À la lumière des résultats financiers spectaculaires livrés depuis deux jours, les grandes banques canadiennes confirment de façon éloquente et convaincante qu’elles ont regagné toute la traction qu’elles affichaient avant que n’éclate la pandémie et qu’elles sont maintenant résolument engagées sur la voie de leur grand déconfinement.

Depuis deux jours, c’est à un véritable feu d’artifice que nous convient les grandes banques canadiennes en déversant un torrent de résultats financiers tout aussi étonnants les uns que les autres.

Avec des hausses de profits qui oscillent entre 144 % et 321 %, par rapport au trimestre équivalent l’an dernier, quatre des six grandes banques qui ont jusqu’à maintenant livré leurs résultats financiers montrent une vitalité qui peut à première vue paraître indécente. On y reviendra.

PHOTO TIJANA MARTIN, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Depuis deux jours, c’est à un véritable feu d’artifice que nous convient les grandes banques canadiennes en déversant un torrent de résultats financiers tout aussi étonnants les uns que les autres.

C’est d’abord la BMO qui a ouvert, mercredi, le festival des résultats trimestriels des banques canadiennes en déclarant un bénéfice net de 2,1 milliards pour son deuxième trimestre terminé le 30 avril, comparativement à 689 millions pour le même trimestre l’an dernier, ce qui représente une hausse de 193 %.

Jeudi matin, au tour de la Banque CIBC de poursuivre de façon spectaculaire le bal en affichant un bénéfice net de 1,6 milliard, comparativement à un maigre résultat de 392 millions l’an dernier, enregistrant ainsi un gain de 321 % !

La Banque TD a enchaîné en dévoilant des profits nets de 3,7 milliards, en hausse de 144 % sur les 1,5 milliard enregistrés un an plus tôt, suivie par la Banque Royale qui a annoncé un vibrant bénéfice net de 4 milliards, une progression de 171 % par rapport aux 2,8 milliards dévoilés l’an dernier.

Avec de tels résultats, les banques donnent la nette impression qu’elles se sont remises à rouler sur l’or, ce qui n’est pas faux. Mais il faut se rappeler que lorsque l’on compare les trimestres d’une année à l’autre, on ne doit surtout pas oublier d’où les banques sont parties l’an dernier pour arriver où elles sont aujourd’hui.

Une forte proportion des bénéfices nets engrangés par ces quatre banques à leur dernier trimestre est attribuable au meilleur contexte de crédit que l’on connaît aujourd’hui et qui a permis à chacune de réduire considérablement ses provisions pour pertes sur ses prêts douteux.

L’an dernier, au 30 avril 2020, au moment de fermer leurs livres sur leur deuxième trimestre, les banques, comme l’ensemble de la société, étaient en pleine panique pandémique.

L’économie était torpillée de toutes parts, les entreprises étaient forcées de fermer leurs portes, des hordes de travailleurs se retrouvaient sans emploi. On était, il faut se le rappeler, au bord du cataclysme et encore bien loin de seulement penser à une solution vaccinale à grande échelle.

Un soutien massif du fédéral

La totale incertitude économique qui régnait alors a forcé la Banque TD à prendre à son deuxième trimestre une provision pour pertes de 3,2 milliards pour être prête à toute éventualité. Même chose pour la Banque Royale qui a dû provisionner 2,8 milliards, la CIBC (1,4 milliard) et la BMO (2,2 milliards sur deux trimestres l’an dernier).

Cette prudence élémentaire était avisée, mais le soutien financier massif accordé par le gouvernement fédéral par l'entremise d'une kyrielle de programmes d’aide – PCU, subvention salariale à l’emploi, subvention d’urgence pour le loyer commercial, garanties de prêts de la BDC – a permis aux banques d’éviter l’hécatombe appréhendée.

C’est pourquoi les grandes banques canadiennes peuvent aujourd’hui récupérer une partie des réserves mises de côté l’an dernier et les inclure dans la colonne des profits cette année, ce qui a été notamment le cas pour la Banque Royale et la Banque TD.

L’aide financière du gouvernement et la forte reprise économique ont de plus permis à de nombreuses entreprises d’éviter le gouffre et de rembourser des prêts qui avaient été provisionnés. Dans le bilan de leur dernier trimestre, les grandes banques ont aussi ramené au minimum les nouvelles provisions sur prêt, ce qui a gonflé leurs derniers résultats, parce qu’elles ont la certitude que la reprise économique sera forte et soutenue pour les deux prochaines années.

C’est notamment l’avis exprimé mercredi par Darryl White, PDG de la BMO, qui s’attend à ce que l’économie nord-américaine soit porteuse d’une forte croissance cette année et l’an prochain, alors que le patron de la CIBC, Victor Dodig, anticipe une progression de 5,7 % du PIB canadien et de 6,6 % du PIB américain en 2021.

Les banques ont eu chaud l’an dernier, mais elles profitent à plein aujourd’hui de la reprise économique et de la forte activité immobilière au pays alors que la Société canadienne d’hypothèques et de logement a notamment dévoilé jeudi que le Québec atteindrait cette année la marque historique des 60 000 nouvelles mises en chantier.

On sera en mesure d’évaluer ce vendredi de quelle façon la Banque Nationale a orchestré son déconfinement, alors que la Banque Scotia clôturera le festival des résultats bancaires lundi matin.