Aujourd'hui, à Washington, s'ouvre une séance publique de la commission spéciale de la Chambre des représentants sur l'attaque terroriste contre le consulat des États-Unis à Benghazi, en Libye, en septembre 2012, attaque au cours de laquelle l'ambassadeur a été tué. Hillary Clinton, à l'époque secrétaire d'État, y sera le témoin vedette et, pour les républicains, l'accusée principale.

La commission, créée par la majorité républicaine à la Chambre, est la huitième du genre à enquêter sur ces événements. Essentiellement, les commissions cherchent à savoir si tout a été fait pour assurer la sécurité des diplomates en Libye avant l'attaque, si tous les moyens ont été pris pour leur venir en aide au moment des événements, et si le gouvernement a tenté de dissimuler le caractère terroriste de l'attaque lors de ses premières réactions afin de protéger Hillary Clinton et de ne pas nuire à Barack Obama, alors en campagne pour sa réélection.

Les sept premières commissions ne blâment pas directement l'ex-secrétaire d'État dans la gestion de cette affaire. Tout au plus soulignent-elles la confusion qui régnait dans la divulgation des informations et l'absence de renforcement de la sécurité de la mission diplomatique dans les mois précédant l'attaque malgré la détérioration de la situation sécuritaire en Libye.

Mais dans un pays où la théorie du complot est un sport national et une industrie lucrative, les républicains restent persuadés que Hillary Clinton est coupable de quelque chose et ils sont déterminés à le démontrer. Il faut bien admettre qu'ils y sont aidés par le manque de transparence de l'administration Obama, notamment dans la divulgation des documents relatifs à cette affaire. En mai 2014, une série de courriels publiés par un groupe conservateur a laissé croire que certains conseillers voulaient imposer une lecture de l'attaque qui minimisait son caractère terroriste afin de protéger Mme Clinton. Immédiatement, la Chambre a voté la création d'une nouvelle commission, avec pour mandat cette fois d'examiner l'ensemble des politiques et décisions prises avant, pendant et après l'attaque afin de déterminer les responsabilités au plus haut niveau.

Si la commission n'a rien découvert de nouveau sur les circonstances entourant l'attaque de Benghazi, elle révèle néanmoins que l'ex-secrétaire d'État utilisait un compte privé et non un compte gouvernemental pour échanger des courriels officiels. La question s'est alors posée de savoir si certains d'entre eux portaient sur l'affaire et si cette pratique mettait en danger la sécurité nationale.

Hillary Clinton s'est mal défendue sur l'usage de ce compte et accepte finalement de livrer ses courriels à un examen. La commission l'invite à venir témoigner en privé comme tous les autres témoins. Or, les témoignages privés sont souvent l'objet de fuites sélectives destinées à créer la controverse. Flairant le piège, la candidate démocrate exige de témoigner publiquement. Ainsi, ce qu'elle dira sera connu de tous.

C'est qu'il est devenu évident que cette commission s'est transformée en tribunal visant à discréditer la meneuse dans la course à la présidence des États-Unis. La commission étire étrangement ses travaux et procède avec une lenteur suspecte à l'audition des témoins. Son président a déjà annoncé la publication du rapport d'enquête quelque part l'an prochain, entendez juste avant la présidentielle du 8 novembre.

Au fond, les républicains sont persuadés de pouvoir démontrer au public américain la duplicité de Hillary Clinton et, ainsi, d'atteindre un de leurs objectifs, qui est de faire « chuter ses appuis » dans les sondages, comme l'a avoué un des leaders républicains à la Chambre.

Le procès d'intention est une vieille ficelle souvent utilisée en campagne électorale. Ici, il cache en fait le désarroi dans lequel les républicains sont plongés. Écartelés entre 15 candidats à l'investiture républicaine, menacés de marginalisation par les déclarations incendiaires de Donald Trump, incapables de choisir un speaker modéré à la Chambre des représentants, les républicains cherchent une diversion. Le témoignage de Hillary Clinton leur en offre une, en attendant des jours meilleurs.

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