Après le quinoa, le kale et le lait d’avoine, devinez quels aliments atteignent des sommets de popularité dans les supermarchés. Un indice, ça n’a rien à voir avec le goût ou les vertus pour la santé.

Les Québécois remplissent leur chariot d’aliments… en solde.

Quasiment 6 articles achetés sur 10 étaient en rabais, au dernier trimestre de 2023. Ç’en dit très long sur la réalité financière des consommateurs dans un contexte de taux hypothécaires trois fois plus élevés qu’il y a cinq ans et d’inflation alimentaire soutenue.

« On n’a jamais vu ça. C’est un record ! », a commenté Francis Parisien, vice-président principal des ventes pour les PME au Canada chez NielsenIQ lors d’un évènement organisé par le CTAQ, le Conseil de la transformation alimentaire du Québec. Ses tableaux montraient que la popularité des soldes a connu un bond particulièrement brusque d’avril à octobre dernier, et que la hausse n’a jamais cessé depuis.

Cette tendance signifie que le menu de la semaine d’un nombre toujours croissant de ménages est dicté par les circulaires. On peut y voir de saines habitudes de consommation, mais ça devient de plus en plus lourd et frustrant de faire ses achats en fonction des prix plutôt que de ses envies.

La catégorie des poissons et fruits de mer, particulièrement coûteuse, est la plus touchée par le phénomène avec 66 % des unités achetées en solde. Les légumes, la viande fraîche et les collations suivent de très près.

À l’autre bout du spectre se trouvent la nourriture pour animaux (31 %), le fromage et les boissons alcoolisées qui sont, au contraire, majoritairement achetés au prix habituel.

Ce qui n’a pas changé, c’est que le Québec continue d’être l’endroit où les achats d’aliments « en spécial » sont les plus fréquents. Mais des gains sont enregistrés dans toutes les provinces quand on regarde le bilan de la dernière année.

Les Québécois sont aussi les plus grands adeptes de ces bonnes vieilles circulaires en papier qu’on déplie sur la table de la cuisine pour rédiger sa liste de courses. Ailleurs au pays, l’engouement pour la recherche d’aubaines en ligne et sur les applications pour les téléphones est plus développé.

Mais soyez avertis, les habitudes devront changer : la mort du Publisac surviendra dans les prochaines semaines.

Partout au Québec, le célèbre sac sera remplacé – après 46 ans d’histoire – par le raddar, un feuillet qui combine les soldes de plusieurs détaillants. Vu sa taille relativement petite (29 pages, en moyenne), la quantité de rabais qu’on y trouve est bien moindre. Sauf exception, une entreprise ne peut y présenter que quatre pages de soldes, au maximum, le but étant de réduire le papier.

Pour consulter les autres offres – car il n’y en aura pas moins en magasin –, il faut se rendre en ligne (raddar.ca, flipp.com, circulaires.ca) ou sur une application (reebee). Les détaillants ont aussi leurs propres sites et applications.

Seulement 22 % des Québécois ne cherchent pas les rabais.

Même si l’inflation alimentaire a beaucoup diminué dans la dernière année, passant de 11 % à moins de 5 %, les hausses du prix continuent de susciter l’inquiétude. Pas moins de 96 % des Québécois se disent préoccupés (21 %) ou très préoccupés (75 %) par cette tendance, constate NielsenIQ. Chez les femmes, plus nombreuses à faire l’épicerie et généralement moins riches, on dénombre 81 % de très inquiètes.

Devant de tels niveaux stratosphériques, il ne faut pas s’étonner que le ministre de l’Industrie François-Philippe Champagne tente de marquer des points en se présentant comme le défenseur des consommateurs pressurisés par nos cinq grands détaillants en alimentation.

Mais il a beau déplorer que les grands épiciers n’aient pas été « suffisamment transparents sur les causes de l’inflation alimentaire » et qu’ils n’aient pas « fourni de mises à jour régulières sur les initiatives visant à stabiliser les prix », ça ne change rien. Aucun épicier n’a eu peur de ses menaces de mesures fiscales de l’automne dernier, comme en témoigne l’absence d’annonces aux consommateurs qui les feraient économiser.

Sobeys (IGA) avait promis aux élus fédéraux, en décembre, le déploiement d’une nouvelle stratégie en début d’année. On attend encore le communiqué.

Depuis deux ans, les prix ont bondi en moyenne de 21 %, toujours selon NielsenIQ. Ça varie énormément d’une catégorie à l’autre, mais on sait que les hausses les plus importantes touchent les aliments transformés vendus au centre du magasin qui nécessitent beaucoup de main-d’œuvre. En d’autres mots : cuisiner devient de plus en plus rentable au fil du temps.

Alors à vos fourneaux !