On aurait pu s'attendre à une satire féroce. Après tout, Tommy Wiseau est le Ed Wood du XXIe siècle et n'a pas craint d'exposer à la face du monde son absence totale de talent, à toutes les étapes de la fabrication de son fameux film The Room.

The Disaster Artist comporte, bien entendu, sa bonne part de scènes hilarantes, mais James Franco, qui en signe la réalisation en plus d'incarner le protagoniste, ne s'attarde pas qu'à ce seul aspect de l'histoire. Étonnamment, son film a beaucoup de coeur et affiche une empathie de bon aloi.

Ainsi, le récit explore le côté plus tragique d'un homme qui n'a pas le talent de ses ambitions, sans toutefois jamais tomber dans le pathos.

En s'inspirant du bouquin The Disaster Artist: My Life Inside The Room, The Greatest Bad Movie Ever Made, dans lequel Greg Sestero relate l'aventure du film et sa relation avec Tommy Wiseau, les scénaristes Scott Neustadter et Michael H. Weber (500 Days of Summer) s'attardent à décrire l'envers du décor.

Ainsi, la rencontre entre Wiseau (James Franco, excellent) et Sestero (Dave Franco, frère cadet de James) se déroule dans le cadre d'un atelier de théâtre mené par Melanie Griffith, l'une des nombreuses vedettes gratifiant ce film d'une courte participation. En tentant d'imiter Marlon Brandon dans Un tramway nommé Désir, Wiseau se couvre évidemment de ridicule, mais il impressionne néanmoins Sestero, un jeune acteur très timide, grâce à sa façon de s'abandonner totalement et de se foutre complètement du qu'en-dira-t-on.

Dire de Tommy Wiseau qu'il est bizarre serait un euphémisme. Arborant une longue crinière noire, quasi gothique, l'homme affirme être âgé de 19 ans et venir de La Nouvelle-Orléans, même si son aspect physique et son accent d'Europe centrale racontent une tout autre histoire. Qu'à cela ne tienne, Sestero accepte d'emménager avec son «mentor», et les deux amis s'installent à Los Angeles avec la ferme intention d'atteindre les plus hauts sommets.

Un étrange processus créatif

En plus de mettre en contexte l'histoire de ces hommes, James Franco recrée le tournage - évidemment chaotique - de plusieurs séquences cultes du film The Room, dont beaucoup trop de scènes se déroulent inutilement sur le toit d'un immeuble. On retiendra notamment cette séquence constituée de répliques très simples, que Wiseau rate prise après prise et dont les dialogues sont finalement soufflés par l'équipe entière!

Mais au-delà du caractère anecdotique, Franco creuse aussi le personnage et tente de percer son étrange processus créatif. La réussite du film tient aussi au fait que la distribution d'ensemble, constituée de pointures (de Seth Rogen à Jackie Weaver, en passant par Judd Apatow et plusieurs autres), est en phase parfaite avec le ton du film original. The Disaster Artist prend d'ailleurs fin sur un exercice fascinant, au cours duquel les scènes originales de The Room côtoient celles recréées par Franco 15 ans plus tard.

Notez que The Disaster Artist prend l'affiche au Québec en version originale anglaise seulement.

* * * 1/2

The Disaster Artist. Comédie de James Franco. Avec James Franco, Dave Franco et Seth Rogen. 1 h 38.

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Image fournie par Entract Films

The Disaster Artist