Les étudiants sont plus nombreux que jamais à travailler à temps partiel ou l’été. Doivent-ils produire une déclaration de revenus ? Est-ce que leurs parents seront pénalisés ? Deux experts déboulonnent certains mythes.

Question : J’ai gagné 2000 $ à l’été 2023, dois-je absolument faire ma déclaration de revenus ?

Réponse : Non.

Mais vos revenus ne disparaissent pas par magie. Si vous ne faites pas de déclaration de revenus, un de vos parents devra inscrire la somme que vous avez gagnée dans sa propre déclaration de revenus. « Le parent le mettra dans son enfant à charge. Et ce n’est pas un choix. Le parent doit déclarer les revenus de son enfant de toute façon », explique Luce Morin, CPA, propriétaire d’Activ services comptables et fiscaux, à Lachine.

« Si tu as moins de 18 ans, tu dois aussi vérifier si ton employeur a prélevé de l’impôt sur ta paye, souligne Luce Morin. Si c’est le cas, tu as avantage à faire ta déclaration de revenus pour aller rechercher ces sommes. »

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Luce Morin, CPA, propriétaire d’Activ services comptables et fiscaux

Prenons un jeune qui a gagné 6000 $ et a payé 300 $ d’impôts. Il n’a pas à payer d’impôts sur 6000 $ de revenus annuels, explique-t-elle. « S’il ne fait pas sa déclaration, il perd ces 300 $. »

« Si l’enfant ne fait pas lui-même une déclaration de revenus, l’impôt retenu n’est jamais récupéré », affirme Yannick Lemay, spécialiste de l’impôt chez H&R Block.

Pour l’année d’imposition 2023, un étudiant peut gagner jusqu’à 15 000 $ avant de devoir payer de l’impôt au Canada. Si vous avez gagné plus de 15 000 $, vous devez absolument faire votre déclaration de revenus.

Vous avez retiré des sommes du régime enregistré d’épargne-études (REEE) ? Vous devez absolument faire une déclaration de revenus. « Il y a une portion du retrait qui est considérée comme revenu imposable et l’institution financière va émettre un feuillet, le T4A, détaille Yannick Lemay. C’est important de se fier au montant du feuillet, parce qu’il peut y avoir une différence entre le montant du feuillet et le montant du retrait. »

À noter que l’employeur prélève sur la paye des cotisations pour l’assurance-emploi, le Régime québécois d’assurance parentale (RQAP) et, à partir de 18 ans, le Régime de rentes du Québec. Ce sont des sommes que vous réclamerez un jour si vous êtes au chômage et avez un enfant. La rente sera versée selon votre choix vers 65 ans.

J’ai travaillé en 2023, est-ce que mes parents vont payer plus d’impôts ?

Ça dépend.

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Les étudiants sont nombreux à avoir un emploi pour payer leurs petites dépenses.

« Quand l’enfant gagne un revenu, ça peut avoir un impact si le parent est seul, qu’il vit sans conjoint et qu’il reçoit le crédit pour personne à charge admissible, soutient Yannick Lemay. Dans la façon dont le crédit est calculé, le revenu de l’enfant vient diminuer le montant du crédit.

« Que l’enfant fasse ou non sa déclaration de revenus, le parent de famille monoparentale va quand même être pénalisé si son enfant travaille, parce que le parent doit entrer le revenu de l’enfant dans sa propre déclaration. »

Le montant du crédit remboursable au fédéral est 15 % de 15 000 $ en 2023, soit 2250 $, duquel on soustrait le revenu net de l’enfant.

« Si l’enfant fait 5000 $, par exemple, illustre Luce Morin, le crédit baisse de 5000 $ et descend à 10 000 $. Donc, la perte directe est le montant de revenu net de l’enfant multiplié par 15 %. Dans l’exemple mentionné ici, ce serait donc une baisse de 750 $. »

Le parent aurait 1500 $ de crédit d’impôt au lieu de 2250 $.

Quand un couple avec enfants se sépare et que chacun des conjoints n’a pas de nouveau conjoint officiel, ils sont considérés comme étant parents de famille monoparentale. « S’il n’y a qu’un enfant, on alterne pour donner le crédit une année au père, une année à la mère. Si le couple a deux enfants, chacun met un enfant sur sa déclaration pour avoir droit à ce crédit », précise Luce Morin.

Mes parents sont PDG et gagnent de gros revenus, ai-je droit au crédit de solidarité si j’ai 18 ans et plus et aucun revenu ?

Oui.

Le revenu des parents n’a aucun impact sur ce crédit, rappelle Yannick Lemay. Pour avoir droit au crédit d’impôt pour solidarité du gouvernement du Québec, il faut avoir eu 18 ans au 31 décembre 2023. Vous y aurez doit même si, à l’été 2023, vous aviez 17 ans.

Pour toucher à ce crédit, vos revenus ne doivent pas dépasser 53 000 $, une condition facile à réaliser pour un jeune étudiant.

« Le crédit est composé de trois éléments : TVQ, logement et village nordique. L’étudiant qui habite chez ses parents et ne paie pas de logement aura droit à la composante TVQ, ce qui représentera environ 346 $. »

Vous obtenez la même somme en gagnant de 15 000 $ à 41 000 $, ensuite le crédit commence à baisser.

Si vous habitez en appartement et avez des revenus de 15 000 $, le crédit s’élève à 1057 $.

Une personne qui habite dans un village nordique obtient 3097 $.

L’autre avantage pour un jeune de produire sa déclaration de revenus, c’est le crédit du fédéral pour la TPS.

Pour l’obtenir, il faut avoir 19 ans au moment du versement du crédit, soit en juillet 2024 ou les mois qui suivent jusqu’en juin 2025. « Ça veut dire que si l’enfant avait 17 ans en 2023, mais qu’il aura 19 ans avant juin 2025, ça vaut la peine qu’il fasse une déclaration de revenus pour bénéficier de ce crédit pour la TPS », précise Yannick Lemay.

À titre indicatif, le montant s’élevait à 496 $ pour l’année d’imposition 2022.

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Les emplois dans les dépanneurs sont souvent occupés par des étudiants.

J’ai 14 ans et je travaille au dépanneur, puis-je prendre des REER ?

Oui, mais c'est probablement mieux d'attendre.

Il n'y a pas d'âge minimal pour contribuer à un REER, mais avant 18 ans, il faut avoir des revenus.

« Par contre, avant qu’un enfant commence à prendre des REER, on va attendre qu’il gagne un bon revenu, sinon la déduction REER ne sera pas avantageuse, souligne Luce Morin. À moins que le jeune gagne 75 000 $. »

Dès 18 ans, il peut cependant prendre des CELI.

La meilleure stratégie est d’accumuler les droits et de prendre des REER lorsque la déduction sur les revenus sera intéressante.

Dois-je faire ma déclaration juste pour réclamer mes frais médicaux ?

Non.

Il vaut mieux mettre les frais médicaux de toute la famille dans une seule déclaration de revenus, explique Yannick Lemay.

« On rassemble tous les frais médicaux, comme les ordonnances, les visites chez le dentiste, le psychologue, et, à ce total, on soustrait 3 % du revenu net du père ou de la mère. »

Souvent, les frais médicaux sont mis dans la déclaration du parent qui a le plus faible revenu net, car c’est ce qui est le plus avantageux.

Si le montant total des frais médicaux de la famille s’élève à 4000 $, par exemple, et que le revenu net d’un parent est de 50 000 $, on calcule dans un premier temps 3 % de ce revenu. Ce qui donne 1500 $. Puis on soustrait 1500 $ de 4000 $. Le crédit réclamé pour frais médicaux sera donc de 2500 $.

« L’enfant peut réclamer ses propres frais médicaux et les parents réclamer seulement les leurs, mais c’est plus optimal de déduire tout dans une seule déclaration », affirme Yannick Lemay.

Lorsqu’on utilise les frais médicaux dans des déclarations séparées, il faut alors déduire plusieurs fois les 3 % de revenus nets.

Est-ce que je peux mettre mes droits de scolarité du secondaire dans ma déclaration ?

Non.

Ce sont les droits de scolarité des formations postsecondaires seulement qui sont acceptés pour obtenir le crédit d’impôt au fédéral et au provincial.

« Si l’enfant ne gagne pas assez pour utiliser ses frais de scolarité, on les transfère aux parents. Si l’enfant fait plus d’argent, c’est lui qui va utiliser les montants de frais de scolarité et il ne pourra pas les transférer à ses parents », explique Luce Morin.

« Si ce sont les parents qui veulent réclamer le crédit, la désignation doit se faire sur la déclaration de l’enfant. Il indique sur sa déclaration ses frais de scolarité et indique aussi qu’il les transfère à ses parents. Ça nécessite un échange d’information entre parents et enfants », ajoute Yannick Lemay.

Que pouvez-vous inclure comme frais dans le calcul de ce crédit d’impôt ? Les droits de scolarité avec un reçu délivré par le cégep, l’université ou le centre de formation professionnelle. Les frais d’examen payés à un établissement d’enseignement reconnu, les frais d’utilisation des installations d’une bibliothèque ou d’un laboratoire et les frais de stage sont aussi acceptés.

Lorsqu’un étudiant déménage dans le but de se rapprocher d’au moins 40 km de son établissement scolaire, il peut déduire ses frais de déménagement dans sa déclaration de revenus.

« S’il n’a pas de gros revenus l’année de son déménagement, il peut reporter la déduction non utilisée plus tard », précise Yannick Lemay.

La version originale de ce texte a été modifiée parce qu'elle indiquait qu'il fallait avoir 18 ans pour contribuer à un REER.