Le rideau se lève sur une jeune femme en train de plier bagage et de déguerpir au volant de sa voiture. Aucun dialogue. Musique inquiétante. Son petit ami tente de lui téléphoner. Elle laisse sonner. Puis, boum! Sa voiture fait des tonneaux et l'automobiliste se réveille ensuite dans une cave glauque, enchaînée.

Développé dans le plus grand mystère (comme le premier et surprenant Cloverfield réalisé en 2008), 10 Cloverfield Lane n'est pas une suite ni un préquel, même s'il existe une parentalité étrangement naturelle entre les deux longs métrages produits par J.J. Abrams.

Réalisé par Dan Trachtenberg (premier long métrage), ce huis clos apocalyptique n'a coûté que 5 millions de dollars et prouve qu'une bonne idée suffit parfois pour tenir les cinéphiles en haleine.

Impossible aussi de ne pas se creuser la tête.

Pourquoi la jeune femme - Michelle (belle occasion pour Mary Elizabeth Winstead) - se réveille-t-elle dans une cave, qui s'avère finalement être un bunker antinucléaire?

Peut-on croire l'inquiétant Howard (John Goodman) qui prétend ne pas l'avoir enlevée, mais plutôt l'avoir sauvée d'un monde présumément détruit par des attaques chimiques d'origine inconnue, voire extraterrestre?

Qui est le mystérieux Emmett (John Gallagher Jr.), un voisin qui a aidé Howard à construire son bunker et qui aurait eu la présence d'esprit de venir s'y réfugier quand une lumière d'une rare puissance a éclairé le ciel?

Est-ce qu'Howard -  visiblement très paranoïaque - a simplement pété un câble et inventé de toutes pièces la mort certaine qui attend quiconque met le nez dehors?

Après tout, il faut sans doute être un brin dérangé pour consacrer plusieurs années de sa vie à la construction d'un bunker tout compris (avec douche, salon et un jeu de Monopoly).

L'amateur de la série Lost aura l'impression de revenir dans le fameux bunker découvert par les survivants où John Locke appuyait frénétiquement sur un bouton en pensant sauver le monde.

Après une heure de dynamique dysfonctionnelle entre nos trois protagonistes emmurés sous terre, un événement inattendu nous ramène au bout du siège dans lequel on commençait à se caler.

Mais pas question ici de vous vendre la mèche de quoi que ce soit. Si J.J. Abrams est parvenu à garder ses secrets pratiquement jusqu'à la sortie en salle (il a modifié le nom de son film à deux reprises pour brouiller les pistes), on va se garder une petite gêne.

Par contre, la fin risque de vous laisser un peu sur votre faim, à l'image de ce jeu de mots. Comme si la distribution venait de réécouter le premier film (qui n'est pas vraiment le premier film, une suite, un préquel, etc.) et venait de se souvenir d'ajouter des trucs dignes de X-Files (j'en dis déjà trop, honte à moi).

Comme si on avait voulu offrir deux films pour le prix d'un, alors que l'idée de base était plutôt géniale.

Le film vaut néanmoins le détour pour les amateurs du genre, ne serait-ce que pour la prestation déconcertante de John Goodman et les questions que vous continuerez de vous poser en roulant vers la maison.

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THRILLER. 10 Cloverfield Lane. De Dan Trachtenberg. Avec Mary Elizabeth Winstead, John Goodman, John Gallagher Jr. 1h40.

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PHOTO FOURNIE PAR PARAMOUNT PICTURES