La production d’aluminium au Québec génère des milliers de tonnes de rebuts qui, jusqu’ici, ne pouvaient être que partiellement recyclées. Une entreprise familiale de Baie-Comeau, Lefebvre Industri-AL, a développé dans les dernières années une technologie qui permet de recycler complètement les résidus d’aluminerie de manière écologique.

Fondée en 2001, Lefebvre Industri-AL se spécialisait à l’origine dans la préparation de produits d’alliage pour le compte d’un seul client, l’aluminerie Alcoa de Baie-Comeau. Ce modèle d’affaires avait le désavantage d’être très vulnérable face aux aléas des marchés internationaux. « Il y a eu des années où l’aluminium contenant des alliages était beaucoup moins en demande, donc on était peu solides comme entreprise », se souvient Joanne Lefebvre, directrice générale de l’entreprise.

Pour diversifier ses activités, Industri-AL s’est donc tournée vers le recyclage des résidus d’aluminerie, une activité aux débouchés beaucoup plus constants. Grâce à des subventions du gouvernement du Québec, elle a mené des recherches et développé depuis 2014 un procédé de revalorisation des résidus d’aluminerie, plus efficace et plus écologique que celui de ses concurrents.

PHOTO FOURNIE PAR LEFEBVRE INDUSTRI-AL

Joanne Lefebvre, directrice générale de Lefebvre Industri-AL

On l’a fait à notre rythme, vu qu’on est quand même une PME familiale à Baie-Comeau, mais on l’a fait quand même.

Joanne Lefebvre, directrice générale de Lefebvre Industri-AL

Il faut savoir que la production d’aluminium génère des rebuts chimiques dont les alumineries doivent se débarrasser, si elles ne trouvent pas un moyen de les recycler. Le plus significatif de ces résidus est l’écume, une couche de métal en partie oxydée qui se forme à la surface de l’aluminium fondu.

Une petite proportion seulement de l’aluminium se perd dans l’écume lors de la production, mais cela finit tout de même par représenter des quantités considérables : Lefebvre Industrie-AL traite chaque année environ 5000 tonnes d’écume de l’aluminerie de Baie-Comeau, qui produit au total 280 000 tonnes d’aluminium. Sachant que l’aluminium se négocie actuellement à plus de 3500 $ la tonne, on comprend qu’il y ait un réel intérêt économique à récupérer le plus de métal possible.

Une méthode écologique

La plupart des entreprises qui recyclent déjà l’écume utilisent des méthodes chimiques qui ne réussissent qu’à recycler de 50 à 70 % de l’aluminium qu’elle contient, selon la PME québécoise. En plus, il subsiste des déchets toxiques qu’il faut payer pour enfouir.

L’écume est souvent recyclée aux États-Unis, parce que les lois sont plus permissives qu’au Québec par rapport à l’enfouissement.

Joanne Lefebvre, directrice générale de Lefebvre Industri-AL

« Nous, on réussit à recycler 100 % de ce qui sort de l’aluminerie, et tout peut être réutilisé. C’est vraiment ça, le côté innovant de notre procédé », s’enthousiasme-t-elle. Lefebvre Industri-AL produit aussi beaucoup moins de gaz à effet de serre (GES) que ses concurrents, car elle utilise l’hydroélectricité pour chauffer son aluminium au lieu du mazout.

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Lefebvre Industri-AL compte une vingtaine d’employés.

L’entreprise, qui compte une vingtaine d’employés, ne revend pas elle-même son aluminium sur le marché : elle le renvoie plutôt directement à l’aluminerie, qui peut l’exporter après l’avoir mélangé avec l’aluminium qu’elle produit déjà. « Notre aluminium est aussi pur, parfois plus, que l’aluminium produit au départ », vante Joanne Lefebvre.

Projets d’expansion

Pour le moment, Industri-AL est présente seulement à Baie-Comeau, mais sa directrice générale envisage sérieusement de s’installer ailleurs au Québec. Ce serait peut-être d’ailleurs déjà fait, si la pandémie n’était pas venue contrecarrer ses plans. « Je pense que la journée où ils ont annoncé qu’ils fermaient toutes les entreprises, nous, on mettait nos procédés en marche », se désole-t-elle.

« Nos plans ont été un peu freinés par la pandémie, mais aujourd’hui, on est prêts à montrer les progrès qu’on a faits les cinq dernières années. Tous les objectifs qu’on s’était fixés en commençant, on les a atteints », souligne avec confiance Joanne Lefebvre. « Il y a déjà d’autres alumineries qui cognent à la porte. »