En quelques jours, plusieurs documents majeurs sur l'énergie au Québec ont été dévoilés : les projets de loi sur les véhicules zéro émission, sur la création du nouvel organisme Transition énergétique Québec et sur les hydrocarbures, ainsi que le plan stratégique d'Hydro-Québec.

Ils pourraient marquer le Québec pendant longtemps : l'objectif majeur est en effet de réduire nos émissions de gaz à effet de serre (GES) du tiers d'ici 2030. De nos 10 tonnes de GES par personne, il faudra en couper 3 dans les 14 prochaines années. C'est un défi assez unique, qui n'a été réalisé ailleurs que dans des pays qui ont connu des bouleversements importants, comme la chute du communisme dans les années 90.

L'idée du gouvernement n'est évidemment pas de créer de tels remous dans la société, mais de nous amener plus doucement dans la voie de la transition énergétique. Elle est nécessaire sur le plan climatique et se justifie à bien des égards sur le plan économique : nous achetons plus de 1 milliard de litres d'essence et de diesel par mois au Québec - des produits en grande partie raffinés ici, mais d'un pétrole entièrement importé.

Ce carburant liquide nous coûte des milliards et vient abreuver notre parc automobile, dans lequel les Québécois ont investi la somme record de 14,7 milliards en 2015, pour acheter 450 000 nouveaux véhicules, un nombre record aussi.

Alors que le Québec n'hésite pas à investir dans la consommation de pétrole, il était temps d'amorcer la transition !

Pour ceux qui s'inquiéteraient d'un choc, n'ayez crainte. Tout se fera, ou ne se fera pas, en douceur : rien dans les projets de loi ne vient bousculer quoi que ce soit. Oui, il devrait y avoir plus de véhicules électriques sur les routes : 15 % des ventes sont visées pour 2025.

Mais avec des ventes toujours croissantes, le nombre de consommateurs de carburants pétroliers ne diminuera que très lentement. En fait, à peu près aucune diminution des émissions totales dans le secteur du transport routier n'est à prévoir d'ici 2030 avec ce projet de loi.

COHÉRENCE SOUHAITABLE

L'organisme Transition énergétique Québec (TEQ) vient ajouter une cohérence souhaitable dans le secteur de l'efficacité et de l'innovation énergétiques. Un plan directeur regroupant tous les efforts québécois devra être élaboré, dans l'optique d'atteindre les cibles énergétiques. Mais ce plan sera d'abord soumis à l'approbation gouvernementale, et le gouvernement se réserve le droit « à tout moment, de modifier ce plan directeur ».

Le gouvernement n'a pas non plus été assez déterminé pour réussir à regrouper les moyens pour la réduction des émissions de GES avec ceux pour l'efficacité énergétique. Pourtant, réduire ces GES passe essentiellement par des gains d'efficacité énergétique. Les 3-4 milliards du Fonds vert, d'ici 2020, ne seront pas directement gérés par TEQ. Un nouveau Fonds de transition énergétique, alimenté de sources encore non définies, a donc été créé, pour s'ajouter à la collection québécoise des Fonds (vert, des générations, Capital mines hydrocarbures, etc.).

La loi sur les hydrocarbures pourrait permettre une production québécoise d'hydrocarbures. Il y a en effet au Québec du pétrole et du gaz - le gouvernement instaure donc un cadre pour leur éventuelle exploitation. Ce cadre donne à la Régie de l'énergie un pouvoir d'autorisation important : son avis favorable sera nécessaire pour aller de l'avant, ajoutant ainsi un lieu de délibération plus neutre dans les enjeux de production d'hydrocarbures. Cette éventuelle production ne sera certainement pas un frein à la transition visée : la consommation d'hydrocarbures dominant outrageusement les sources d'émissions de GES, ce sont des efforts réussis à ce niveau qui sont nécessaires.

Enfin, Hydro-Québec a un nouveau plan stratégique. Il est ambitieux, mais ne concerne que très peu le Québec : il vise une croissance externe. Les objectifs déclarés de satisfaire la clientèle à court terme et de garder les prix bas vont maintenir notre surconsommation électrique. Pour la transition vers la sobriété énergétique, il faudra trouver un autre acteur.

La transition énergétique est donc lancée... sur papier. Sans heurt, sans vague. Surviendra-t-elle ?

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