Imaginez que, d'un coup de baguette magique, tous les contenus irritants sur l'internet disparaissaient. Finis les articles sur Donald Trump, Kim Kardashian et autres vidéos de chats.

C'est exactement le fantasme que TrumpKard, offerte en prélancement depuis le 12 avril dernier, concrétise. L'entreprise montréalaise derrière ce projet, Lunaar, est dirigée par Robert Gold, cofondateur du site de commerce en ligne Beyond The Rack. Lunaar, une filiale de Wajam Internet Technology, compte déjà une douzaine de sites et huit applications mobiles, qui totalisent quelque 100 millions d'impressions chaque mois. On y trouve un peu de tout, des sudokus aux conseils de cuisine en passant par les potins de stars, les « skins » de Minecraft et, depuis 10 jours, TrumpKard.

Le lien entre tous ces produits ? « S'il y a quelque chose que vous voulez sur votre ordinateur ou votre tablette, on va tenter de l'offrir », résume Pierre Cléaud, vice-président marketing de Lunaar. « Les composantes majeures de Lunaar, c'est de répondre à des besoins, pas de les créer. »

Un exemple à venir de cette philosophie : le lancement d'un « nettoyeur de PC », qui permettra d'éliminer de son ordinateur les logiciels indésirables qui le ralentissent.

CINQ MOIS DE TRAVAIL

TrumpKard (trumpkardapp.com) est une simple extension gratuite qu'on ajoute au navigateur Chrome - les autres navigateurs seront compatibles sous peu. On peut ensuite configurer son filtre avec des mots-clés pour ne plus voir, quelle qu'en soit la raison, certains contenus sur l'internet. Les noms de Donald Trump et Kim Kardashian y sont déjà inclus mais peuvent être désactivés. Si la curiosité est trop forte, on peut cliquer sur les contenus filtrés pour les voir apparaître.

L'application fonctionne parfaitement, fruit du labeur de « six personnes pendant les cinq derniers mois » et d'un demi-million de dollars investis, indique en entrevue M. Gold. Il existe certes déjà des extensions et des applications permettant de filtrer certains contenus. « Mais nous, on n'impose aucun nom, ce sont les gens qui choisissent », précise-t-il.

L'idée de TrumpKard est née lors d'une discussion d'équipe chez Lunaar.

« Il y a quelques mois, il était beaucoup question de bloqueurs de publicité et un des employés a demandé aux autres ce qui les agaçait sur l'internet, à part la pub. J'ai été fasciné par le nombre de réponses différentes. »

- Pierre Cléaud, vice-président marketing de Lunaar

Le nom de l'application est bien sûr inspiré par le milliardaire et candidat à l'investiture républicaine Donald Trump. Mais il s'agit également d'un jeu de mots basé sur l'anglais, une « trump card » étant l'atout, la carte maîtresse, le « Joker » qui bat les autres... ou les empêche de s'afficher sur un navigateur web.

UTILISATIONS INATTENDUES

On reproche souvent aux algorithmes utilisés fréquemment sur l'internet, notamment chez Facebook, de n'offrir aux utilisateurs que du contenu qui les conforte dans leurs opinions. TrumpKard ne va-t-elle pas encore plus loin en cachant carrément tout contenu irritant ? « C'est une question très actuelle, reconnaît M. Cléaud. On se dit que, de toute façon, c'est ce que les gens font déjà. Si vous voulez de l'information et que vous êtes de gauche, vous allez lire Le Monde et Libération, et Le Figaro si vous êtes de droite. »

Testée en petits groupes depuis quelques semaines, lancée discrètement il y a 10 jours, TrumpKard est parfois utilisée de façon inattendue, souligne le vice-président. « On s'est rendu compte que quelqu'un bloquait le Canadien de Montréal, parce qu'il enregistrait les matchs et ne voulait pas connaître le résultat. On n'y avait pas pensé ! »

L'extension gratuite n'affiche aucune publicité et ne renvoie vers aucun commanditaire. Comment prévoit-on atteindre la rentabilité ? « Le plan d'affaires est d'offrir quelque chose de cool qui aide les gens, répond Robert Gold. Si nous pouvons fournir ce service, la monétisation viendra après. Ce n'est pas tout, l'argent, l'important est de créer un écosystème que les gens vont aimer. »

QUI : Robert Gold et une cinquantaine d'employés, dont 10 affectés à TrumpKard

L'IDÉE : un filtre qui masque tout contenu indésirable sur l'internet

L'AMBITION : susciter « le plus de téléchargements possible », tester la solidité technologique avant d'envisager la monétisation

ILS Y CROIENT ET Y ONT INVESTI DE L'ARGENT : Robert Gold et Martin-Luc Archambault

Saisie d’écran du site LaPresse.ca

Avant TrumpKard

Saisie d’écran du site LaPresse.ca

Après TrumpKard