Le courant n'a jamais passé entre Barack Obama et Benyamin Netanyahou. Si la visite du président américain en Israël et en Palestine avait pour objectif de réchauffer les relations entre les deux leaders, elle n'avait rien d'un voyage d'agrément. Elle a été l'occasion d'un tête-à-tête précieux entre les deux hommes.

Le président Obama, a-t-il dit lui-même en arrivant en Israël, est venu pour écouter. C'est la moindre des politesses lorsqu'on est en visite. Mais il n'est pas dans cette région rien que pour cela. Il est aussi venu pour être écouté.

Deux sujets ont été au centre des discussions mercredi et jeudi: le programme nucléaire iranien et le processus de paix israélo-palestinien. Le premier a le potentiel de déclencher un conflit régional de grande ampleur s'il est mal géré. Le deuxième est un cancer dont les effets sur la société israélienne pourraient être fatals.

Jeffrey Goldberg est le journaliste américain le mieux informé sur Israël. Pro-israélien, il est proche des cercles du pouvoir tant à Jérusalem qu'à Washington. Il documente minutieusement le dossier iranien depuis des années. L'an dernier, Netanyahou n'a cessé de gonfler la menace iranienne au point où certains observateurs avaient le sentiment qu'Obama n'était qu'un spectateur dans cette affaire. Pour Goldberg, il n'en est plus rien. Le spectacle est terminé, et c'est bien Obama cette semaine qui a mené les discussions et mis les points sur les i. Le fin mot de l'affaire est que le président des États-Unis ne laissera personne entraîner son pays dans une guerre qu'il n'a pas choisie.

Le processus de paix israélo-palestinien est un dossier plus compliqué. Obama, comme ses prédécesseurs, a une marge de manoeuvre limitée. La raison en est simple: on touche ici au coeur de l'existence même d'Israël et de la Palestine. Et ce sont uniquement les chefs politiques et les peuples des deux nations qui trouveront la solution. Dans le cas d'Israël, le temps presse, affirme Ehud Barack, qui a quitté cette semaine ses fonctions de ministre de la Défense après sept ans à ce poste.

Ehud Barak «est l'un des meilleurs esprits analytiques au monde, et à plus forte raison d'Israël» disent de lui ceux qui le connaissent. L'homme, c'est vrai, est un monument de contradictions, d'arrogance et de doutes. Il sert son pays depuis 50 ans, d'abord comme militaire puis comme politicien. Premier ministre, il a retiré Israël du Liban du Sud après 18 ans d'occupation et tenté la paix avec Arafat. Il a eu l'oreille de Netanyahou comme ministre de la Défense. Ce qu'il dit a donc un poids.

Il y a deux mois, dans le bimensuel Foreign Affairs, il traçait un sombre tableau de l'avenir d'Israël si une solution n'était pas adoptée rapidement dans le conflit avec les Palestiniens.

«Israël se dirige vers une tragédie historique en Cisjordanie. La pénible réalité est ainsi: entre le Jourdain et la mer, il y a 12 millions d'habitants, soit 7,5 millions d'Israéliens et 4,5 millions de Palestiniens. Si ce territoire n'a qu'un seul souverain, appelé Israël, ce territoire deviendra inévitablement soit non-juif, soit non démocratique, puisqu'il n'y a aucun doute qu'à long terme il y aura une majorité arabe. Je crois donc qu'il nous faut agir. Je ne crois pas à l'immobilisme.»

Il l'a répété mercredi dans le Wall Street Journal le jour même de l'arrivée d'Obama en Israël. Il y invite Israël à lancer «une initiative de paix audacieuse» envers les Palestiniens et il préconise toutes mesures, même unilatérales, afin de quitter la Cisjordanie. Ehud Barak était à Washington il y a quelques semaines afin de préparer la visite d'Obama en Israël. Il n'a pas manqué d'expliquer sa vision des choses à ses interlocuteurs américains.

Cette visite aura été sérieuse et productive. On n'en verra pas les fruits immédiatement, seulement dans quelques mois.

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