Après s'être colletaillées au cours des cinq dernières années à une économie chancelante et à un dollar canadien ragaillardi, les PME manufacturières du Québec vont mieux, et entrevoient même l'année qui vient avec optimisme.

C'est sans trop de regrets que les PME du Québec viennent de tirer un trait sur 2013, l'année qui a affiché la plus faible croissance à l'étranger depuis la fin de 2007 avec ses 2,9%.

La situation devrait toutefois s'améliorer en 2014, souligne Mathieu Arsenault, économiste principal à la Financière Banque Nationale. «On s'attend à ce qu'il y ait une accélération l'an prochain», explique le spécialiste.

Selon lui, 2013 a été marquée par l'un des plus grands freinages fiscaux de l'histoire de la part des gouvernements, et une partie de ces mesures devrait prendre fin au cours des mois à venir, ce qui invitera de nouveau la croissance.

La prédiction se vérifiera notamment au sud de la frontière, souligne-t-il. «En 2013, les États-Unis ont eu une croissance de 1,8% malgré les mesures de frein fiscal. On peut croire que le secteur privé américain aurait pu croître probablement au-delà de 3% sans cet effet de frein-là. On pense que la croissance pourrait s'accélérer.»

Combinée à un dollar canadien qui devrait, selon la Banque Nationale, séjourner autour des 90 cents américains au cours des prochains mois, la situation économique américaine devrait accueillir un nombre croissant de livraisons en provenance des exportateurs québécois.

Mais encore faudra-t-il que ces derniers soient au rendez-vous, souligne Simon Prévost, président de Manufacturiers et exportateurs du Québec. «La valeur du dollar canadien, c'est la cerise sur le gâteau, dit-il. Mais avant, il faut avoir le goût de manger le gâteau.»

Retour aux États-Unis

C'est qu'avec le ralentissement de l'économie américaine, plusieurs PME manufacturières du Québec ont déplacé leurs affaires du côté de l'Ontario et de l'Ouest canadien depuis 2008, explique Pierre Cléroux, vice-président à la recherche et économiste en chef de la Banque de développement du Canada. «Maintenant, c'est vraiment le moment de retourner vers le marché américain et de reprendre des parts de marché là-bas», ajoute-t-il.

Les PME qui exportent déjà leurs produits et services seraient d'ailleurs celles qui se montrent les plus optimistes en vue de la prochaine année, ajoute le spécialiste. «Ce que je vois sur le terrain, c'est que les entreprises qui exportent sont beaucoup plus confiantes que les entreprises qui sont simplement dans le marché québécois ou canadien», dit-il.

Outre les États-Unis, les économies des pays émergents représenteront encore en 2014 des marchés à cibler par les fabricants du Québec. Selon la Financière Banque Nationale, la croissance globale de l'économie de ces pays devrait avoisiner les 4,6% l'an prochain.

De nouvelles catégories de PME pourraient désormais s'intéresser à ces économies, notamment à celle de la Chine, qui se déplace progressivement vers une économie de consommation, souligne Mathieu Arsenault. «La quantité d'urbains chinois pourrait augmenter de 300 millions d'ici 2030, dit-il. Tout ce processus d'urbanisation est une source de croissance économique assez incroyable. Pour le Canada, dans son ensemble, c'est quelque chose de positif.»

Libre-échange avec l'Europe

En ce qui concerne l'Europe, qui sort à peine de récession, les perspectives sont moins roses pour l'instant, souligne toutefois la Financière. N'empêche, la concrétisation éventuelle d'une entente de libre-échange entre le Canada et l'Union européenne devrait offrir de nouveaux canaux pour nombre de PME manufacturières québécoises, croit Simon Prévost.

Selon lui, bien que l'entente finale risque de ne pas être ratifiée avant 2015, les PME du Québec doivent dès maintenant préparer le terrain. «Dix-huit à vingt-quatre mois, c'est le temps que ça prend pour trouver un distributeur et négocier des ententes, souligne-t-il. Il n'y a pas de temps à perdre.»

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DES PME CONFIANTES POUR 2014

Selon les spécialistes, l'horizon économique devrait s'éclaircir en 2014 pour nombre de PME manufacturières québécoises. Cinq d'entre elles nous expliquent leurs objectifs, ou «résolutions», pour l'année qui vient.

Virage Simulation

Après avoir déniché ses premiers clients aux quatre coins de l'Amérique du Nord, le fabricant de simulateurs d'automobiles et de camions a posé un premier pied au Brésil en 2013 en y vendant deux unités. «C'est parti là-bas pour nous», lance avec enthousiasme Rémi Quimper, président de Virage Simulation. C'est toutefois le marché américain qui occupera surtout l'entrepreneur au cours des prochains mois. «Il faut augmenter notre force de frappe et notre présence là-bas, explique-t-il. La confiance est revenue chez ses partenaires d'affaires. On voit que le marché bouge», dit-il.

Groupe Meloche

Groupe Meloche n'est pas prêt de terminer la poussée de croissance qui devrait à terme l'amener au rang de fournisseur Tier-2 dans l'industrie aéronautique. L'entreprise spécialisée dans l'usinage de pièces pour les secteurs de l'aéronautique et militaire compte accroître sa capacité de production en 2014. Une augmentation qui viendra non seulement d'investissements dans l'automatisation de ses équipements, une affaire de 6 millions de dollars, mais qui pourrait aussi «prendre la forme d'une acquisition », explique le président du Groupe, Hugue Meloche.

Automatex

C'est avec enthousiasme que Chuck de Sousa envisage les prochains mois. «Les affaires devraient être très bonnes», souligne le directeur du développement des affaires d'Automatex, fabricant d'appareils automatisés destinés à l'industrie du textile. Après avoir délaissé les États-Unis dans les années 2000 pour gagner le Brésil, la Turquie et la Russie, entre autres, l'entreprise cherchera cette année à accroître sa place en Asie, surtout en Inde et en Chine. «Notre résolution principale pour 2014, c'est de maximiser notre ratio investissement/ventes», ajoute Chuck de Sousa.

Équipements Nita

L'année 2014 devrait être faste pour Équipements Nita, un fabricant de convoyeurs pour imprimeurs industriels qui tire déjà 80% de ses revenus des États-Unis. «On a pratiquement doublé nos chiffres cette année, et on veut les doubler encore», s'enthousiasme Normand Lord, président de cette PME de Terrebonne. Pour arriver à ses fins, il dit avoir revu sa stratégie de croissance. «On a constaté qu'on pourrait percer davantage si on soutenait mieux nos canaux de vente, dit-il. On a donc refait nos outils de marketing.» En janvier, M. Lord ira aux États-Unis pour présenter ses nouvelles fiches techniques à ses distributeurs.

Industek

Après avoir doublé la superficie de ses installations de production, et fait passer son nombre d'employés de 21 à 36, l'entreprise de Victoriaville Industek consacrera l'année 2014 à remplir essentiellement un objectif: gagner en productivité. «On n'a pas le choix, explique Louis Roy, président d'Industek. Les investissements sont faits, maintenant il faut améliorer nos méthodes de travail et réduire le temps de fabrication.» Le fabricant d'équipements de gestion des matières résiduelles souhaite mieux se positionner sur son propre marché avant d'accroître ses activités en Ontario et aux États-Unis.