François Simard est du genre tenace. Cet entrepreneur a investi 200 000$ de son propre argent et a consacré près de trois ans de sa vie à la commercialisation d'uniformes antimicrobiens destinés principalement au secteur de la santé. Malgré la qualité et la pertinence de son produit, son entreprise tire encore le diable par la queue. Mais le président de Protec-Style vient de s'associer avec un fabricant et distributeur québécois d'uniformes de travail qui, espère-t-il, va lui servir de bougie d'allumage.

«Je dois être trop en avance sur mon temps. Les gens trouvent important de se laver les mains et de se mettre un masque sur la bouche. Mais ça ne représente que 10% du corps. Porter des vêtements qui tuent les bactéries, ça n'intéresse personne. Pourtant, le tissu est un excellent vecteur de propagation», lance d'emblée François Simard.

Les récents épisodes d'éclosion du SRAS, de la grippe A (H1N1) et autres C. difficile ont fortement ébranlé la population. Résultat: on trouve des distributrices de savon antimicrobien ou de gel antiseptique non seulement dans chaque recoin des hôpitaux, mais aussi dans les commerces et les immeubles publics. Alors pourquoi les professionnels de la santé, tous secteurs confondus, ne portent-ils pas des vêtements qui tuent les microbes? demande François Simard.

Ingénieur chimiste de formation, M. Simard a été vice-président recherche et développement chez Stedfast. C'est pour le compte de cette entreprise de Granby, spécialisée dans les tissus-barrières (feu, chaleur, produits chimiques, balistique, etc.), qu'il aidé à la conception de la formule antimicrobienne Aviscen, dont il a acheté les droits en 2008.

Il est donc détenteur, dit-il, d'une formule chimique performante, de même que de son procédé d'application sur le textile. «Il existe des formules antimicrobiennes sur le marché, mais elles ne sont pas aussi performantes que la mienne, qui résiste à 100 lavages. Mon produit est à base d'eau et ne contient aucune composante métallique», explique M. Simard.

L'homme d'affaires a donc entre les mains, croit-il, une petite mine d'or. Le hic, c'est que personne ne le prend encore au sérieux, si ce n'est quelques bureaux de dentistes de la région montréalaise. Qui plus est, les banques refusent de lui prêter de l'argent.

«J'ai participé à des foires commerciales à Montréal et à Toronto (et donc dépensé des dizaines de milliers de dollars, NDLR). J'ai tout d'abord visé le secteur de l'hygiène buccale. Les associations professionnelles étaient intéressées, mais pas leurs membres», déplore François Simard.

Jusqu'à tout récemment, l'entrepreneur faisait fabriquer ses vêtements en petite quantité par un sous-traitant québécois. Pour ce qui est d'appliquer la formule antimicrobienne sur le textile, principalement du polyester, François Simard continue de faire appel à une entreprise québécoise qui travaille dans le textile. Il n'y a que le polyester, importé de Chine pour des raisons de prix et de disponibilité, qui n'est pas made in Québec.

Partenariat

En mars dernier, M. Simard a signé une entente de partenariat avec Uniformes ML de Saint-Jean-sur-Richelieu. Cette PME de 10 employés, propriété de la famille De Bien, fabrique ses propres produits et les distribue dans une vingtaine de boutiques spécialisées aux quatre coins du Québec.

François Simard croit avoir trouvé le bon partenaire qui lui permettra enfin d'envahir le marché des uniformes de travail destinés aux secteurs de la santé, de l'hôtellerie, etc., lesquels sont évalués, dit-il, à plusieurs millions de dollars au Québec seulement. Les uniformes antimicrobiens de Protec-Style se vendent de 55$ à 100$.

Comme les ventes de sa PME stagnent, François Simard doit continuer à travailler comme chimiste dans le secteur du textile. Ces temps-ci, il agit principalement à titre de consultant.

L'idée de se lancer en affaires est venue à François Simard le jour où sa fille, infirmière affectée aux urgences, est rentrée du travail avec son uniforme sur le dos. «Les tissus retiennent les microbes et les organismes pathogènes plus longtemps qu'on le croit. Je me suis dit qu'il fallait s'attaquer à ce problème», explique l'homme d'affaires qui, après le marché québécois, veut élargir sa présence dans le reste du Canada.