoin d'être rédigées par un juriste. Vos proches doivent savoir que le document existe et où le trouver si nécessaire.

La loi concernant les soins de fin de vie, qui prévoit la création d'un registre des directives médicales anticipées, entrera en vigueur en décembre 2015.

L'Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité propose un exemple de directives de soins de fin de vie: https://bit.ly/1AX7eJ8

Vous songez à donner un organe quelconque - un des vôtres, de préférence? Une planification testamentaire est le bon moment de trancher la question. Il existe trois principales manières d'y consentir et de le faire savoir.

> Demandez à votre notaire de consigner vos intentions (don ou refus de don) dans votre mandat en prévision de l'inaptitude. Il en fera ensuite l'inscription dans le Registre des consentements au don d'organes et de tissus de la Chambre des notaires du Québec.

> Remplissez le formulaire pour une inscription au Registre des consentements au don d'organes et de tissus de la Régie de l'assurance maladie du Québec. Depuis le 17 octobre dernier, ce formulaire est téléchargeable sur le site de la RAMQ: https://bit.ly/1FwAFS1

> Signez et apposez au dos de la carte d'assurance-maladie l'autocollant qui est joint à l'avis de renouvellement de la carte.