Il y a des individus à contre-courant… mais aussi des objets ! Prenez le plus célèbre des morceaux de bois, le fameux 2 x 4. Son prix s’est effondré ces dernières semaines, passant de 12 à 4 $. Pendant ce temps, l’inflation atteignait plutôt un sommet en près de 20 ans.

La hausse des prix est marquée depuis quelques mois. En août, l’inflation annuelle s’est établie à 4,1 %, du jamais vu depuis 2003 au pays. Au Québec, les prix bondissaient de 4,4 %.

Ce n’est rien de rassurant pour les consommateurs qui voient ainsi leur pouvoir d’achat diminuer, que ce soit à l’épicerie ou dans les commerces de voitures d’occasion. Les travailleurs dont le salaire n’augmente pas ou augmente peu, ceux qui peinent déjà à joindre les deux bouts et les retraités aux revenus à peu près stables sont les plus touchés.

L’inflation n’épargne pas davantage les investisseurs. En réalité, leurs placements doivent soudainement générer un rendement de plus de 4,1 % – après les frais pouvant atteindre 2 % – pour s’enrichir. Ce n’est pas hors de portée, mais ce n’est clairement pas avec des CPG 3 ans à 0,7 % qu’on atteint la cible !

Je suis donc partie à la recherche de trucs pour composer avec l’inflation, que ce soit à titre de consommateur ou d’investisseur, ou les deux.

Il ne faut pas « surpaniquer », m’a dit d’emblée Mathieu D’Anjou, économiste en chef adjoint chez Desjardins. Car, pour la plupart des investisseurs, il n’y a pas grand-chose à faire pour éviter les effets de l’inflation. Pour bien protéger son pouvoir d’achat, il suggère cependant d’éviter les placements à court terme, puisque les taux obligataires sont actuellement « très faibles ».

« Dans le contexte actuel, on est plus confiants envers la Bourse qu’envers les obligations », ajoute l’expert.

L’inflation étant essentiellement provoquée cette année par une hausse de la demande pour les biens, et une grande disponibilité des liquidités (vos épargnes COVID-19), les entreprises cotées en Bourse devraient en profiter.

Cela dit, il demeure préférable d’avoir un portefeuille diversifié, le marché boursier étant très volatil ces temps-ci, insiste Mathieu D’Anjou. On l’a d’ailleurs vu il y a quelques jours quand les problèmes financiers du géant chinois de l’immobilier Evergrande ont fait reculer les principaux indices nord-américains de quelque 2 % d’un coup.

Il faut aussi réaliser que la situation actuelle n’a pas le même impact positif sur tous les types d’entreprises. Ça varie selon les secteurs. Et la rentabilité peut être sous pression à cause des hausses de coûts provoquées par le transport, les pénuries ou les salaires.

Bref, la hausse de l’inflation « rajoute une couche de complexité à la constitution des portefeuilles », note la Banque Royale dans un texte intéressant sur l’inflation et les placements.

Lisez un texte de la Banque Royale sur l’inflation et les placements

Du côté de l’organisme ÉducÉpargne, la présidente du conseil d’administration, Nathalie Bachand, ne recommande pas de sauter sur son téléphone ou son ordinateur pour changer la nature de ses investissements. « On ne peut pas regarder une conjoncture court terme et changer son plan à long terme. Il faut respecter son profil. Je n’irais pas prendre plus de risques à cause de l’inflation », dit la planificatrice financière.

« Moi, j’attendrais que ça passe. Ça ne fait pas quatre ans que ça dure ! », lance celle qui ne panique surtout pas à la lecture des grands titres dans les journaux au sujet de l’inflation.

Ça va d’ailleurs passer, dit Mathieu D’Anjou de Desjardins. Dans un an, évalue-t-il. On reviendra ensuite à un taux plus proche de celui souhaité par la Banque du Canada, soit 2 %.

Dans l’intervalle, on risque de voir une hausse des taux hypothécaires, une façon pour la Banque du Canada d’apaiser l’inflation. Cela sera « pire » que la hausse des prix dans les magasins, croit Mme Bachand, « car bien du monde s’est acheté une maison au-dessus de ses moyens ».

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Ce qui a déjà un impact dans notre vie, ce sont les prix qui bondissent. Ceux qui demandent des conseils budgétaires à l’ACEF de la Péninsule, à Matane, n’utilisent pas le mot inflation, mais constatent qu’ils n’arrivent plus financièrement. « Ils veulent comprendre ce qui se passe et on met le doigt sur le bobo, raconte la directrice générale, Élaine Guilbault. L’épicerie, l’automobile, le logement, tout coûte plus cher. »

À l’épicerie, l’inflation passe souvent inaperçue parce que les prix ne bougent pas, ce sont les quantités qui diminuent. « Le sac de chips est le meilleur exemple. Il est de plus en plus rempli d’air ! On dit aux gens de regarder le prix pour 100 grammes. De prendre plus de temps pour analyser. »

Face à un pouvoir d’achat qui s’érode, c’est le temps de faire son grand ménage financier, et de réfléchir à sa consommation.

Des idées ? Revoir ses assurances (éliminer les inutiles, magasiner de meilleurs prix), ses abonnements (gym, streaming, magazines) et ses services (câble, téléphonie mobile) ; vider ses cartes de points (des centaines de dollars peuvent s’y trouver) et ses cartes-cadeaux (si on a besoin de quelque chose) ; réduire sa consommation d’énergie ; vendre ce qui ne sert plus ; acheter moins ou d’occasion ; consolider ses dettes.

Eh oui, le ménage fait aussi partie des conséquences de l’inflation !

Le flou à l’épicerie

Chers lecteurs, vous savez compter ! Dimanche dernier, vous avez remarqué un montant erroné dans la question sur les prix à l’épicerie. Il aurait fallu lire 2,99 $ et non 3,99 $ pour deux unités. Ainsi, le prix pour une seule unité (1,79 $) est plus élevé que le prix par unité (1,50 $) facturé à celui qui en achète deux. Merci de votre vigilance.

Lisez le texte d’André Dubuc « Le retour du mot en i » Lisez un texte sur la chute du prix du bois d’œuvre au Canada Lisez la chronique « Faire l’épicerie, ça s’apprend »