Comme preuve d’amour, il se fait beaucoup mieux que les cartes-cadeaux. Mais parfois, c’est un présent tout à fait convenable.

C’est avec ce constat en tête, et pour éviter d’avoir l’air démodée en offrant un chèque, que je me suis présentée à la pharmacie. Question de donner un maximum de latitude à son destinataire, j’ai choisi une carte Visa avec de jolies bougies sur l’emballage et la mention « Le Cadeau Parfait ». Ç’aurait pu être celle de Mastercard ou d’American Express.

À la caisse, l’homme devant moi tenait dans ses mains quatre exemplaires du même produit. J’ai tendu l’oreille, car il ne semblait pas comprendre sa facture et la caissière lui fournissait des explications. C’est ainsi que j’ai découvert que ses cartes « de crédit » prépayées de 25 $ venaient avec des « frais d’achat » de 4,95 $ chacune. Des frais taxables. Aouch !

En regardant le verso, j’ai aussi appris que des « frais d’entretien mensuels » de 3 $ seraient déduits si le destinataire tardait trop à utiliser son cadeau.

Donc, non seulement une carte de 25 $ coûte 30,69 $, mais en plus, son solde pourrait éventuellement fondre comme neige au soleil. Tout seul. Pour éviter ce scénario, la carte doit être vidée dans les 12 mois après son achat.

Certaines cartes sont encore plus gourmandes. La Joker de Mastercard, qui permet à l’acheteur de choisir le montant du cadeau (entre 25 et 200 $), impose des frais d’activation de 7,95 $ plus taxes. La Visa Joker (entre 200 et 500 $) : 9,95 $ de frais.

  • Carte de crédit prépayée

    PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

    Carte de crédit prépayée

  • Exemple de carte Joker de Mastercard

    FOURNIE PAR LPC AVOCATS

    Exemple de carte Joker de Mastercard

  • Carte de crédit prépayée

    PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

    Carte de crédit prépayée

1/3
  •  
  •  
  •  

Ce qui complique les affaires, c’est que les frais d’activation (ou d’achat) et d’entretien mensuels (ou d’inactivité) sont interdits sur les cartes pouvant être utilisées dans un seul commerce, que ce soit McDonald’s, Simons ou la SAQ.

Or, les cartes permettant de faire des achats à de multiples endroits, ce qui inclut celles émises par les centres commerciaux, ne sont pas soumises à cette disposition de la Loi sur la protection du consommateur (LPC). Et dans le cas des cartes-cadeaux offertes gratuitement, dans le cas de promotions, par exemple, aucune règle n’existe.

Ces exceptions ont de quoi provoquer la confusion chez les consommateurs.

« Les cartes des institutions financières peuvent facturer les frais qu’elles veulent, pourvu qu’ils soient dévoilés clairement avant l’achat », résume le porte-parole de l’Office de la protection du consommateur, Charles Tanguay. La même logique s’applique quand il s’agit des dates d’expiration. Cela dit, les fonds des cartes-cadeaux Visa et Mastercard n’expirent jamais et peuvent être transférés sur une autre carte en téléphonant au service à la clientèle.

Demande d’action collective

Même si leurs frais d’activation sont légaux, ces cartes posent problème, selon le cabinet montréalais LPC Avocats. Car le prix affiché « doit comprendre le total des sommes que le consommateur devra débourser » et il « doit ressortir de façon plus évidente que les sommes dont il est composé ».

MJoey Zukran a d’ailleurs déposé une demande d’autorisation pour exercer une action collective, l’automne dernier. Il est possible de ne pas induire les clients en erreur. Aux États-Unis, certains détaillants comme Walmart affichent un prix tout inclus.

CAPTURE D’ÉCRAN TIRÉE DU SITE DE WALMART AUX ÉTATS-UNIS

Aux États-Unis, Walmart affiche en ligne des prix qui incluent les frais d’activation des cartes.

La LPC empêche aussi les commerçants du Québec d’exiger un prix supérieur à celui annoncé. Ainsi, en vertu de la Politique d’exactitude des prix, MZukran juge que les consommateurs sont en droit d’exiger 10 $ comme s’il s’agissait d’une erreur de prix classique.

Son recours vise une longue liste de détaillants, dont Couche-Tard, Jean Coutu, Walmart, Canadian Tire, Pharmaprix, Best Buy et Dollarama, ainsi que Visa, Mastercard, American Express et People’s Trust.

Consultez les informations relatives à cette affaire

À première vue, ces cartes pouvant être utilisées presque partout semblent bien commodes. Autant pour l’ado qui n’a pas de carte de crédit que pour les achats en ligne sur Amazon.

Mais elles viennent avec des contraintes d’utilisation.

Certaines pompes à essence les refusent. Les restaurants et les hôtels peuvent demander des frais lors de transactions.

Les commerçants sont aussi en droit de refuser les transactions fractionnées. En d’autres mots, le détenteur d’une carte de 100 $ pourrait ne pas pouvoir l’utiliser pour des chaussures à 150 $.

En voyage dans la zone euro, la dépense maximale autorisée par transaction est limitée à 75 $ CAN, précisent les sites des cartes Joker et Le Cadeau Parfait. Du côté d’American Express, les cartes-cadeaux sont acceptées au Canada et aux États-Unis seulement.

Pour la latitude dont je parlais plus haut, on repassera.

Le bon vieux chèque et l’argent comptant n’ont peut-être pas aussi fière allure que les cartes « de crédit » prépayées, mais au moins, ils ne provoquent pas de mauvaises surprises.