Sortez vos drapeaux, vos fanions et vos chaises pliantes !

À défaut de pouvoir célébrer la fête nationale sur les Plaines ou au parc Maisonneuve, jeudi soir, les Québécois se réuniront dans les cours, les ruelles et les parcs pour regarder ensemble la partie la plus importante du Canadien en deux générations. Un possible classique, au cours duquel le Tricolore aura la chance d’atteindre la finale de la Coupe Stanley pour la première fois depuis 1993.

Ce sera plus qu’un « moyen party ».

Ce sera plus qu’une grand-messe.

Ce sera une communion épique.

Car le Canadien a ce pouvoir, lorsqu’il gagne, d’unir tous les Québécois – moins quelques fans des Bruins de Boston. « C’est ça qui nous ressemble/C’est ça qui nous rassemble/Anglo, franco, peu importe ta couleur de peau », chante avec justesse Loco Locass. Le club est en train de ressouder un Québec divisé par la pandémie et de rapprocher les jeunes et les moins jeunes.

Regardez autour de vous. Les enfants redécouvrent le hockey de ruelle. Les ados affichent fièrement leur duvet des séries. Les parents ressortent leurs figurines Provigo de la finale de 1989 et les placent sur le téléviseur, comme des talismans. Les grands-parents replongent dans leurs souvenirs pour chercher des comparatifs.

Phillip Danault ? Guy Carbonneau.

Carey Price ? Jacques Plante.

Cole Caufield ? Steve Shutt. (Quel but mardi soir !)

Shea Weber ? Albert « Battleship » Leduc.

Battleship, ça ferait d’ailleurs un beau surnom au capitaine du Canadien. D’abord, sa force de frappe est inouïe. Mais surtout, dans ces séries, Weber défend son territoire avec calme. Confiance. Prestance. Majesté. Lorsqu’il est sur la glace, l’adversaire n’a toujours pas marqué en supériorité numérique en 45 minutes. Un fait d’armes impressionnant.

En fait, Shea Weber est à l’image du reste de l’équipe en séries.

Étonnant.

Tous les joueurs me surprennent agréablement. Leur intensité et leur discipline sont incomparables avec ce qu’ils nous ont démontré à la fin de la saison et au début du tournoi, lorsqu’ils ont traversé une séquence de huit défaites en neuf rencontres.

Leur engagement est remarquable. Particulièrement en défense. Lors des deux premières périodes, mardi soir, les Golden Knights n’ont réussi que 14 tirs. C’était comme si le Canadien avait brûlé le pont-levis permettant à ses adversaires d’attaquer sa forteresse. Les Montréalais coupaient les lignes de passe au centre de façon agressive. Les statisticiens leur ont d’ailleurs attribué dix récupérations de rondelle – quatre de plus que leur moyenne des séries.

Lorsque les Golden Knights ont finalement trouvé un moyen de s’installer en zone offensive, en troisième période, le Canadien a résisté aux assauts. Grâce au brio de Carey Price – excellent face à Reilly Smith –, mais aussi en serrant les rangs et en bloquant des tirs (18 dans la partie).

Le Tricolore est également parvenu à créer plusieurs contre-attaques spectaculaires. Ce fut le cas sur le premier but de la rencontre. Jesperi Kotkaniemi – impliqué mardi – a servi une longue passe à Josh Anderson, qui a profité d’une échappée. Marc-André Fleury a bloqué son tir. Sauf que Kotkaniemi, qui a suivi le jeu, a saisi le rebond et ouvert le pointage.

Ce fut aussi le cas sur le troisième but. Nick Suzuki a volé la rondelle à Mark Stone, à sa ligne bleue, pour la refiler du revers jusqu’à Corey Perry, posté seul sur l’autre ligne bleue. Lorsqu’il fut rattrapé par Alex Pietrangelo, Perry a eu le flair de passer vers l’arrière à Cole Caufield, qui a décoché un boulet de canon. (Parenthèse : Cannonball Caufield, ce serait un super surnom.)

Fort de son gain de 4-1, le Canadien revient donc à Montréal avec la possibilité d’offrir à ses partisans québécois un cadeau inespéré, jeudi soir, pour leur fête nationale.

Une finale de la Coupe Stanley.