Le 13 novembre dernier, Prometic Sciences de la Vie annonçait un trimestre profitable, le second de suite en 2012.

Prometic a dégagé un bénéfice net de 2,5 millions sur des revenus de 7,7 millions lors du troisième trimestre de 2012. Elle a déclaré un bénéfice de 800 000$ au trimestre précédent. Il s'agit là d'une validation claire de son modèle d'affaires.

La biotech de Laval offre aux grandes sociétés pharmaceutiques ce qui leur manque: un accès sûr et relativement peu coûteux aux protéines d'intérêt thérapeutique dont elles ont besoin.

Les entreprises prennent pour habitude d'impartir tout ce qui n'est pas au coeur de leurs visées, comme mettre des médicaments en marché.

C'est ainsi que Prometic a des ententes avec les poids lourds de l'industrie pharmaceutique du monde, pensons à Abbott, Merck, Bayer, GlaxoSmithKline, Pfizer et tutti quanti, pour leur fournir des technologies les habilitant à extraire les protéines qui les intéressent.

Le 16 octobre dernier, la biotech québécoise remettait ça. Elle signait une entente totalisant 21 millions pour procurer à Shenzhen Hepalink Pharmaceutical une protéine dont la société chinoise a absolument besoin.

«Shenzhen est le plus gros fournisseur mondial d'héparine, explique Pierre Laurin, président et chef de la direction de Prometic. Elle en vend à Sanofi Aventis, Pfizer, etc. Sa capitalisation boursière à Hong Kong est de 14 milliards. Et elle cherche à abaisser ses coûts de production d'héparine pour conserver son marché.»

Rappelons que l'héparine est l'anticoagulant le plus vendu au monde. On s'en sert pour traiter la thrombose, entre autres. Actuellement, elle est extraite de l'intestin du cochon. Cette méthode a ses problèmes. En 2008 la Food and Drug Administration américaine (FDA) rapportait des cas de contamination des stocks bruts d'héparine provenant de la Chine. Spécifions que Shenzhen n'était pas en cause.

Prometic a une technologie originale permettant d'extraire des protéines comme l'héparine à partir du plasma sanguin. Il s'agit d'une méthode de séparation des protéines et de nettoyage de toutes impuretés tels les prions, les virus et autres indésirables.

Nouvelle usine

«Nous allons aménager une nouvelle usine à Laval dans d'anciens locaux de l'INRS, explique Pierre Laurin. Cela devient nécessaire pour fournir à la demande. Nous y produirons aussi les immunoglobulines dont on se sert pour traiter les maladies auto-immunes comme l'arthrite rhumatoïde.»

Le marché mondial pour les immunoglobulines est actuellement de 300 millions annuellement, selon M. Laurin.

L'usine entrera en production au milieu de 2013. Son aménagement se fait actuellement au coût de 5 millions. À capacité, elle emploiera plus de 80 personnes.

Cette usine illustre à merveille le retournement du modèle d'affaire des sociétés pharmaceutiques et la façon dont certaines biotechs peuvent en profiter.

Jusqu'à tout récemment Prometic tirait le gros de ses revenus en accordant à des sociétés pharmaceutiques le droit d'utiliser ses techniques de séparation et de purification des protéines du plasma sanguin.

L'entreprise pharmaceutique payait pour ce droit, elle achetait à Prometic les équipements voulus et chaque trimestre commandait à la biotech les matières premières nécessaires.

«Aujourd'hui, nous grimpons plus haut dans la chaîne alimentaire, souligne Frédéric Dumais, directeur, relations aux investisseurs chez Prometic. La pharmaceutique est prête à impartir complètement entre nos mains la totalité de la fabrication des protéines voulues. Nous nous déplaçons donc vers des opérations à marge bénéficiaire encore plus avantageuses.»

Produit fini

Il ne s'agit plus de livrer une technologie, mais le produit fini. «Pour s'assurer que Prometic pourrait avoir l'usine dont Shenzhen a besoin, cette dernière a investi 10 millions en actions de Prometic, rappelle M. Dumais. Shenzhen a accepté de payer une prime de 63% par rapport au prix de l'action de Prometic le jour de la transaction. Elle détient maintenant le dixième des actions de notre compagnie.»

Une autre transaction, annoncée le 30 juillet 2012, se situe elle aussi assez haut dans la chaîne de valorisation. L'accord avec NantPharma, une société américaine, prévoit la livraison par Prometic d'une protéine d'intérêt thérapeutique nommée cGMP.

«Nous livrons le produit presque fini, encore une fois, à partir de nos installations de production, insiste Pierre Laurin. Et ici, un autre bond en avant vers des marges encore plus intéressantes: NantPharma se réserve le marché américain, mais nous laisse les droits commerciaux sur d'autres territoires de la planète. Nous sommes non seulement maîtres d'oeuvre de la production, mais aussi de la commercialisation.»