Chine, dans les années 80. Orpheline depuis l'âge de 3 ans, Min Li (Mylène Jampanoï) ne connaît rien à la vie quand, sortie de l'adolescence, elle quitte son foyer d'accueil pour un stage de six semaines chez un botaniste, M. Chen (Ling Dong Fu).

Ce fin connaisseur des plantes, vivant entouré d'un jardin luxuriant, froisse Min Li par sa personnalité sévère, et totalement dénuée d'humour. Sa fille, An (Xia Ran Li), n'est à l'inverse que délicatesse et tendresse. La complicité immédiate entre les deux jeunes femmes ne tardera pas à se transformer en relation amoureuse.

L'arrivée du frère d'An, Dan (Wei-chang Wang), va bouleverser l'illusoire équilibre des deux amantes. Ce soldat un peu balourd voit en Min Li la compagne idéale. D'abord révulsée par les projets de son frère, An finit par proposer à Min Li d'épouser Dan et profiter de son absence pour être ensemble.

Le voyage de noces de Dan et Min Li tourne rapidement au vinaigre quand celui-ci découvre que son épouse n'est plus vierge. Une violente dispute éclate, et Min Li de retour chez le botaniste, coupe les ponts avec Dan, envoyé au Tibet. On sent la tragédie arriver quand le jardin, négligé par An, dépérit, et que l'amour des deux femmes s'intensifie.

Pour son dernier long métrage, le réalisateur et écrivain Dai Sijie (Balzac et la petite tailleuse chinoise) s'attaque à ce qui reste encore tabou dans la société chinoise : l'homosexualité. Rares sont les films racontant les amours de deux femmes, et le mérite de Dai Sijie est d'avoir porté à l'écran un projet ambitieux, et suffisamment dérangeant pour n'avoir pas pu se tourner, censure oblige, en Chine. Dai Sijie a conservé le mandarin, et troqué la Chine pour le Vietnam.

Les Filles du botaniste offre de beaux moments de cinéma. Dans le jardin foisonnant de M. Chen, lieu poétique du huis clos dramatique, d'abord. Dans le contraste entre la douceur des deux femmes, et la brusquerie que leur relation suscite chez les hommes, ensuite.

Malheureusement, les moments où le film pourrait susciter une émotion profonde chez le spectateur sont gâchés par les clichés ponctuant le film, et par une bande sonore peu subtile. Le tout renforce l'impression de se trouver dans une annonce pour le tourisme en Asie, au mieux, ou dans une publicité pour gels douches, au pire.

Si les deux comédiennes parviennent à donner vie à la complicité de leurs personnages, leurs scènes plus physiques sont, en dépit de la lumière tamisée, de la moiteur exotique de leurs corps et de la flûte omniprésente, dépourvues de toute sensualité. La scène où elles s'émerveillent devant une racine franchement phallique, dénote à cet égard une certaine naïveté ou un manque confondant d'imagination. On est loin de l'érotisme renversant des amours de Rita et Betty (Laura Harring et Naomi Watts) dans un film d'un tout autre genre, Mulholland Drive.

On regrette enfin que Dai Sijie, qui prend le temps de donner chair à l'attachement de Min Li et An, ait bâclé la chute du film. Comme si, une fois sorties du cocon de l'île de M. Chen, les deux filles du botaniste perdaient tout intérêt. Reste un film dense, mais un peu trop lisse.
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LES FILLES DU BOTANISTE, drame de Dai Sijie. Avec Mylène Jampanoï, Xiao Ran Li, Ling Dong Fu, Wei-chang Wang.

Dans la Chine des années 80, Min Li, s'éprend d'An, la fille du botaniste chez qui elle effectue son stage.

Un film sensible et dense, malgré une mise en scène parsemée de clichés