Même s'ils ont décidé de vendre leurs deux entreprises, Hélène Doucet et Steve Levasseur sont encore loin de la retraite complète. D'une part, ils viennent de mettre en place un processus de relève pour vendre leur verger et leur vinaigrerie de Frelighsburg à leur fille Stéphanie. D'autre part, ils se sont engagés à suivre et à épauler les deux couples de jeunes Montréalais qui ont acheté leur verger et leur cidrerie situés à Dunham.

Dans le monde de la vente et de l'achat d'entreprises, les Doucet-Levasseur font presque figure d'exceptions. Bon nombre d'entrepreneurs vendent leur PME et laissent bien souvent le ou les repreneurs se débrouiller seuls. C'est du moins la réalité au Québec, note Louise Cadieux, professeure en management à l'Université du Québec à Trois-Rivières. «En France, une loi exige au cédant d'accompagner le repreneur», dit-elle.

Dans le cas qui nous intéresse, ce n'est pas seulement Hélène Doucet et Steve Levasseur qui vont donner un coup de main aux repreneurs; leur fille Stéphanie également, même si elle a fort à faire avec l'entreprise qu'elle reprend de ses parents. Ainsi, Anouschka Bouchard et Rémi Filion apprendront le b.a.-ba de la pomiculture et la cidriculture en compagnie de leurs prédécesseurs.

Deux ans d'accompagnement

Il a été convenu dans le contrat de vente que les vendeurs s'engagent à prêter main-forte aux repreneurs pour une période d'environ deux ans. C'est tant mieux, car les nouveaux proprios du verger et de la cidrerie Fleurs de pommiers à Dunham ne connaissaient, jusqu'à tout récemment, strictement rien à la culture de la pomme et encore moins à la transformation.

Anouschka Bouchard, 38 ans, a travaillé dans le secteur de l'édition. Même si son conjoint est actionnaire de l'entreprise nouvellement acquise, il a choisi de conserver son emploi régulier. Idem pour la conjointe de Rémi Filion, 37 ans, qui elle aussi conserve son emploi. C'est donc un représentant de chaque couple qui travaillera au verger, à la cidrerie, de même qu'au stand situé sur la route 202, en plein coeur de la route des vins de Brome-Missisquoi.

«On n'est pas sans filet», avance Rémi Filion qui, à l'instar de ses coactionnaires, était à la recherche d'un «nouveau défi». Ses nombreux voyages d'affaires à l'étranger (qui le tenaient loin de sa famille) ont été l'élément déclencheur, dit-il.

Même s'ils ne connaissaient rien à l'agriculture en général, Anouschka Bouchard et Rémi Filion n'ont pas chômé durant les neuf mois qu'a duré le processus d'acquisition. Jusqu'en juin dernier, ils ont suivi des cours à l'Institut de technologie agroalimentaire de Saint-Hyacinthe sur la transformation et la production en champ. «Les agriculteurs qui étaient dans nos cours étaient curieux de nous voir. Ils nous posaient beaucoup de questions. Et nous aussi nous leur en posions. Il y avait une grande ouverture d'esprit», note M. Filion.

Ils ont également visité plusieurs cidreries, dont Le Domaine Pinnacle, la Face cachée de la pomme et la cidrerie Michel-Jodoin. «En neuf mois, on a mis les bouchées doubles pour être prêts. On a tout attaqué de front. La culture en champ, la transformation, mais aussi la commercialisation», affirme Anouschka Bouchard.

En plus de pouvoir compter sur l'expertise de la famille Levasseur, les nouveaux propriétaires de la cidrerie se sont également entourés de deux agronomes et de deux oenologues. Ils ont également mis sur pied un comité consultatif composé de trois membres provenant de différents milieux: un vigneron d'expérience, un ancien employé de la SAQ qui compte 35 ans de métier, de même qu'une personnalité du monde des affaires.

En puisant dans leur bagage professionnel respectif, Anouschka Bouchard et Rémi Fillion auront d'autres atouts dans leur jeu. À n'en point douter, leur nouvelle entreprise devrait connaître beaucoup de succès.