Plutôt que de construire de nouveaux barrages, plusieurs souhaitent qu'Hydro-Québec investisse davantage dans l'efficacité énergétique. Équiterre avait d'ailleurs fait des recommandations en ce sens l'été dernier, en plus de suggérer que la société d'État coordonne son réseau avec celui complémentaire de l'Ontario. Or, depuis quelques semaines, les grands consommateurs industriels ne sont plus admissibles aux subventions d'Hydro-Québec pour des projets d'efficacité énergétique. Qu'est-il advenu de ces recommandations ?

Hydro-Québec a économisé 5,3 térawattheures (TWh) depuis 2003 et la société d'État a comme objectif d'atteindre 11 TWh en 2015.

«Nous renouvelons constamment nos programmes d'efficacité énergétique pour atteindre l'objectif. Nous venons d'ailleurs de revoir ceux destinés à la clientèle d'affaires pour qu'ils soient plus accessibles et plus simples à utiliser», indique Louis-Olivier Batty, porte-parole d'Hydro-Québec.

Il n'y a toutefois pas eu d'augmentation dans les subventions accordées. Pourtant, selon Équiterre, Hydro-Québec ne devrait pas hésiter à investir davantage.

«C'est l'efficacité énergétique qui a le moins d'impact sur l'environnement et plusieurs programmes coûtent autour de 4 cents le kilowattheure, alors que les nouveaux projets hydroélectriques coûtent plus cher», affirme Steven Guilbeault, coordonnateur général adjoint d'Équiterre.

Les grands consommateurs industriels

Steven Guilbeault croit que pour obtenir les résultats les plus rentables et les plus rapides, il faut viser les grands consommateurs industriels.

«Il faut bonifier les programmes d'efficacité énergétique pour amener davantage de participation. Cela exigerait un investissement, mais engendrerait des retombées importantes en libérant énormément d'énergie qu'Hydro-Québec pourrait exporter à fort prix.»

Or, depuis mars, les grands consommateurs d'énergie qui bénéficient de contrats spéciaux ne sont plus admissibles aux programmes de subventions d'Hydro-Québec en efficacité énergétique pour les bâtiments et les systèmes industriels.

La société d'État justifie ce choix par le plus récent décret qui «traduit la volonté du gouvernement d'assujettir dorénavant les bénéficiaires de contrats spéciaux à des obligations relatives à l'efficacité énergétique sans égard à l'existence ou non de programme à cet effet».

Jean Simard, président-directeur général de l'Association de l'aluminium du Canada, affirme pourtant que les alumineries avaient déposé de nombreux projets en efficacité énergétique chez Hydro-Québec et qu'ils sont tous tombés à l'eau avec la fin des subventions.

«En plus, cette décision arrive alors que le gouvernement planche sur son plan d'action en matière de changements climatiques. On nous demandera de contribuer, mais on ne nous en donnera pas les moyens», déplore-t-il.

Au ministère des Ressources naturelles et de la Faune, on affirme que le gouvernement ne s'ingère pas dans la gestion des programmes d'Hydro-Québec.

«Par contre, le gouvernement fixe des objectifs en matière d'efficacité énergétique à Hydro-Québec et il est de 11 TWh pour 2015, ce qui est ambitieux», indique Marie-France Boulay, attachée de presse de la ministre Nathalie Normandeau.

Entente avec l'Ontario

Pour ce qui est d'une meilleure coordination des réseaux du Québec et de l'Ontario, c'est toujours la voie défendue par Équiterre.

«Les périodes de pointe de consommation au Québec sont l'hiver avec le chauffage et l'été en Ontario avec la climatisation. Hydro-Québec pourrait importer de l'électricité de l'Ontario en hiver et lui en exporter l'été», explique Steven Guilbeault.

Pourquoi privilégier l'Ontario plutôt que les États-Unis?

«On ne retrouve pas dans le Midwest américain comme en Ontario la volonté d'éliminer l'énergie produite à partir du charbon», affirme-t-il.

La signature d'une entente n'est toutefois pas dans les projets d'Hydro-Québec.

«Le marché de l'électricité est ouvert et il est régi par des règles strictes. Nous avons l'intention d'augmenter nos échanges avec les États-Unis et l'Ontario, mais ils se feront selon les conditions et les règles des marchés», affirme M. Batty.