D'accord, Cascades n'est plus une PME depuis longtemps. Mais les entreprises plus modestes peuvent sans doute tirer quelques enseignements de sa longue expérience en innovation.

«Chez nous, on a des innovations de produits, on a des innovations de procédés, on a des innovations de méthodes», décrit Roger Gaudreault, directeur corporatif, développement scientifique et innovation.

Un exemple?

Lancé en 2010 et destiné aux secteurs de la santé, de la restauration, de la transformation alimentaire et de l'éducation, le papier essuie-main antibactérien Defensia procure une protection pendant au moins 30 minutes. Sa mise au point a nécessité plus de cinq ans de recherche et développement et un investissement de près de 2 millions de dollars.

Les innovations comme celle-là, grandes et petites, ont parsemé la croissance de l'entreprise, mais les idées ont longtemps ruisselé sans contrôle.

Pour accroître ce flux et le canaliser sans en perdre une goutte, l'entreprise de Kingsey Falls a implanté en 2007 un système de gestion de l'innovation.

Roger Gaudreault l'a schématisé sous l'image d'un entonnoir rempli de couches filtrantes.

La couche supérieure représente la création et la cueillette des idées. Juste en dessous, l'étape suivante consiste à sélectionner celles qui méritent d'être poussées plus avant sous forme de projets.

«C'est alors qu'on met en place des équipes de développement de produit», décrit Roger Gaudreault.

Bassin d'idées

Tout au cours de cette longue phase de développement, l'entonnoir se rétrécit, illustrant l'abandon des projets qui se révèlent irréalisables ou non rentables.

Une infime minorité de projets débouche de l'entonnoir avec la dernière étape de commercialisation - la plus coûteuse. Un bassin de 60 bonnes idées donne lieu à 7 projets, qui ne produiront qu'un seul succès commercial.

Dans ce schéma, l'entonnoir lui-même balise tout le processus en rappelant les valeurs de Cascades en regard du développement durable: haute proportion de matériaux recyclés, chimie verte et énergie propre.

En pratique...

Comment se concrétise ce système? Au groupe Norampac, par exemple, des équipes d'innovation se rencontrent dans les usines, à intervalle régulier, pour tenir des séances de remue-méninges et produire des idées.

L'usine soumet ces idées à la direction régionale, qui présente les meilleures au comité de gestion de l'innovation du groupe.

«Ces comités se rencontrent tous les trois mois et je m'assois avec chacun», indique Roger Gaudreault.

L'entreprise s'est même dotée d'indicateurs de performance relatifs à l'innovation. Ainsi, chez Norampac, chaque usine doit produire chaque année une bonne idée pour 10 employés.

«Quand vous avez 5500 employés comme chez Norampac, ça donne 550 bonnes idées par année, commente Roger Gaudreault. Notre problème, ensuite, c'est de gérer ces idées!»

Un bouquet d'entonnoirs

Mais on pouvait voir plus large. Selon la littérature spécialisée, la moitié des améliorations de performance dans l'entreprise sont issues d'idées qui ont germé dans le terreau de l'organisation. Il y avait là une moisson à récolter. «On s'est dit qu'on créerait un entonnoir non seulement pour les ventes et marketing, mais également un pour la production, un pour les ressources humaines, un pour les finances, un pour les services et logistique, dit M. Gaudreault. Chacun de ces secteurs va maintenant contribuer à ce que Cascades soit meilleur.»

Roger Gaudreault, lui-même scientifique, assure que ce système n'est en rien un carcan à la créativité.

«Je ne pense pas qu'il soit un frein parce qu'on a créé une structure dans laquelle on n'impose rien et qui a été bien reçue, dit-il. Il faut que la structure soit flexible et qu'on respecte la façon de fonctionner des différents groupes de l'entreprise.»