On parle d'approche Lean, de Kaizen, de méthode Toyota... comment s'y retrouver? Quels sont les avantages? Qui peut en bénéficier? Deux spécialistes expliquent.

«D'abord, il faut savoir que les deux approches, Lean et Kaizen, proviennent de Toyota», affirme Saibal Ray, professeur à la faculté de gestion Desautels de l'Université McGill.

«En français, à la place de Lean, on parle de production à valeur ajoutée. C'est une philosophie d'amélioration des façons de faire dans une entreprise qui élimine toutes les formes de gaspillage et les choses inutiles», explique Isabelle Boyer, consultante en amélioration de la productivité et présidente d'InnovAction Groupe-Conseil.

Il peut être question de gestes très simples à faire.Souvent, la première chose à faire dans une entreprise, d'après le professeur Ray, c'est d'organiser son espace de travail pour être certain que lorsqu'on a besoin de quelque chose, on sait exactement où le trouver. Il donne l'exemple des mécaniciens.

«Souvent, les gars mettent leurs outils n'importe où, affirme-t-il. Lorsqu'ils en ont besoin d'un, ils ne le trouvent pas, donc ils en achètent un autre. Commencer par prendre le temps de bien organiser son espace de travail peut amener des résultats intéressants. Ensuite, on peut aller plus loin dans l'approche et on peut en venir à changer complètement les procédés de l'entreprise.»

L'approche Kaizen

Et l'approche Kaizen? «En français, on parle de principe d'amélioration continue. C'est une méthode de résolution de problèmes qui implique les employés», explique Mme Boyer.

«Les travailleurs connaissent bien leur job, donc l'idée, c'est de les amener à donner des suggestions pour améliorer la productivité», explique M. Ray.

Pour Isabelle Boyer, on peut toujours faire du Lean sans faire de Kaizen, mais elle considère que les deux approches vont ensemble.

«Pour éliminer les choses inutiles dans une entreprise pour avoir une production à valeur ajoutée, on a avantage à impliquer les employés pour trouver des solutions. Comme ça, on diminuera la résistance au changement, parce qu'on sait tous que si l'idée vient du boss, elle sera toujours plus contestée que si elle vient de l'équipe.»

Les résultats

Si une entreprise décide de prendre le virage de l'amélioration de la productivité à la japonaise, peut-elle s'attendre à avoir des résultats significatifs?

D'après le professeur Ray, ces approches peuvent être intéressantes pour tous les types d'organisation, de la banque à l'hôpital en passant par la multinationale, mais elle a un intérêt particulier pour les petites et moyennes entreprises parce que ces améliorations sont souvent très peu dispendieuses.

«Réduire, cela ne nécessite pas de gros investissements!» affirme-t-il en précisant que l'Université McGill organise des activités avec le Conference Board du Canada pour amener les PME québécoises à augmenter leur productivité avec ces méthodes.

Isabelle Boyer affirme pour sa part voir chez ses clients des résultats intéressants. «En moyenne, la productivité s'améliore de 10 à 30%.»

Productivité à la japonaise

1. Adopter la philosophie Lean

«Il faut faire connaître la stratégie aux employés», indique Isabelle Boyer.

2. Faire une activité Kaizen

«Le sujet peut être proposé par les employés ou par la direction et l'activité peut durer de quatre heures à cinq jours, dépendamment des besoins», poursuit-elle.

3. Adopter un plan d'action

4. Implanter les solutions

5. Faire le suivi

«Il faut vraiment faire le suivi pour s'assurer que le plan d'action est implanté comme il faut. Cette étape est très importante si on veut vraiment avoir des résultats et pourtant, c'est souvent la plus négligée des entrepreneurs», remarque-t-elle.

Une PME Kaizen raconte

Chez Caoutchoucs et Plastiques Falpaco, qui fabrique entre autres les pièces de plastique des Bixi, on a implanté le principe d'amélioration continue il y a une dizaine d'années.

«Nous avons commencé par regarder la disposition des machineries, puis d'autres aspects, comme l'ergonomie des postes de travail», affirme Claude Robichaud, propriétaire de Falpaco.

Et bien sûr, le processus est continu. «Les produits qu'on fabrique évoluent, les machines aussi, donc il faut toujours s'adapter», ajoute celui qui est également président du Groupement des chefs d'entreprise du Québec.

Dispendieux, tout cela? «Souvent, ce sont des petits trucs qui ne coûtent pas cher. C'est certain que ça prend des experts pour comprendre la méthode, mais si la perte de temps fait que ton prix de revient est 20% plus cher que la concurrence mondiale, tu n'auras jamais de contrats. C'est une question de survie», affirme-t-il.

Le chef d'entreprise remarque aussi que c'est extrêmement motivant pour ses employés.

«Il n'y a pas un employé qui n'aime pas participer à l'amélioration des procédés. Même si le changement peut être inconfortable au début, en fin de compte, ça leur simplifie la tâche. Aussi, ils sentent qu'on est à leur écoute.»

Fondée en 1975, Caoutchoucs et Plastiques Falpaco fabrique des produits sur mesure moulés par injection de plastique et de caoutchouc qu'elle vend dans une cinquantaine de pays.