Comme plusieurs, j'ai été touchée et choquée par cette histoire troublante d'enfants sans papiers qui se voient interdire l'accès à l'école québécoise. On se demande au nom de quoi nous pouvons compromettre l'avenir de ces jeunes déjà en butte avec des difficultés hors du commun. Pourquoi s'acharner à voler l'enfance de ces malheureux? Pourquoi sacrifier leur sécurité en les condamnant bien souvent à être des enfants clef au cou? Pareille politique inhumaine joue contre l'intérêt collectif, parce qu'elle contrevient à l'intégration sociale et défie les règles élémentaires de prévention.

Tout aussi odieuse que soit la situation, elle ne justifie pas de faire l'économie d'une réflexion citoyenne sur les problèmes d'immigration illégale et sur l'attitude à tenir devant ce phénomène grandissant et bien de notre temps. Je nous propose de faire cette réflexion ensemble, sans filet, sur une question qui interpelle nos valeurs et nos aspirations.

Les inégalités et les écarts de développement à travers le monde démontrent l'ampleur de la responsabilité qui incombe aux États modernes. Elles plaident pour une approche ouverte et responsable en matière de refuge et d'immigration. Elles mettent aussi en lumière l'importance des politiques d'aide au développement et de solidarité internationale qui s'attaquent à la racine des maux d'aujourd'hui.

Je suis critique de ce qui se fait à l'échelle internationale et souvent honteuse des politiques et des dérives du gouvernement Harper en ces matières! Cela dit, la question de l'attitude à tenir face aux sans-papiers reste entière. À l'évidence, il s'agit d'une question complexe où les approches en noir ou en rose peuvent s'avérer être de mauvais conseil.

Les États sont légitimés d'établir leur politique d'immigration. L'état de droit et la démocratie méritent d'être défendus. L'immigration clandestine génère, il faut le dire, des dysfonctionnements qui défient le droit de faire des choix démocratiques. Pire encore, elle fragilise la tolérance et la capacité d'accueil et d'intégration d'une société.

Jusqu'où, par ailleurs, une politique fondée sur des interdits et de la répression contribue-t-elle à contenir les flux migratoires et à faire respecter les politiques étatiques? Jusqu'où la nécessité d'agir dispense-t-elle de savoir quand, comment, sur qui et sur quoi agir?

Les sans-papiers sont les premières victimes de la situation d'irrégularité dans laquelle ils se retrouvent. À tout moment, ils sont sujets à l'expulsion. Bien souvent, ils travaillent dans des conditions abjectes qu'ils supportent en raison de leur statut.

Je trouve odieux de priver d'école des jeunes qui n'ont rien à voir avec la décision d'immigrer illégalement, alors qu'on tolère ceux qui exploitent la misère, que ce soit au travail ou dans le logement. Si on veut pratiquer des politiques dissuasives, il y a là un champ d'action salutaire et légitime, où les gouvernements répugnent à agir, même après tous ces reportages sur le travail au noir, sur ces agences de placement sans scrupules qui se spécialisent auprès de cette clientèle et sur ces marchands de sommeil qui exploitent des taudis dans des ghettos pour immigrants vulnérables. Pourquoi ne pas chasser les exploiteurs plutôt que les migrants?

On ne peut se contenter de réprimer l'immigration illégale. Ces phénomènes sont au coeur des enjeux de notre temps et doivent donner lieu à de nouvelles politiques plus justes, plus modernes et plus efficaces.

Nous devons mieux conjuguer fermeté et humanité. Pour ce faire, il faut engager la responsabilité des États en matière de protection des mineurs et de reconnaissance de situations d'urgence où le droit à la vie est menacé parce que la santé est compromise. La scolarisation et l'éducation des jeunes entrent définitivement dans ces balises qui devraient orienter notre façon d'aborder le XXIe siècle. Vivement du changement!

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