Les quotas sont l'une des mesures à envisager pour permettre la pleine contribution des femmes à la gouvernance des entreprises du Québec. C'est l'opinion de près de 75% des membres sondées par l'Association des femmes en finance du Québec (AFFQ), a apprisLa Presse Affaires.

Plus de 150 répondantes, membres de l'association, ont participé à la consultation, tenue au cours des derniers mois.

«On tourne en rond depuis trop longtemps, il est temps d'agir», affirme sa présidente Dana Ades-Landy.

L'organisation estime «très modestes» les cibles proposées, l'an dernier, par la Table des partenaires influents pour accélérer la progression des femmes dans la gouvernance des sociétés cotées. Ce comité regroupant dix personnalités d'affaires, dont cinq femmes, était coprésidé par Monique Jérôme-Forget, ex-ministre libérale (la seule à promouvoir les quotas), et par Guy Saint-Pierre, ancien PDG de SNC-Lavalin.

Au programme: atteindre une proportion de 20% de femmes au sein des conseils d'administration (C.A.) des entreprises cotées en Bourse d'ici cinq ans, 30% dans 10 ans et 40% dans 15 ans. Ces cibles ont été adoptées par le gouvernement québécois en 2013.

«Le délai est beaucoup trop long, aucune mesure n'a été mise en place pour atteindre ces objectifs et aucune conséquence n'a été prévue pour les entreprises qui ne se conformeraient pas», déplore Mme Ades-Landy, vice-présidente régionale, Québec et est de l'Ontario, services aux entreprises à la Banque Scotia.

Défier le statu quo

Dès que le prochain gouvernement sera formé, l'AFFQ lui demandera d'agir concrètement.

«Nous sommes ouvertes à d'autres solutions que les quotas, mais il faut mettre en place un plan d'action pour défier le statu quo, affirme-t-elle. Nous croyons que le Québec pourrait viser 20 ou 25% de femmes d'ici trois ans et 40% d'ici cinq ans.»

Le Québec est toutefois bon élève lorsqu'on le compare au reste du Canada. La province compte près de 20% de femmes dans les C.A. de ses sociétés figurant au classement des plus grandes entreprises canadiennes Financial Post 500, d'après l'enquête Catalyst 2013. La moyenne de toutes les entreprises du classement est de près de 16%.

«Le Québec atteint un meilleur résultat, car nos sociétés d'État doivent déjà respecter la parité», explique Dana Ades-Landy.

Les femmes sont complètement absentes du C.A. de 36% des sociétés du classement. C'est le cas de près de 42% de celles cotées en Bourse.

Des femmes compétentes

«L'excuse souvent répétée selon laquelle il n'y a pas suffisamment de femmes compétentes pour siéger aux C.A. n'est plus valide», affirme Mme Ades-Landy.

Depuis 10 ans, presque 50% des diplômés des programmes en administration et en comptabilité sont des femmes.

L'AFFQ a une liste de plus de 200 femmes formées, expérimentées et prêtes à contribuer à la gouvernance des entreprises.

«Le problème, c'est que les C.A. des grandes organisations et des sociétés cotées en Bourse sont encore formés par des réseaux largement masculins, constate la présidente. Au Québec, un petit cercle de femmes a réussi une percée, mais ce sont souvent les mêmes que l'on trouve sur tous les C.A.! Nous avons besoin d'un meilleur équilibre.»

LE MENTORAT EN ACTION

Le nouveau programme de mentorat de l'Association des femmes en finance du Québec (AFFQ) a formé 12 dyades au cours des six derniers mois. Lancé en partenariat principal avec la Caisse de dépôt et placement du Québec, ce programme souhaite doubler ce nombre l'an prochain. « Nous formerons les nouvelles dyades à la fin de l'été pour que les rencontres commencent en novembre prochain », affirme Martine Cantin, directrice de l'AFFQ.

Le jumelage n'est pas laissé au hasard : chaque mentorée remplit un questionnaire pour décrire son profil, ses objectifs de carrière et ce qu'elle souhaite aller chercher dans le mentorat. Les mentorées peuvent être à différents stades dans leur carrière. « Pour sa part, le mentor a aussi un questionnaire à remplir sur son expertise et sur ce qu'il a envie de partager, explique Mme Cantin.

Certains ne sont pas membres de l'AFFQ puisque nous voulions des profils très diversifiés. Nous avons d'ailleurs quelques hommes. » L'AFFQ s'est assurée de ne pas créer de dyades composées de deux employés de la même organisation. « Il existe déjà des programmes de mentorat dans plusieurs entreprises et nous voulions permettre aux gens d'échanger sur des enjeux plus larges », indique Mme Cantin.

Les dyades se rencontrent habituellement une fois par mois. « Nous faisons un suivi chaque trimestre pendant l'année, précise Mme Cantin. Par la suite, libre à eux de continuer les échanges. »