Schwartz a de quoi faire mentir tous les snobismes du monde. C'est le secret le mieux partagé de Montréal. Tout le monde connaît Schwartz, tout le monde fait la queue pour s'y asseoir le temps d'engloutir un smoked meat. Et non, ce n'est pas parce que les touristes s'y agglutinent que c'est une arnaque.

Fins connaisseurs, critiques de restaurant et vieilles âmes de la Main s'accordent pour le dire: chez Schwartz, le smoked meat est le meilleur de Montréal. Voir de l'Amérique du Nord. Voir du monde. Son goût se reconnaît entre mille, même si on ne peut vraiment dire ce qu'est ce goût.

La virée que propose Gary Beitel est à l'image de la vénérable institution montréalaise. On y rencontre ceux qui ont fait de Schwartz leur sacerdoce. Joao Goncalves, d'origine colombienne, s'y affaire depuis 32 ans. Peter Christianis veille sur les grills depuis quatre décennies.

Parmi eux, quelques nouvelles recrues. Alexandre Lebel, la «tornade blanche», débarrasse les tables plus vite que son ombre. Le personnel - toujours masculin - se diversifie. Se «melting-potifie». Mais embrasse toujours sa carrière avec la même ferveur.

Gary Beitel suit la frénésie quotidienne du restaurant. Tape la causette avec les habitués. Regarde les nouveaux convertis tomber en adoration pour les fameux sandwichs à la viande fumée dès la première bouchée. Et filme, avec bienveillance, les hommes de Schwartz s'affairer au comptoir, en cuisine, et en coulisses.

Une observation que l'on ne peut pas se permettre quand on va manger chez Schwartz's. Les clients défilent, les serveurs s'affairent avec l'agilité de danseurs de ballet. Et sitôt mangé, le dîner de Chez Schwartz's est vite payé, pour laisser place sur la banquette à d'autres fans.

C'est là tout l'intérêt de ce documentaire: mettre des visages derrière le modeste boui-boui, fondé il y a 75 ans, et érigé au fil des années et du bouche-à-oreille en un monument aussi célèbre - mais plus apprécié - que le stade Olympique.

Les curieux qui voudraient y apprendre la recette - gardée aussi secrète que celle de l'ingrédient magique de Coca-Cola - resteront sur leur faim. Aucun sourire, aucune demande n'apportera la réponse à cette question si souvent posée: pourquoi la viande fumée est-elle meilleure chez Schwartz que chez le voisin?

Gary Beitel s'en fout un peu. Et il a raison. Chez Schwartz, ce qui importe, c'est un peu la décoration - d'origine, garantie sans chichi -, l'ambiance - d'origine, et elle aussi sans chichi - et la bouffe. C'est bon, un point, c'est tout.

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Chez Schwartz, documentaire de Gary Beitel.

Cette plongée au coeur du mythique restaurant déli de Montréal met des visages sur une ambiance et une bouffe que l'on dit unique en Amérique du Nord.

Bon appétit.