Le président français François Hollande n'est jamais aussi à l'aise que lorsqu'il s'engage dans les affaires du monde. À 18% dans les sondages, évoluer sur la scène internationale l'éloigne des contingences nationales et donne l'impression aux Français et au monde qu'il a le contrôle sur quelque chose. Sur le Mali, la Centrafrique, l'Iran, la Syrie et maintenant l'Ukraine, François Hollande fait entendre la voix de la France. Et, parfois, cela fonctionne.

Hier soir, à Paris, il était à la manoeuvre afin de s'entretenir avec les présidents américain et russe. À 19h, il dînait avec Obama dans un restaurant chic, puis deux heures plus tard, il retrouvait Poutine à l'Élysée pour le souper. L'Ukraine était au menu.

Après deux ans à la tête de la France, la méthode Hollande en politique étrangère est maintenant connue: le volontarisme. Pour le président, il faut aller de l'avant, se montrer audacieux, agir. Cela veut dire ne pas hésiter à engager l'armée lorsque la situation l'exige, comme au Mali et en Centrafrique. Ou utiliser la diplomatie, même lorsque cela choque quelques alliés, comme en septembre dernier à New York, lors de sa rencontre historique avec le président iranien, pourtant ostracisé par la plupart des pays occidentaux. Maintenant, c'est avec Poutine, devenu pour certains le nouvel «ennemi», qu'il engage le dialogue.

En prenant les devants, le président français espère que la magie opère. Il n'a pas tout à fait tort. Son prédécesseur, Nicolas Sarkozy, a ouvert la voie lors de la crise entre la Géorgie et la Russie en 2008. À cette époque, le président géorgien avait provoqué un conflit avec Moscou au sujet de deux territoires occupés par l'armée russe. Il connaissait le danger, mais espérait que les Américains viendraient à son secours. Mal lui en prit. Les Américains sont restés chez eux et les Russes ont foncé sur la capitale géorgienne, prêts à capturer le président. Sarkozy s'était précipité à Moscou pour négocier avec Poutine. Il avait sauvé la peau du président géorgien.

François Hollande a lui aussi obtenu quelques résultats depuis son entrée en fonction. Le Mali a évité de tomber aux mains de terroristes, ce qui aurait provoqué la déstabilisation d'une bonne partie de l'Afrique de l'Ouest. Quant à l'Iran, les négociations concernant le volet militaire de son programme nucléaire avancent à la satisfaction de tous.

Avec l'Ukraine, c'est une autre affaire. La situation est toujours mauvaise et cela en partie à cause des Occidentaux. Au début de la crise, par leur appui sans nuances, ils ont laissé croire aux dirigeants de la «révolution» du Maïdan qu'ils pouvaient compter sur eux. Leur volontarisme dans une crise aussi explosive a échoué. Poutine a réagi brutalement et tient les cartes. Il faut maintenant réparer les pots cassés, et François Hollande devra déployer des trésors d'imagination afin de retisser les liens avec la Russie. Dans cette entreprise, il pourra compter sur la collaboration de tous les autres leaders du G7, sauf Stephen Harper. Le premier ministre canadien, lui, déteste la méthode Hollande, comme en fait foi toute sa rhétorique sur l'Iran et la Russie.

Aujourd'hui sur les plages de Normandie, tout ce beau monde, ainsi que le président élu d'Ukraine, sera réuni afin de souligner le 70e anniversaire du débarquement. Là, pas de rencontre furtive loin des caméras. Il sera dès lors intéressant de suivre avec attention la chorégraphie à laquelle se livreront les chefs d'État occidentaux et ukrainien avec Poutine: vont-ils lui serrer la main, échanger quelques mots... ou tenter de l'éviter? On saura alors si la magie de la méthode Hollande opère.

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