La plupart des gens ne connaissent pas le génie génétique et se soucient très peu de son implication dans l’agriculture mondiale. Or, avec l’avènement prochain de l’édition génomique au Canada, la façon de communiquer l’étiquetage des aliments doit changer au pays. Si on évite de le faire, inutile de blâmer les adeptes de nourriture bio et les groupes anti-OGM de continuer à semer la peur sur les risques de cette nouvelle avancée scientifique.

Alors qu’Omicron domine l’actualité dernièrement, nous avons parallèlement appris que Santé Canada pourrait traiter l’édition génomique différemment des cultures génétiquement modifiées – ou OGM –, ce qui signifie que la surveillance assurée par l’Agence canadienne d’inspection des aliments ressemblerait davantage à celle des cultures de sélection conventionnelle.

Sur ce point, Santé Canada adopterait une position adéquate. La modification, ou l’édition génomique, diffère de l’édition de gènes. La modification génétique implique, de manière générale, l’insertion artificielle de gènes dans le génome d’une plante ou d’un animal. L’édition génomique, quant à elle, peut instantanément, et de manière très ciblée, éditer des parties d’un génome en éliminant, en corrigeant ou en ajoutant des sections de l’ADN d’une plante. L’édition génomique n’implique généralement pas l’introduction de gènes d’autres espèces, mais cette technique permet un contrôle assez complexe du génome d’un organisme. Avec l’édition génomique, on réduit grandement le nombre d’années de recherche.

Les partisans du bio et les anti-OGM prétendront que les deux techniques sont identiques. Mais elles ne le sont tout simplement pas. En fait, de nombreux pays, dont certains en Europe, rédigent de nouveau leurs réglementations sur les semences génétiquement modifiées pour refléter ce que l’édition génomique peut faire. Le compromis biologique diffère du croisement non naturel d’espèces pour créer une nouvelle plante.

La plupart des gens, et principalement les consommateurs, s’en trouvent ravis. L’édition génomique aura une incidence sur l’agriculture et rendra nos fermes plus efficaces, sans aucun doute. Mais les consommateurs en bénéficieront sans le savoir.

D’une part, en rendant la production agricole plus efficace, les rendements de cultures pourront augmenter en utilisant moins de terres, moins d’eau et moins de ressources naturelles. En d’autres termes, l’édition génomique peut rendre l’agriculture encore plus durable. En modifiant l’ADN des plantes, les cultures peuvent s’adapter plus rapidement aux changements climatiques. Les plantes peuvent mieux résister à la sécheresse, aux maladies et aux agents pathogènes, aidant ainsi les cultivateurs, au Canada et dans d’autres régions du monde, qui se voient souvent appauvris par les changements climatiques. La production de bananes en est un bon exemple.

L’autre avantage offert par l’édition génomique se constate dans la composition nutritionnelle d’une plante qui peut être modifiée pour le mieux. Pour les amateurs de protéines végétales, la teneur en protéines des cultures peut être augmentée pour rendre la transformation des produits à base de protéines végétales plus efficace et moins coûteuse. La teneur en matières grasses des cultures peut également être abaissée. Cela signifierait moins de transformation pour les aliments que nous achetons.

La réduction du gaspillage alimentaire constitue une autre caractéristique. La nourriture gaspillée représente une facture alimentaire invisible que nous ne recevons jamais, mais que nous payons toujours en tant que consommateurs, et l’édition peut aider sur ce plan. Les laitues, champignons et tomates pourraient voir leur durée de conservation prolongée car leur mûrissement pourrait se faire plus tard. Les problèmes de la chaîne d’approvisionnement auxquels nous sommes actuellement confrontés raccourcissent la durée de conservation de nombreux produits alimentaires que nous achetons au détail. L’édition génomique peut probablement aider sur cet aspect-là également.

Si vous souffrez d’allergies ou d’intolérances, encore une fois, cette nouvelle technologie peut également jouer un rôle. Par exemple, le blé sans gluten pourrait rendre le pain et les pâtes comestibles pour ceux qui souffrent de la maladie cœliaque. Plus de trois millions de Canadiens déclarent avoir au moins une allergie alimentaire et des millions d’autres ont des intolérances alimentaires. La science peut maintenant rendre certains aliments moins redoutables pour des millions de Canadiens. Les possibilités sont infinies.

Mais l’édition génomique n’est pas une panacée contre tous nos maux. Des groupes alarmistes ont déjà commencé à exprimer leurs inquiétudes concernant l’édition génomique.

Dans une certaine mesure, ces groupes envoient simplement le message qu’il faut davantage de recherches sur le sujet et que nous devons tous avancer avec une extrême prudence sur ce terrain. En science, rien n’est absolu ni même parfait, et nous devons reconnaître les risques liés à l’édition de gènes au fil du temps.

L’autre défi se loge dans la transparence. Chaque jour, nous sommes tous exposés à divers produits alimentaires qui contiennent des ingrédients génétiquement modifiés, sans savoir où ils se trouvent. Plus de 75 % de tous les produits alimentaires vendus dans une épicerie ordinaire au Canada contiendraient une forme d’ingrédient génétiquement modifié, et les étiquettes n’en font aucune mention. Au Canada, il y a de fortes chances que, sans le savoir, vous ayez déjà mangé du saumon génétiquement modifié. Et il n’y a rien d’illégal à ça !

Pour que la population développe un penchant pour les technologies qui rendent notre agriculture plus efficace et plus bénéfique pour tous, il faudrait au moins informer les consommateurs des pratiques à la ferme en amont dont ils profitent chaque jour. De façon plus inquiétante encore, la majorité des consommateurs ne comprennent pas bien ces technologies ou s’en moquent. Pour plus de sensibilisation, identifier la présence d’ingrédients génétiquement modifiés ou édités dans les produits vendus au détail serait un point de départ.

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